Penser n’est pas croire ! Mais qu’est ce que penser ? Pdf Pdf
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Dans un monde, qui sombre chaque jour un peu plus dans une confusion généralisée, cette affirmation et cette question s’imposent comme indispensables à tout travail d’analyse respectable. D’évidence elles devraient être d’ailleurs préalables à toute velléité de connaissance, mais ce truisme s’est délité. Ecrire et/ou dire indifféremment « je pense que » ou « je crois que » ne semble plus poser le moindre problème aux intellectuels contemporains, d’abord et surtout les médiatiques mais en existe-t-il (en est-il (re)connus?) d’autres...? Et je n’ai pas souvenir d’avoir entendu un seul journaliste, faire acte déontologique, en demandant de préciser : « Croyez vous, ou bien, pensez vous, que… ? ». Cette régression sémantique s’est répandue sans aucun frein dans tous les secteurs de nos sociétés. Pourtant la résurgence du théologique au sein même de la « république » dite laïque devrait susciter (exiger !) une résistance farouche et déterminée sur le sens du mot penser qui fonde notre humaine spécificité ! Et le premier repère pour affronter le tumulte se trouve sans peine dans l’étymologie….

  1. « Penser » est une forme savante 1« provenant (v.980) du latin pensare fréquentatif de pendere (pendre) signifiant aussi « peser » d’où par deux développements différents « contre-balancer, payer » et dans le domaine intellectuel, « évaluer, apprécier » d’où « réfléchir, méditer » (VIème siècle). Avant la fin du XIIème Le verbe va générer le mot « pensée » directement tirée de son participe passé féminin et qui désigne à partir du XIIIème l’esprit en tant que siège de ce qui est pensé ». Il est donc clair, très tôt, que le terme et ses dérivés, tentent de circonscrire l’ « espace mental » où s’élabore notre compréhension et notre représentation de ce qui nous entoure et, par nécessaire réflexivité, celles de notre propre place dans cet univers. Penser (qui engendre forcément « penser que l’on pense » !) peut être considéré comme le sésame linguistique de notre accès à la conscience voire même à l’existence qui sera vulgarisé au XVIème par la formule rabâchée de Descartes « cogito ergo sum ». A l’occasion il est intéressant de noter que « penser » se dit alors en latin « cogitare » qui signifie au sens propre « agiter ensemble des pensées » !
  2. « Croire » est issu également du latin credere, ancien terme de la langue religieuse, d’origine indoeuropéenne. Tout comme fides (foi), credere a pris très tôt des emplois profanes, par suite de la domination, de plus en plus grande, de la culture méditerranéenne sur la culture indoeuropéenne d’origine orientale. Ainsi il a signifié « mettre sa confiance en qqn, en qqch », « confier qqch à qqn » d’où concrètement prêter (crédit) et « croire qqch, qqn ». Et c’est bien le christianisme qui va réattribuer au verbe son sens religieux premier, credo « je crois » traduisant alors le grec pisteuô et fides le grec pistis, de sorte qu’en pleine période romane (et cela mérite d’être souligné) fides s’est remis à servir de substantif à credere qui n’avait aucun dérivé pour remplir ce rôle ». Comme toute forme de pouvoir dominant, à tendance hégémonique, on constate que le christianisme a tenté (avec succès !) d’asservir la langue à ses ambitions en inféodant le sens des mots à ses propres dogmes. Ainsi de fides « foi, confiance », « loyauté, promesse, parole donnée », qui donnera fidélité, le latin chrétien confisque son emploi et le réduit à son sens de « confiance en Dieu » (avoir la foi !) au point qu’il n’est pratiquement plus utilisé de nos jours sans sa connotation religieuse

Les deux termes, d’évidence, sont donc historiquement antinomiques et s’opposent par définition. Pourtant, très tôt, les « philosophes », les « intellectuels » enfin tout ceux qui pensent (ou « croient » penser!) ont introduit, sous couvert d’approfondissement, de l’ambivalence donc de l’ambigüité, dans ses significations. Il est bon de rappeler que, par exemple et pour ne citer qu’eux deux, Descartes et Pascal sont contemporains d’un temps assujetti au pouvoir religieux et aux convulsions dramatiques consécutives à la Réforme Protestante. Les deux sont issus d’une éducation religieuse, jésuite pour le premier et janséniste pour le second, ce qui participe peut être à expliquer le retournement mystique de ce dernier.
De fait ce sont deux esprits formatés à une doxa théocratique dont ils n’ont pu, malgré leurs méritoires efforts, totalement s’absoudre.  Et, il est d’ailleurs surprenant de constater que ces deux références (parmi bien d’autres d’ailleurs !) incontournables et fondatrices de la pensée moderne ne soient jamais envisagées (et critiquées !) à la lumière de leurs déterminismes culturels, comme si leur indéniable fécondité intellectuelle les prémunissait de tout servitude inconsciente. On mesure déjà, à quel point, ce travail de dissociation de sens, entre croire et penser, peut s’avérer culturellement labyrinthique. Essayons toutefois…

  1. De toutes les croyances la religieuse s’avère immédiatement à la fois comme dominante et référentielle mais certainement, du moins en apparence, comme la plus simple à démasquer.
    Le philosophe Alain affirmait crûment : « Penser n'est pas croire. Peu de gens comprennent cela. Presque tous, et ceux-là même qui semblent débarrassés de toute religion, cherchent dans les sciences quelque chose qu'ils puissent croire, Ils s'accrochent aux idées avec une espèce de fureur ; et si quelqu'un veut les leur enlever, ils sont prêts à mordre. (...) Lorsque l'on croit, l'estomac s'en mêle et tout le corps est raidi. Le croyant est comme le lierre sur l'arbre. Penser, c'est tout à fait autre chose. On pourrait dire : penser, c'est inventer sans croire ». Il est réjouissant de constater avec qu’elle aisance il balaye d’un « revers de phrase» l’aspect théologique. Car, pour lui, le débat sur la croyance  ne commence que « débarrassés de toute religion » et l’on mesure bien à quel point nous en sommes, aujourd’hui, éloignés. La pusillanime tolérance laïque contemporaine aux « faits » religieux a progressivement renversé le paradigme du progrès social pourtant historiquement indissociable de l’athéisme. Ainsi, aujourd’hui, le droit inaliénable, comme individu, de croire en ce qu’il veut, dévoyé par le prosélytisme intégriste et les illégitimes revendications communautaristes, permet ainsi graduellement aux religions de tous bords de s’opposer, via l’accusation de blasphème et en toute scandaleuse intolérance, à l’idée même de non-croyance.2 Mais ceci ne serait bien sûr pas possible si, le matérialisme affiché (l’apparent détachement du théologique) de nos sociétés occidentales n’était pas finalement qu’un mince verni recouvrant un corpus idéologique foncièrement gangrené par l’Idéalisme depuis son origine. Et ce sera bien à la suite de ce texte de tenter de le révéler….
    Mais pour l’instant, parce qu’abusés collectivement par cette fausseté de surface, il est devenu vital de réaffirmer sereinement (renouant avec les Lumières) que croire à l’existence supposé d’un (ou de plusieurs) dieux (de surcroit à notre image) et subséquemment aux fables que les chefs religieux ont forgées aux cours des siècles à seule fin de légitimer leurs pouvoirs est, au sens propre, tout simplement impensable ! Dès qu’il y a pensée toute religion s’effondre car elle en révèle immédiatement la stupidité des fondements. Il n’y a pas lieu au débat juste la nécessité de prendre conscience et d’affirmer l’incompatibilité intrinsèque de l’idée théocratique avec celle du logos, indument reliés et appropriés par toutes les théologies. Et bien que notre univers demeure, par essence, complexe et mystérieux, réfléchir et connaitre ne peut que rejeter, infailliblement, tout recours à l’explication divine !

Alors, considérons définitivement avec Alain, et comme acquis que dans le champ des croyances, la religieuse n’est qu’aliénation et appliquons nous d’abord à débusquer les autres là où elles sont à priori bannies, et en tout premier lieu dans ce que l’on nomme et englobe par le mot science(s)3. Alors que « le noble physicien» (tout est dans « noble » !) qu’il nous présente en contrepartie4 n’est certainement pas, déjà à son époque, une espèce commune il est à craindre qu’il ne soit plus qu’extrême rareté dans la nôtre. Car la frontière que le philosophe tentait d’ériger symboliquement entre ce dernier et ceux qui … « cherchent dans les sciences quelque chose qu'ils puissent croire, (…) s’accrochent aux idées avec une espèce de fureur ; et si quelqu'un veut les leur enlever, (…) sont prêts à mordre », certainement déjà illusoire de son temps n’est plus, à de rares exceptions près, qu’idéaliste prétention. D’abord parce que la formation universitaire des femmes et hommes de science ne les immunisent en rien de leurs déterminismes sociaux et culturels mais bien au contraire y superpose le formatage éducatif et le carcan du savoir « consacré », incontournables « fourches caudines » pour accéder à l’élite; tout en les soumettant simultanément à une compétition féroce et arbitraire (légitimée par celle qui les attend dès l’obtention de leur diplôme) certainement peu propice à travailler « sans fièvre » et à recevoir « les objections comme des amies » 3. Tout concourt dans ces parcours de futurs
« chercheurs » à produire des individus retors et égocentrés, ce qui ne peut, à terme, que dévoyer leur potentielle pensée en doctrine et leurs velléités d’indépendance en pure orthodoxie. En fait apprendre à penser est aux antipodes de ce qui précède ; et on pourrait même supposer que par conséquence il (l’acte) a tout simplement disparu. En se limitant au champ des sciences modernes (dites « exactes » ou « dures » parce que fondées sur la déduction logique – en fait le simple calcul mathématique !) il n’est pas si difficile d’en faire une simple et rapide démonstration à partir d’abord des seuls prémisses étymologiques du terme.

  1. Si penser c’est peser c’est donc avant tout douter :
    Qu’elle est donc, aujourd’hui, la part du doute dans les affirmations théoriques arrogantes et dominantes de la techno-science, dans son implantation (et ses implications toxiques) au cœur de notre vie quotidienne, dans le pillage consécutif de notre planète qu’elle requiert et organise, dans les failles éthiques qu’elle ouvre sous nos pas au nom de notre mieux être présupposé ? Nulle ! Absolument inexistante ! La Science (enfin ce que l’on nomme aujourd’hui ainsi) avance sans « conscience » ; il faut se rendre à l’évidence : Elle ne pense pas ! Elle croit, en définitive, tout simplement et sans la moindre distance, « tout bonnement » en elle-même et s’exclue ainsi, en toute naïveté et insouciance, du champ même où elle prétend se situer. La liste démonstrative (passée et actuelle) de son impéritie, bien que déjà sous nos yeux, reste à faire et ce n’est pas ici mon propos (bien trop déprimant !) ; je n’en extrairai, comme exemple imparable, que l’ « aventure » de l’énergie nucléaire, fleuron cocardier de notre savoir faire Français, dont quiconque pense,peut mesurer, sans grande peine, l’effroyable stupidité. Produire de l’électricité grâce à des turbines à vapeur dont on chauffe l’eau par une technologie aussi sophistiquée et dangereuse qu’une réaction nucléaire5 laisse déjà assez perplexe quant aux capacités réflexives de leur concepteurs. Surtout qu’ils savaient que le risque irréductible et fatal d’une perte de contrôle d’un réacteur engendrerait des conséquences effroyables sur le territoire et les populations périphériques (ce qui n’a pas manqué d’ailleurs d’advenir : Three Miles Island, Tchernobyl, et maintenant Fukushima dont le pire des conséquences est encore à venir… !) et que ces magnifiques installations allaient engendrer des déchets radioactifs6 à l’époque déjà théoriquement ingérables et dont ils ont tout simplement reporté la solution hypothétique,…. à plus tard ! Or, après 60 ans, le problème reste entier… 7 De fait l’abomination irréversible en cours au Japon qui, s’ils pensaient, aurait dû tétaniser et mobiliser la totalité des scientifiques mondiaux (grève générale !?) tant ils sont censées être les premiers à comprendre et évaluer l’ampleur du désastre, n’a déclenché, de leur part,…. qu’un silence accablant. Exceptés, bien sûr, chez les « pro-nucléaires » (nombreux !) qui pourtant en sont foncièrement responsables et qui osent s’avancer sur le devant de la scène pour fustiger l’irrationalité des craintes des populations (hallucinant !) et des « contre-vérités » diffusées par les militants écologistes (sic !).
    N’est ce pas la preuve irréfutable de l’indéfectible et arrogante croyance de la techno science en son omnipotence et de son incapacité à évaluer les effets dévastateurs de ses propres projets, donc à penser, tout court … ?!

Parallèlement pour tenter d’admettre et de comprendre l’apathie et la servilité de toute cette indéniable intelligence il est nécessaire de les contextualiser et de se débarrasser de la croyance ou de l’idée reçue que le champ scientifique est, par essence, autonome et indépendant, bien que bon nombre de ces acteurs (naïfs ou pervers) continuent à en perpétuer l’illusion….
En fait il y a déjà belle lurette que l’assujettissement de la recherche scientifique aux intérêts de la production industrielle capitaliste a balayé la vision idyllique d’un comportement contemplatif, détaché et aléatoirement fécond. L’acte de penser (même en recherche fondamentale) s’est recroquevillé, soumis aux contraintes de l’efficacité productiviste et mercantiliste. Et c’est une superposition sémantique qui l’a progressivement vidé de sa substance par la prééminence progressive d’un faux synonyme : Rationnaliser ! Nous sommes peut être là face à un extraordinaire détournement de langage, une spoliation de sens, aujourd’hui au profit de la doxa néolibérale, qui légitime par l’apparence du logos (nous y revoilà !) la démence de ses chimères.
Car, la réalité (du moins ce global artifice culturel où nous baignons et que la majorité d’entre nous considèrent aujourd’hui comme telle !) n’a jamais eu de représentation plus « raisonnée ». Et pourtant, même pour le plus faible des esprits un tant soit peu lucides, elle ne peut manquer de se révéler, un peu plus chaque jour, totalement impensée (cf. ci-dessous le chapitre sur la « mécanique quantique »). La révolution industrielle (technologique) couplée à la privatisation des moyens de production, à la division du travail et à sa « rationalisation » ont, en une centaine d’années, généré une mutation radicale et probablement irréversible de la condition humaine sans que le processus à l’œuvre ne soit, en fait, jamais globalement réfléchi (au sens propre comme au figuré)8. Avec pour seul argumentaire à cette dite « évolution » les idées de progrès et/ou de modernité (étymologiquement et respectivement « la marche en avant » et « ce qui est récent, d’aujourd’hui » (sic) !). Quelle fantastique, mais, à postériori terrifiante, tautologie pour nous régir ! Mais également quelle remarquable confirmation de notre incapacité collective à penser notre monde ! Et pourquoi persistons nous à confondre avancer avec s’améliorer ? Peut être parce que la « raison », substitut consensuel de pensée, s’est imposé par son indéniable efficacité matérielle ; même si les guillemets s’imposent afin de souligner l’ambivalence du terme et de permettre d’établir ce qui se dissimule derrière sa signification actuelle.

  1. Son ambigüité sémantique apparait dès l’origine. Il est issu « (v. 980) du latin rationem, accusatif de ratio,-onis, nom tiré du supin9 (ratum) de réri, « compter » et « penser », lui-même d’origine inconnu. Ratio désigne le compte, puis la matière du compte, les affaires, souvent joint à res « chose ». Il est fréquent dans la langue de la rhétorique et de la philosophie où il traduit le grec logos en vertu également du double sens de ce mot : « compte » et « raison » (et en outre « langage »). Et ce n’est qu’au XVIIIème siècle qu’apparaissent les principales extensions philosophiques modernes via la philosophie des lumières et la terminologie Kantienne (j’y viendrai ci-dessous). Raison est alors employé par métonymie 10 pour désigner ce qui est conforme à la vérité ou à la réalité. ».
    On voit bien que ce n’est que très tardivement et de manière transgressive que le terme et le processus intellectuel qu’il désigne s’apparentent à la recherche de la vérité ; avant, l’esprit « rationnel » calcule plus qu’il ne réfléchit. Il faut savoir, qu’« en 1483, livre rationnel, comme livre de raison, désignait un livre de compte et, substantivé, celui qui tient les comptes. ». Il me semble que ce double sens, entre ce qui est juste et ce qui se compte, qui est calculable mérite donc aujourd’hui, d’abord d’être rapporté, puis étudié au plus près…. En effet, lorsque l’on veut caractériser de manière schématique le « Siècle des Lumières », ne parle-t-on pas d’un basculement historique où la Raison triomphe enfin de la Foi et de la Croyance ? Et dans ce contexte il s’agit bien de ce qui est juste et lumineux contre l’ignorance et l’obscurantisme bien qu’il serait certainement plus pertinent de dire que le terme endosse, voire s’approprie, un sens qu’il ne « mérite » certainement pas ! Il est d’ailleurs facile d’en être convaincu si l’on se souvient que les révolutions de la fin du XVIIIème en Europe et sur le « Nouveau Continent » ont essentiellement débouché sur l’avènement de la bourgeoisie marchande au détriment de la noblesse d’état et que le changement de paradigme est d’abord et surtout d’ordre économique avant d’être politique ou/et social. D’ailleurs la religion, bien que mise à mal un certain temps, y a bien survécu et seule perdure encore (mais uniquement dans le monde occidental) sa prétendue mise à l’écart (constitutionnelle) du pouvoir politique.
    Ce n’est donc pas l’intelligence qui aurait supplanté la foi mais le calcul, l’intérêt, le « raisonnable » au sens de pragmatique, qui sont progressivement eux-mêmes devenus un crédo. Il faut être bien peu lucide pour ne pas percevoir que les fondements idéologiques apparents de la « modernité » ne sont que des dogmes creux tout aussi ineptes que ceux de la loi divine (songeons aux concepts récents qui régissent l’action politique: « Pragmatisme », « Pensée unique », « Real politik/réal-politique », « Fin de l’histoire » etc.) qui au-delà de la caricature reflètent sans conteste la croyance des dominants en la supériorité et l’irremplaçabilité (prouvée par l’absurde !) du modèle économique et politique à l’œuvre aujourd’hui sur notre planète… ! L’échec du « révolutionnaire », dit à tort, « idéologique », a permis, par extension indue, d’invalider la pensée comme préalable nécessaire à l’action politique. Je dis « à tort » car le Stalinisme, le Maoïsme, ainsi que tous les « ismes » accolés aux noms d’indéniables tyrans ne peuvent être considérés comme directement issus d’une pensée fondatrice. Marx a tenté de penser le capitalisme mais n’a pas théorisé le socialisme, si ce n’est en creux ; ce que je ne saurais mieux dire que Daniel Bensaïd : « Accusé de porter en lui le totalitarisme, le marxisme lance au contraire le défi le plus radical à toute forme d'incarnation du pouvoir. En traçant la perspective du dépérissement de l'État, il envisage l'exercice transitoire d'un pouvoir délocalisé et "désincorporé", d'une démocratie sociale qui marquerait réellement la sortie de notre préhistoire religieuse et mythologique ».
    Alors les « idéologues » du libéralisme ou « capitalisme moderne » (car il y en a et le paradoxe et la contradiction ne font pas partie de leur « ADN »/ C’est comme cela qu’ils parlent !) se sont engouffrés dans cette lecture partiale de l’histoire pour associer indistinctement toute analyse critique de la société qui menace leur domination à son utilisation dévoyée pour la conquête individuelle du pouvoir ce qui leur permet de dénoncer l’acte de penser, en soi, comme une irrecevable atteinte à la « marche en avant » du monde. L’échec patent des modèles politiques qui ont usurpé les qualificatifs de communistes ou/et socialistes leur a également permis de légitimer commodément ce qu’ils, par opposition, nomment « Démocratie » et autorise, en toute légalité, à une classe politique, à quelques nuances près unanimement acquise (asservie ?) à l’économie de marché, de parler et décider en notre nom. Ce qui, également, démontre son incapacité inhérente, sous couvert de rationalité, à s’extraire des contingences dont elle est, en réalité, l’essentiel artisan.

Il est facile de constater chaque jour, à l’écoute quotidienne des médias dominants, que la légitimité intellectuelle de la société contemporaine mondialisée s’organise essentiellement autour de l’ « expertise scientifique » dont la véracité est, à priori incontestable, parce que justement « scientifique » ! Cette autolégitimation, catéchisme des mass-médias, eux mêmes asservis à un modèle hégémonique (plus ou moins conscient) d’autocélébration, est aujourd’hui l’un des principaux vecteurs de la propagande néo libérale. D’autant que cette altération majeure de l’information (et donc de la possibilité de la connaissance) s’inscrit, s’organise, s’auto-génère au sein de la phénoménale expansion des dites « nouvelles technologies numériques» et du déferlement marketing qui la valide et la promeut !
Rares (et bien évidemment peu relayés) sont ceux qui osent résister intellectuellement à cet ensevelissement de la pensée par la logique de la modernité, et qui entrevoient la modification radicale qu’engendre ce totalitarisme technologique sur notre perception du monde. En moins d’un quart de siècle la « révolution numérique »11 a transmuté la totalité des activités humaines, individuelles et collectives ; et cette rationalisation/réification  du réel est affichée, « vendue », comme un incontestable et irréversible progrès. La puissance supposée illimitée de calcul qu’offre l’évolution des microprocesseurs (miniaturisation des composants, projet d’ordinateur quantique), conjuguée à son apparente efficience dans tous les domaines, jugulent chaque jour un peu plus la possibilité sereine et reconnue de toute analyse critique. Aujourd’hui « connaître »le monde consiste plus à le « modéliser » qu’à le comprendre, à tenter de prévoir et encadrer les changements que provoquent le productivisme consumériste (organisation du travail salarié, climat, santé, urbanisme, paix sociale, etc.) plutôt que de le penser, soit en l’occurrence de questionner et d’évaluer les choix qui le régissent et de tâcher d’en organiser la destinée. Et pour couronner cette inexorable dérive la réactivation récente du courant « transhumaniste » (l’homme augmenté), mythe ressassé et délirant de la « quête d’immortalité » ou de « la fontaine de jouvence », s’affirme comme l’irrésistible vitrine d’une humanité enfin débarrassée des insupportables contraintes liés à sa condition d’ « être vivant ». La croyance, souvent affirmée de manière péremptoire et arrogante, en un progrès scientifique exponentiel et omnipotent susceptible, grâce à la convergence des nanotechnologies, de la biotechnologie, de l’informatique et des neurosciences, de « produire » une surhumanité laisse parfois sceptique quant à la bonne santé mentale de ses prosélytes.
Puisque d’une part elle promet et promeut d’hypothétiques « marchepieds » vers l’immortalité, comme « la réalité simulée », « l'intelligence artificielle forte », « le téléchargement de l'esprit » et « la cryonique » tout en faisant fi de la finitude avérée de notre planète et des ressources qu’elle nous offre. A moins bien sûr (et certains n’hésitent pas à le faire) de limiter ces « bienfaits » à une partie de l’humanité (celle qui peut payer !) quitte à condamner (voire éliminer physiquement) le « rebut »12. Mais ne sommes nous pas déjà dans cette configuration ? Et ne faut-il pas voir dans ces apparentes élucubrations que les manifestations euphoriques d’une réalité socio-économique déjà pleinement à l’œuvre qui augmente nos capacités (ou nous le fait croire) par des prothèses (dites de communications) high-tech de plus en plus sophistiquées et addictives ?
In fine, la superposition (confusion !) entre science et technologie semble consommée laissant idéologiquement le champ libre au libéralisme mondialisé…
De plus cette absorption progressive de la recherche fondamentale par la technologie se trouve en quelque sorte verrouillée par la division sociale du travail, pierre angulaire de l’objectif d’efficacité du productivisme capitaliste et qui n’a bien évidemment pas épargné les laboratoires de recherche. D’autant que leurs privatisations concomitantes les contraignent à privilégier les objectifs « rentables » à court terme et à se soumettre aux principes de compétition (donc de secret), fondamentalement antithétiques avec ceux d’une ambition désintéressée de connaître. Car, il est difficile de nier que le cloisonnement des disciplines, les enjeux économiques, les rapports de pouvoirs et le carriérisme, l’assujettissement aux modélisations informatiques et aux technologies censées rendre compte rationnellement du réel, etc. constituent de solides obstacles qui limitent considérablement l’accès à la connaissance fondamentale. D’autant qu’ils entravent, bien évidemment, l’émergence et la mise en œuvre de toutes hypothèses ou projets de recherche dissidents.13

  1. L’exemple notoire et ouvertement scandaleux de l’industrie pharmaceutique (on ne parle plus de recherche mais d’industrie !) monopolisée par une poignée d’entreprises multinationales, devrait suffire à lui seul, par son caractère spécifique (la médecine devrait être, par essence, déontologiquement, au service d’autrui)
  2. et ses indéniables funestes conséquences sur la santé de centaines de milliers de personnes, à nous en convaincre (cf. texte sur l’euthanasie) …Que, cet état de fait perdure, bien que médiatiquement dénoncé, au grès des périodiques « affaires » qui viennent éclore à la surface de cette infâme « soupe industrielle », force à constater que cette dernière n’est jamais questionnée en tant que telle; l’on touche là une des particularités extrêmement perverse de ce système économique « libéral » qui autorise superficiellement la dénonciation de son amoralité afin de s’en servir comme caution démocratique.

Pourtant l’artifice, de plus en plus visible, ne suffit plus et force à s’interroger sur l’origine de notre impuissance collective à changer, à combattre des méfaits qui nous sont indubitablement révélés, mais auxquels nous nous accoutumons, jour après jour, à secouer le joug de notre soumission volontaire à une organisation sociale ostensiblement inique, absurde, indubitablement mortifère !

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Alors, pour tenter de répondre à cette essentielle question il faut donc s’enfoncer plus loin dans les fondements doxiques de notre perception du monde car, en fait, tout ce qui précède n’est qu’une description critique de la surface des choses, nécessaire mais insuffisante, inapte à proposer une voie vers de nouveaux paradigmes.
Il faut donc revenir aux sources de la connaissance et, réactivant les sagesses antiques, oser Philosopher…. Non pas comme aujourd’hui où cette activité, fossilisée comme spécificité universitaire, ne prétend plus, à quelques notables exceptions près, agir sur le réel. Mais, en sachant, qu’il s’agit d’embrasser tout le champ de la connaissance, de renouer avec La Physique (« qui concerne l’étude de la nature » du latin physicus repris du grec phusikos donc astrophysique, biologie moléculaire, sociologie, histoire, psychologie, etc., etc.) ce qui n’implique en rien d’être un spécialiste de chaque matière mais simplement d’affirmer que La Connaissance ne peut être parcellaire et que son dépeçage en disciplines cloisonnées n’a, en définitive, pour objet que de privilégier son efficacité pratique (la technologie) tout en l’écartant définitivement de toute influence décisionnelle au sein des pouvoirs religieux, économique et politique. Le savant ou le sachant (celui qui sait) ne sera protégé, honoré et surtout financé que dans la mesure où il saura se maintenir (lui et ses « découvertes ») dans le champ d’action qui lui sera strictement assigné et dont tout manquement à cette règle ne pourra que lui être fatal… L’histoire regorge d’exemples !
Il faut donc à nouveau Philosopher avec l’insolente volonté, bien que l’infime espoir, que cet acte ultime de notre existence au monde, le seul, l’unique, en résonnance intime et consciente avec la structure originelle de notre être, puisse, s’il en est encore temps, esquisser les contours d’une humanité réunifiée à l’univers dont, sans conteste, elle émane et dont elle croit, si stupidement, s’être dissociée.
Or philosopher, n’est ce pas d’abord et avant tout penser ?
Alors commençons par réaffirmer cette apparente banalité : Penser c’est en premier lieu avoir conscience que l’on pense donc que l’on est ! Ce que l’on pourrait formuler également : Pour être il faut penser !

  1. Car, étonnamment, cet inévitable vertige philosophique semble totalement absent de la « modernité ». La doxa néolibérale a réussi en quelques décennies ce « prodige » d’éradiquer de la conscience collective (et ce, peut être définitivement !) cet auto- questionnement déroutant mais ô combien salutaire.
    Combien, parmi la génération d’éduqués que notre civilisation « produit » à foison, sont à même de penser… qu’ils pensent et que cela ne va pas de soi ? Combien, d’ailleurs, de leurs enseignants se sont, à ce propos, un jour eux mêmes interrogés ? Est-il possible d’apercevoir une femme ou un homme politique (excepté peut être Vincent Peillon puisqu’agrégé de Philosophie… Mais non, je rigole…!) qui soit suffisamment imprégné de ce truisme pour qu’il influe, ne serait ce qu’un instant, sur leurs comportements, voire, rêvons un peu, leurs décisions ? N’oublions bien sûr pas les « capitaines » de l’Industrie ou de la Finance, où tout autre « décideurs », « fers de lance » de notre « compétitivité », dont il est évident que le souci quotidien, essentiel et vital, est de s’interroger sur leur présence improbable sur cette terre comme poussières infinitésimales au sein d’un univers sans limite…. Et le plus difficile à admettre est que cette catastrophique lacune existentielle se trouve également là même où son envers devrait régner : Au sein même de ce que l’on nome, aujourd’hui, les sciences humaines.
    La capacité d’instrumentalisation du modèle productiviste capitaliste, non content d’asservir les sciences « dures » à ses seuls intérêts, tend à s’étendre également sans retenue et sans exception, à celles qu’il désigne d’ailleurs avec mépris comme les  « molles »! Bien sûr ce sont des domaines où il rencontre, fort heureusement, une bien plus forte résistance, ne serait ce que parce que le terme de « doxa » n’y est pas totalement inconnu, et que les soubresauts et les convulsions qui ont précédé son actuelle hégémonie y ont été analysés et ont laissé des traces tangibles et toujours consultables. Et puis, à l’inverse de l’avancée quasi linéaire du « progrès » technologique l’histoire humaine de la fin du XIXème puis du XXème siècle est tellement jonchée d’ignominies et de « cadavres » qu’il est parfois un peu difficile de faire passer le « message » d’une société enfin apaisée autour du bonheur consumériste. Pourtant, dans la vie réelle, le marketing publicitaire universalisé prolifère, et impose, pour la majorité des populations et avec un succès incontestable, la « croissance économique» comme unique voie de sortie de crise (alors qu’elle est de fait la principale responsable de cette dernière). Et, bien que ce soit du domaine de l’extravagant, de l’impensable, il faut bien reconnaitre que la relation de causalité directe entre ce que l’on nomme, faute de mieux, la « mondialisation économique » avec l’ensemble des atrocités qui ravagent et annihilent une part de plus en plus importante de l’humanité via le saccage, planifié et irréversible, d’une nature dont nous sommes totalement dépendants, ne fait pas l’unanimité parmi les acteurs (en principe pensants) du champ des « sciences humaines ». Bien au contraire un grand nombre trouve place, sans grands « états d’âme », dans cette organisation sociale délétère et participe à sa perpétuation en croyant mettre leur compétence au service de son amélioration ; et puis il y a ceux, plus ou moins lucides et cyniques, qui servent l’idéologie dominante et élaborent, jour après jour, son cadre conceptuel et alimentent le discours prépondérant par un flot incessant de rapports, d’analyses, expertises, commentaires, (faux) débats, etc. dont ils abreuvent les « décideurs » de tous ordres et, bien sûr, les mass médias. Ils manipulent les chiffres et les statistiques, « tordent » le langage, corrompent l’analyse, confisquent la vérité et organisent le discrédit de ceux qui osent les contester. Leur responsabilité collective dans notre (celle du peuple) impuissance à changer de paradigme est immense tant il est vrai qu’ils sont détenteurs de l’ensemble des connaissances qui devraient leur permettre, d’abord de se fédérer, puis de servir de contre-pouvoir en tant qu’incontestables détenteurs de vérités.

La prise de distance de soi qu’implique la réflexivité, intrinsèque à l’acte de penser, et en l’occurrence, de nos jours, sa cruelle absence m’apparait comme la cause essentielle de l’effondrement civilisationnel qui est en passe de nous anéantir. Il est vrai que notre incapacité collective à nous observer n’est pas un fait nouveau ; l’anthropologie (par exemple!) qui devrait être le champ d’exploration de notre condition humaine a toujours été, à quelques marginales exceptions près, enfermée dans le carcan anthropocentriste de la représentation primitive et mythique de notre place, historiquement élaborée, sur cette planète. Pourtant les méfaits de l’imbécillité ontologique d’une croyance qui attribue une origine divine à l’humanité et pollue l’ensemble des « Cultures » terrestres contemporaines devrait attester de l’abîme qui nous sépare de ce que pourrait être une civilisation émancipée ; les innommables barbaries, passées mais toujours bien présentes, commises au nom de Dieux par des communautés religieuses en conflit pour l’hégémonie de leur absurde crédo, continûment instrumentalisées par les luttes de pouvoirs politiques, devraient suffire à nous déciller. De plus, cet archaïque paradigme, a largement contribué à nous dissocier de nous-mêmes en nous extrayant artificiellement de l’animalité et par conséquence de la nature dont nous ne représentons pourtant qu’une simple particularité. On pourrait tenter de dire que nous nous sommes appropriés la conscience de nous même comme si elle était notre définition ontologique (le dualisme !) oubliant qu’elle n’est en réalité que le fruit d’un long parcours évolutif (aux dernières nouvelles entre 3 et 5 millions d’années ; apprécions la précision de nos connaissances!)14 et qu’il est aberrant, même ridicule, de penser qu’elle nous est consubstantielle.
Il est facile de constater que ces évidences, inhérentes à une intelligence moyenne et assises indispensables à toutes sciences humaines, ne font pourtant pas, de nos jours, consensus et ne sont bien sûr jamais enseignées comme telles. Pourtant les intellectuels humanistes du mouvement philosophique des lumières15 et ceux du milieu du XXème que l’on peut rattacher à l’existentialisme (athée)16 avaient ouvert des brèches que l’on a pu croire un instant irréversibles ; mais bien que ces véritables penseurs perdurent comme essentiels référents au sein d’une partie de l’élite universitaire (enfin du moins celle dite…. progressiste)et des classes sociales émancipées, il est facile de se rendre compte que leur influence s’arrête aux portes de ces milieux et qu’ils ne font en rien partie intégrée de la « Modernité ». Car la puissance étonnante de ce « non-concept » (pourtant d’une rare ineptie) autorise de « ringardiser » c'est-à-dire de définitivement disqualifier tout ce qui n’est pas reconnu comme tel par ceux qui prétendent en être les acteurs (tous domaines économiques, politiques et culturels confondus) et par là même en définissent les contours. Il leur est même ainsi, par exemple, possible de faire resurgir et de mettre en scène ces figures tutélaires par le biais d’extravagantes commémorations qui finissent de les ensevelir dans un passé révolu tout en évacuant insolemment la critique radicale que leurs œuvres portent sur notre organisation sociale ; encore récemment l’exposition Guy Debord à la BNF, ultime offense, par un enterrement de première classe, à une pensée qui pourtant, par essence, se voulait irrécupérable, et qui vilipendait avec rage justement ce qu’on lui a pourtant fait subir ici !
On pourrait d’ailleurs considérer ceci comme représentatif de l’infini capacité du système en place à absorber, digérer et dissoudre l’ensemble des productions humaines passées, présentes et futures qui tentent de le récuser. Et en écrivant ceci il me vient à la conscience que mon labeur d’écriture n’est peut être en fait qu’une tentative désespérée de résistance à ce processus d’ « effacement planifié »…. Tant il m’apparait que c’est là, un des essentiels verrous de notre aliénation, dont il faut prendre conscience pour pouvoir recommencer à espérer !
Pourtant, lorsque penser nous « élève » (et le terme mérite toute notre attention), il nous arrive d’accéder à un état de clairvoyance qui permet d’embrasser l’infinie complexité de notre univers et d’en saisir le schème directeur et ce qui indéfectiblement nous y relie. Ce phénomène (au choix ou tous ensemble) psychique, cérébral, intellectuel, émotionnel… me semble à placer au cœur de l’acte de penser et mériter que l’on s’y attarde un moment :

  1. Revenons à l’histoire récente de notre « progrès technologique » et ce que l’on nomme, de manière ridiculement prétentieuse au vu de la modestie des distances parcourues, la « conquête spatiale » afin de mettre en relief une de ces conséquences, à la fois peu connue et pourtant paradoxalement devenue banale et malheureusement, non signifiante : L’observation de notre « planète bleue » comme suspendue et totalement isolée dans la sépulcrale immensité du vide intersidéral.
    Depuis les années 70 la plupart des astronautes qui ont expérimenté cette vision (mais en fait bien plus que cela puisqu’ils étaient physiquement « en surplomb »!) rapportent que leur perception de l’univers, comme d’eux-mêmes, en a été définitivement bouleversée17. A l’écoute de leurs témoignages, tous similaires, cette prise de distance charnelle avec le milieu dont nous sommes issus et qui nous constitue semble avoir provoqué, pour la plupart d’entre eux, un trouble psychologique déterminant et irréversible. Sensation, si l’on ne sombre pas dans l’analogie avec celles mystico-religieuses ou sous influence de drogues hallucinatoires, que l’on peut qualifier assez simplement d’éveil de conscience. Car l’ensemble de ces êtres humains, tous (par sélection) d’une grand intelligence, n’étaient certainement pas « préparés » culturellement parlant à affronter le bouleversement psychique que ne peut manquer de provoquer cet « Overview Effect » (effet de surplomb/d’aperçu). Mais ne pourrait-on pas dire que, subitement et tout simplement, ils se sont mis à penser !? Car, somme toute, il ne s’agit là que du « transport » psychique déjà vécu par bon nombre de philosophes de référence; Pascal, soudainement conscient et perdu entre les deux infinis qui nous environnent, n’en est-il pas un exemple flagrant ?

Cette parenthèse permet deux constatations :

  1. L’accession au sommet de notre potentiel technologique ne fait que nous ramener aux questions essentielles de notre condition sans pour autant leurs apporter la moindre réponse. Tout ça pour ça !
  2. Et pire, une fois redescendu sur terre, ce qui pourrait, par contagion, provoquer un électrochoc civilisationnel, reste bien évidemment circonscrit à la communauté des spationautes, au mieux relayé médiatiquement comme un simple spectacle que l’avènement de Google Earth (depuis 2006) a définitivement banalisé.

Nous pouvons parfois accéder, individuellement, à quelques instants éphémères d’extrême lucidité qui ouvrent le champ de notre conscience mais l’ensemble des sciences humaines, dont ce devrait être pourtant l’objectif prioritaire, est actuellement impuissant à s’inscrire pleinement dans ce champ épistémologique, indispensable à notre évolution collective, voire, en l’état actuel, à notre simple survie. S’interroger sur cette stérilité nous force d’abord à définir un peu plus précisément et à unifier ce que recouvre cet « ensemble des sciences humaines »…Ne s’agit-il pas tout simplement de ce que le mot Philosophie signifie ?...Enfin, plutôt, devrait signifier ?   
Car, ce que l’on nomme aujourd’hui ainsi, n’est plus qu’une branche morte rejetée par la connaissance efficiente. Elle s’est momifiée autour de la simple étude et la célébration de quelques « grandes » figures immémoriales, dans leur grande majorité adoubées par les pouvoirs dominants de leurs époques respectives, dont le bien-fondé et la pertinence des raisonnements peuvent être souvent facilement perçus comme inversement proportionnels à la distance temporelle qui nous en sépare. Ne serait ce que parce que le contexte de leurs discours en délimite nécessairement les frontières à moins d’être convaincu18 qu’à questions ontologiques il ne peut y avoir que des réponses universelles et intemporelles. Et nous voilà bien de retour dans la croyance ….
Pourtant, philosopher consiste d’abord et assez banalement à (se) questionner, réfléchir sur le monde et l'existence humaine et parfois se risquer à émettre un avis, ce que, tout un chacun, doté d’un cerveau en bon état, fait assez couramment. Mais c’est aussi étymologiquement l’amour ou le goût de la connaissance, de l’habilité (manuelle ou intellectuelle) et la quête de la sagesse.
Depuis le Vème siècle avant l’ère chrétienne, « La Philosophie », cet arbre mythifié du savoir, mère de toutes les sciences pour certains, semble échapper miraculeusement à toute analyse critique des prémisses qui l’instaurent. La Grèce antique, où elle prend racines, de surcroit considérée comme le berceau de la Démocratie, jouit encore de nos jours d’une aura culturelle primordiale. Or, s’il est indispensable de se référer à certains Présocratiques (négligés, oubliés parfois même méprisés) qui s’émancipèrent des mythologies antérieures (à partir du milieu du VIIe siècle av. l’ère chrétienne) en substituant l’observation de la nature et la logique (astronomie, origine et reproduction de la vie, etc. tout, comme déjà dit, ce qu’ils nommaient « Physique ») à la transmission des fables et des légendes, il devrait être permis de penser, si c’était le cas, que ce qui suivit et fonde toujours notre culture contemporaine, ne fut qu’une réactualisation savante de la théogonie antérieure par eux contestée ; en réalité un formidable outil contre-révolutionnaire que Platon érigeât à l’encontre des progressistes précités. Car la pensée Platonicienne, qui théorise l’Idéalisme impliquant le Dualisme, entérine ainsi la prédominance de l’esprit sur la réalité et le dissocie de son enveloppe charnelle. Et cela revient (il est étonnant que tout vrai philosophe ne s’en indigne pas !) à déclarer l’immatérialité de l’esprit donc, à rouvrir la porte à une conception mystique du vivant et finalement tout bêtement, à croire à nouveau en Dieu. Alors comment admettre et comprendre que cette figure tutélaire demeure incontestable et que son influence théosophique réactionnaire se perpétue en toute légitimité ? Comment admettre, ayant appris d’eux que philosopher consiste d'emblée à rejeter tout divin de l’explication du monde, qu’après Leucippe, Démocrite, Epicure, Lucrèce,… la philosophie Platonicienne ait pu faire le lit de la pire théologie que l’humanité ait eu à subir et qu’elle endure encore : Le christianisme ?

  1. Mais reportons nous à la fameuse « question Socratique » qui semble offrir un éclairage intéressant à ce questionnement. Il est établi qu’il ne subsiste de Socrate aucun écrit ; mieux encore l’authenticité du « Socrate historique » (comme ils disent) s’avère contestable et l’hypothèse qu’il soit un personnage créé de toutes pièces par Platon est, in fine, tout aussi défendable que celle de son existence réelle. Ce qui est, par contre indéniable, c’est que Platon a construit autour de cette figure (vraie ou fausse) le mythe du Philosophe et que le mot « Socrate » est à la source de toute la philosophie occidentale. Ecoutons la phrase introductive de l’article le concernant, consultable en ligne sur la Bibliothèque Universalis (Ressource documentaire pour l’enseignement)19 :
    1. « Socrate n'est pas un philosophe parmi les autres ; il est le totem de la philosophie occidentale. En chaque pensée qui s'éveille et s'interroge, il revit ; en chaque pensée qu'on humilie ou qu'on étouffe, il meurt à neuf. La place exceptionnelle qu'il tient dans notre culture est celle du héros fondateur, du père originaire, qui s'enveloppe dans une obscurité sacrée, et que chacun porte en soi comme une présence familière. Il appartient inséparablement à l'histoire et au mythe de l'esprit. Nous ne connaissons avec certitude presque aucune de ses pensées, et nous le reconnaîtrions dans la rue » (sic !

    Sans vouloir accabler Mr Jacques Brunschwig20 (il se trouve simplement que son article ouvre la section « Socrate » dans cette Encyclopédie Universitaire et révèle donc ainsi les fondements doxiques de la philosophie…) la phrase qui précède est un monument d’allégeance aux dominants et à la pensée du même nom, donc en radicale opposition avec celle, présocratique, citée plus haut (je répète : « …qui substitua l’observation de la nature et la logique à la transmission des fables et des légendes ! »).On nous parle ici de « Totem de la philosophie occidentale», de « héros fondateur, du père originaire, qui s'enveloppe dans une obscurité sacrée » qui «appartient inséparablement à l'histoire et au mythe de l'esprit ». Voici donc un homme, dont on ne sait à peu près rien, qui n’a jamais rien écrit, que Platon, dans, il est vrai, un remarquable travail littéraire qui fera date21, mythifie (et on connait sa propension à créer des légendes : Celle de l’Atlantide par exemple …) en même temps qu’il l’utilise comme mentor et caution, dont, finalement, l’existence est tout à fait improbable et qui pourtant, 25 siècles plus tard, continue à être considéré, par l’élite intellectuelle en général et la grande majorité des Philosophes patentés, comme le fondateur de leur discipline.  Pourtant observant tout ceci avec un peu de recul et pris soudain d’un violent, mais peut être salutaire vertige (à moins que ce ne soit d’un irrépressible fou rire…), comment ne pas reconnaitre en ce personnage « La figure christique » de « La philosophie » ? Et éviter de penser que nous sommes là, pour le moins, en face d’une bien savoureuse contradiction? Les conséquences qu’entrainerait la mise à nu d’une telle fêlure dans les fondations même de l’édifice sont telles que l’on comprend aisément qu’il est totalement impossible pour un intellectuel en place de s’y aventurer sans être accusé d’ « hérésie » et d’ y risquer sa réputation

L’embarrassant, et cela nous ramène à l’axe de mon propos, serait donc que la philosophie occidentale serait fondée sur une croyance, qui de surcroit, ne pourrait pas être questionnée. Ce qui la discrédite au regard même de l’histoire étymologique de son propre nom ! Lorsque Mr Brunschwig relie, en toute arrogante primauté, l’ensemble des pratiques philosophiques contemporaines à Socrate (mais en réalité apparemment au seul Platon), tout en oubliant (délibérément ?) tous ceux qui le précèdent, il révèle, impudemment, l’assujettissement de la pensée occidentale à l’Idéalisme Platonicien et par la même son allégeance au Christianisme, ce que Nietzsche, en son temps, dénonça ainsi:

  1. « [Platon] a dévié tous les instincts fondamentaux des Hellènes, je le trouve si imprégné de morale, si chrétien avant la lettre [...] je suis tenté d'employer à l'égard de tout le phénomène Platon, plutôt que tout autre épithète, celle de "haute fumisterie" ou, si l'on préfère d'idéalisme. »,

et encore,

  1. « Platon est cette fascination à double sens appelée « idéal » qui permit aux natures nobles de l’antiquité de se méprendre elles-mêmes et d’aborder le pont qui mène à la « croix ». » Le crépuscule des Idoles / Ce que je dois aux anciens

Parallèlement et se superposant, l’avènement des Sophistes, Cyniques, Hédonistes, Atomistes, etc. toutes écoles aux contenus théoriques complexes, contradictoires et concurrentiels en réalité, toutes constituantes de celui de la Philosophie, démontrent la grande diversité de cette période historique dite fondatrice. Il est vrai que s’aventurer à démêler le foisonnement intellectuel de cette période relève plus de l’archéologie que de la science historique, tant ce qui nous en est parvenu est sommaire, fragmentaire, lacunaire et presque toujours sujet à interprétation, voire à caution. Pourtant, au regard de ce que montre (et démontre) brillamment Michel Onfray dans le volume 1 de sa « Contre-histoire de la philosophie » (Les sagesses antiques) les cinq siècles qui précèdent la sibylline naissance d’un être hybride mi-dieu, mi-humain (fruit supposé des entrailles d’une vierge, fondateur d’une banale secte puis trahi, martyrisé, supplicié et fugacement ressuscité) recèlent un aréopage de penseurs brillants22, iconoclastes et logiques, tous en opposition radicale avec le Platonisme, dont nous ne pouvons, avec le recul, que regretter amèrement la relégation dans les poubelles de notre culture dominante. Que seule, triomphante, la Pensée Platonicienne en ait émergé, atteste bien plus du potentiel hégémonique de son auteur (son inlassable volonté paradoxale à faire trace !) que de son intrinsèque validité. L’historiographie de la philosophie, par essence conservatrice et dogmatique, relayé par celle du catholicisme puisant sans réserve dans ce corpus idéologique extatique et suranné, a fait le reste et continue, tout naturellement, encore de nos jours à perpétuer le mythe.
D’autre part, n’oublions pas que la parole, le discours, la conversation, l’enseignement oral, etc. furent prééminents, voire seuls admis23 dans la tradition philosophique Grecque même s’il est assez savoureux et éminemment paradoxal de constater que, bien évidemment, tout ce que nous en savons vient des rouleaux de papyrus qu’elle nous a laissés (on peut, à l’occasion, s’interroger sur la motivation de Platon à nous transmettre une critique écrite de sa méfiance et de son mépris pour tout enseignement philosophique….écrit !?). L’oralité fut donc le seul vecteur reconnu et validé de la pratique philosophique de ce temps et la formation à l’ « Art Rhétorique », termes polysémiques s’il en fut24, le parcours obligé à tout postulant Philosophe et/ou Savant. Ainsi vit-on naitre, la toute première intelligentsia, composée de ceux, toutes « écoles » confondues, qui apprenaient et excellaient dans l’art de manier le langage afin d’être considérés ou de s’ériger eux-mêmes en « sages » (via des discours publics, écrits, écoles, polémiques, etc.) et, pour un grand nombre, à en retirer, bien sûr, les honneurs et les subsides subséquents. Ce dont Platon, toujours lui, ne se priva bien sûr pas, décrétant même l’existence d’une bonne Rhétorique (la sienne) en opposition à une mauvaise, celle tout particulièrement des Sophistes et autres Matérialistes / Atomistes dont il fut l’illustre et redoutable ennemi. Cette pratique foncièrement élitiste n’était, en réalité, que le prolongement, parfaitement naturel, d’une civilisation fondée sur l’esclavagisme, la ségrégation et le patriarcat, ce qui à 25 siècles de distance, ne semble, aujourd’hui, susciter aucune violente désapprobation.
Cette usurpation progressive par une caste d’intellectuels (souvent « bien nés ») de la pratique philosophique à laquelle l’ensemble du peuple était à l’origine théoriquement convié et qui, se perpétuant jusqu’à nos jours, entérine l’idée que seule, la partie mâle, nantie, et « éclairée » de l’humanité, est apte et digne de penser, explique, sans doute et pour une grande part, notre incapacité collective à nous comprendre et notre endémique inaptitude à édifier une société égalitaire d’individus libres et solidaires.
Car, aujourd’hui, il est toujours malvenu, voire politiquement suicidaire de questionner et mettre à jour les conservatismes culturels dont toutes ces grandes figures étaient d’évidence tributaires et qu’elles ne pouvaient manquer (inconsciemment..) de perpétuer. L’histoire de la philosophie antique s’exempte de toute contextualisation et ne s’attache qu’aux textes et aux idées qu’ils véhiculent comme si ces dernières pouvaient être intemporelles voire découplées de leurs auteurs. Ainsi, par delà le Platonisme mythifié et l’envisageable mystification Aristocratique, c’est de l’essence même de l’acte de philosopher qu’il s’agit et de son indéniable soumission à un modèle de pensée, somme toute, fondamentalement théologique et conformiste. Car enfin que voyons-nous, toujours à l’œuvre et désignée comme fondatrice référence, devant notre regard dessillé?

  1. D’abord une conception et une affirmation d’un monde des Idées et des Formes immuable, éternel et préexistant à celui des vivants que seule l’âme, découplée du corps, de ses besoins et désirs, serait susceptible de rencontrer. Ecoutons Socrate/Platon, dans Le Phédon nous l’expliquer, sans détour: « Quel est le but du philosophe? Se détacher du corps autant que possible; car les distractions que donne le corps gênent l’âme dans sa poursuite de la vérité. Pourvoir le bon en soi, le beau en soi et toutes les essences, le corps est un obstacle; on ne les saisit qu’avec la pensée seule et toute pure, en sorte qu’il faut attendre la mort pour que l’âme, séparée de lui, puisse atteindre pleinement la vérité. Le philosophe aurait donc tort de craindre la mort, après s’être exercé toute sa vie à s’abstraire de son corps, c’est-à-dire en somme après s’être exercé à mourir». Est-il encore utile de poursuivre la démonstration ? Tout est dit ! La vérité, la Connaissance, en fait la « Vrai réalité » est préexistante à toute incarnation. N’est ce pas là l’unique et banale définition du Divin !? D’ailleurs, de ce fait Penser n’a plus aucun sens et dès lors, assez comiquement, Philosopher non plus puisque le Savoir n’est accessible qu’en laissant, en notre âme, émerger sa mémoire enfouie (La Réminiscence) ou, encore de manière plus radicale et définitive, en mourant ! Alors, franchement, à quoi bon réfléchir ?
    Puis la description, d’une société où certains « hommes » et non pas l’humanité (puisqu’en sont exclus par principe les femmes et les esclaves !) s’arrogent le pouvoir d’être ceux qui pensent, débattent entre eux de la validité de leurs arguments, inventent même un système politique (la démocratie) qui leur garantit, en interne, leur liberté d’expression, limitant ainsi la violence de leurs luttes de pouvoir, puis en garantissent la pérennité en s’autoproduisant comme mythes fondateurs et créant les écoles du savoir des siècles à venir. Quelle magnifique réussite ! Et ne reconnaissons nous pas, dans cette description, celle de notre société actuelle fondée sur un modèle patriarcal, sexiste, discriminatoire et conservateur pour ne pas dire réactionnaire! Ah j’oubliais, élitiste et bien sûr condescendant….Et ce, donc, depuis plus de deux mille ans …

Il faudrait l’admettre, et ce n’est pas pour demain, les présupposés, postulats, principes et autres idées communes qui fondent le corpus idéologique dont nous sommes, toujours aujourd’hui et la plupart du temps à notre insu, imprégnés trouvent leur source dans cette victoire usurpée de l’idéalisme et du dualisme conservateur sur le matérialisme et la physique libertaire.
Rendre Platon seul responsable de ce consternant état de fait accréditerait l’idée reçue mais fort contestable de la puissance d’un seul individu à transformer le monde. Or on ne doit la prééminence de sa doctrine, extrêmement controversée de son temps, qu’à la calamiteuse soumission d’un Etat Romain corrompu et en pleine déliquescence au catholicisme naissant, pensant ainsi (stupidement !) endiguer l’inéluctable démantèlement de son empire….Et à la nécessité, pour les thuriféraires prosélytes de cette improbable et fragile religion, d’adosser leur théogonie aux philosophes Platoniciens concomitants. Au vu de leur succès, un coup de génie…. !
Il est vrai que l’ « incarnation » divine ou séculaire de la sagesse, depuis sans doute la sédentarisation de l’humanité, s’est avérée, sans conteste, comme la plus efficace stratégie d’accès et de maintien au pouvoir. Tant il est indispensable pour dominer autrui de s’attribuer (et encore mieux de se voir attribuer) des caractéristiques surhumaines (quelles qu’elles soient !) qui vous dissocie et distingue indéfectiblement du commun….
Alors ne serait-il pas salutaire, enfin et une bonne fois pour toutes, en commençant, bien sûr, par Socrate /Platon de « tuer les pères »? Non pas tous les géniteurs, dont l’humanité semble encore avoir besoin pour se perpétuer, mais leur fonction symbolique et mythologique, ubique étouffoir de tout véritable changement de paradigme. L’idée reçue que de « Grands Hommes », puissent soudainement surgir dans l’« Histoire » et changer positivement son cours ne résiste jamais à une analyse sérieuse du contexte sociologique et des enjeux économico-politiques et géostratégiques de leurs temps. Napoléon, Hitler, Staline, De gaulle, Churchill ou Mandela (etc.) ne font pas l’Histoire ! Au mieux ils l’accompagnent et la plupart du temps, malheureusement, l’annexent au profit de leurs personnelles et funestes ambitions. De nos jours, en mars 2014, Poutine ne nous en offre t-il pas une époustouflante démonstration….
Même le domaine de la connaissance (celui qui nous intéresse en tout premier lieu ici) s’est retrouvé progressivement enseveli sous le mythe du génie, arrogante proclamation de notre humaine supériorité et miroir complaisant de notre intelligence passée et à venir.
Pourtant ce qui caractérise, avant tout, celui que l’on nomme ainsi, c’est sa toute particulière aptitude à se constituer comme réceptacle synthétique des connaissances ambiantes de son temps. Toutes les grandes découvertes qui ont marqué l’histoire des sciences ne sont que la résultante ponctuelle et incarnée d’un champ de forces que l’on pourrait nommer sommairement « culturelles ». Quelle que soit l’intelligence de celui que l’histoire a retenu, ou retiendra, ce n’est, qu’immergé dans le bain osmotique de celle de son époque, qu’une « idée nouvelle » a pu naître en lui….
A contrario considérer un humain comme un « génie » revient à lui attribuer des pouvoirs surnaturels ce que l’étymologie révèle promptement : « Génie emprunté au latin génius, désigne d’abord une divinité génératrice qui préside à la naissance de qqn, puis la divinité tutélaire de chaque individu avec laquelle celui-ci se confond ». Ainsi, qualifier les « esprits supérieurs » de génies, les extrait d’abord du commun des mortels mais de plus, et cela m’apparait bien plus grave et pernicieux, renvoit l’origine de la connaissance au divin. Le terme prouve en lui-même le processus de mythification à l’œuvre et discrédite sans appel le savoir ainsi propagé, puisque ce dernier ne peut plus être évalué en soi mais se fossilise en tant qu’élément de légende, de dogme, de catéchisme, d’irréfutable théorie dont toute critique, même fondée, s’apparente à un crime de lèse-majesté. Seul notre besoin ontologique de figures rassurantes et paternelles, artificiellement entretenu par ceux à qui cela profite, perpétue et pérennise une conception aussi peu réfléchie de l’histoire humaine.
C’est bien l’utilisation mythifiée de la figure Platon/Socrate qui est en cause et non ses écrits (réels ou supposés) qui, lorsqu’ils sont passés au crible d’une analyse critique lucide (débarrassée de tout arrière fond judéo-chrétien) apparaissent juste pour ce qu’ils sont : Une pure vision moraliste et théologique de l’univers, déniant à la science, et en particulier à la physique, toute capacité à comprendre la nature des choses, rejetant dans l’au-delà, dans les limbes toute prétention à la vérité de notre condition.
Ce moment de la pensée n’est pas fondateur mais simplement charnière ! Et c’est l’histoire, la mise en place du pouvoir dominant qui lui succède, qui l’instaure comme tel, comme référence idéologique de son bienfondé. C’est un verrou, la fossilisation achevée d’une effervescence intellectuelle qui dura près de cinq siècles, dont le caractère subversif et iconoclaste ne pouvait manquer de saper l’ordre établi et de susciter l’adversité acharnée de ses bénéficiaires. Rappelons-nous que Platon ignora l’existence de Démocrite (son contemporain) dans l’ensemble de ses écrits alors qu’ils peuvent être lus et vus comme une réfutation systématique des thèses de ce philosophe honni… et envisagea même de faire brûler l’ensemble de ses écrits pour n’y renoncer, finalement convaincu de l’impraticabilité de la tâche (mais, semble-t-il, pas de son ignominie !), que du fait de la notoriété de leur auteur et donc de l’abondance des éditions. Ce que par contre l’hégémonie sanguinaire chrétienne des siècles qui suivirent, confrontée à la moindre contestation de ses dogmes, sut parfaitement mettre en œuvre et, sans coup férir, mener à « bien », ne se contentant pas de brûler les œuvres mais également, directement et sur la place publique, leurs auteurs !
Alors revenons, puisque le véritable intérêt s’y trouve, sur le contenu fécond de cette pensée défaite et aujourd’hui dramatiquement oubliée. Lorsque l’on s’y attarde, un tant soit peu, qu’on la dépoussière et, surtout, que l’on se délivre du préjugé de consulter un appareillage théorique archaïque et suranné, on ne peut qu’être saisi par la clairvoyance, la pertinence et la liberté de ces intelligences observant la nature du monde et d’eux-mêmes (l’univers), il y a quelques 2500 ans, avec uniquement leurs cinq sens pour instruments de connaissance. Et tout d’abord, ce qui fascine et nous apostrophe, c’est l’affirmation, aujourd’hui perdue, que le savoir est indivisible, que la philosophie se doit d’embrasser toutes les disciplines : Les mathématiques, l’astronomie, la médecine, l’histoire, la politique, l’éthique, le langage et la rhétorique, en définitive tout ce qui fait sens…et tout particulièrement la physique pour les Atomistes, au point que pour eux l’une et l’autre sont indistinctes 25. En fait ces derniers, dont il ne nous reste aujourd’hui que quelques figures et rares écrits épargnés et qui ont dû, en réalité, se compter par dizaines, constituent le cœur lumineux et rayonnant de la toute première approche matérialiste de notre compréhension de l’univers. Une sorte de parenthèse enchantée pour une humanité jusqu’alors soumise aux croyances de tout ordre et donc à ceux qui savaient (et savent toujours) les utiliser pour édifier leur pouvoir.26 Une question cruciale semble les obséder : Quelle est l’origine du mouvement ? Ou, dit autrement : Si ce n’est Dieu qu’est ce qui agit la matière? Ou finalement : Derrière les apparences qu’elle est la substance de la réalité ?
Leucippe, ou en tout cas son supposé disciple Démocrite répondra :
Le vide, les atomes et le mouvement! La matière fondamentale en mouvement dans le rien et en dehors de la matière rien n’existe!
Quelle fantastique intuition ! Elle proviendrait, bien sûr au conditionnel, de l’observation (qui nous est toujours fort commune) par Leucite de l’agitation d’innombrables particules de poussières dans un rai de lumière.
Encore leur faut-il tenter d’expliquer l’émergence des formes et leur plasticité, le continu et le discontinu, l’identique et le différent….Un texte attribué à Diogène d'Apollonie, penseur de la même époque, nous dit ceci :

  1. « En somme, mon hypothèse est que toutes choses qui existent sont des modifications de la même chose. C'est évident ; car si les choses qui existent aujourd'hui dans l'univers - terre, eau, air, feu, et toutes les autres choses qui sont visibles dans l'univers - si l'une d'entre elles était différente d'une autre, c'est-à-dire différente dans sa nature même, et non la même chose changée et transformée de multiples façons, elles ne pourraient se mélanger les unes aux autres, ni s'altérer les unes les autres, que ce soit en bien ou en mal. Et les plantes ne pourraient pousser de la terre, ni aucun animal ou quoi que ce soit d'autre, venir à l'existence, s'ils n'étaient pas faits de façon à être la même chose. Mais en vérité toutes ces choses sont des variations de la même chose : elles deviennent différentes à différents moments pour redevenir ensuite la même chose. »

Cette évidence a la saveur de la perfection !
Mais alors comment s’opèrent ces passages d’une forme à l’autre tout en préservant le flux, infiniment lisse et continu du réel ? Comment la terre, l’eau, l’air et le feu existent-ils, à la fois dissociés et communs. Je ne saurais le dire mieux qu’Antoine Danchin dans son court mais essentiel texte sur les Atomistes accessible en ligne ici :

  1. « L'émergence progressive des formes proviendrait [dans ce cas] de la combinatoire infinie des atomes élémentaires. Ceux-ci, rangés dans plusieurs catégories, en fonction de leurs propriétés d'animation, et de leur aptitude à interagir, sont mus par le principe d'inertie: ils poursuivent leur chemin initial tant qu’ils ne rencontrent pas un autre atome. Au cours de la rencontre ils peuvent "rebondir" et prendre chacun une nouvelle route, ou s'accrocher en agrégats tourbillonnants. ».

Apparait ainsi l’idée d’un mouvement permanent et infini, consubstantiel à l’espace et au temps, de particules élémentaires, dont, de ci de là, l’inévitable télescopage (ou influences réciproques) pourrait engendrer des formes dans une infinie variété. Et ici point de hasard, qui n’est de fait pas une notion grecque, ni de nécessité qui pourrait laisser croire à la révélation de forme préexistantes, (issues d’ailleurs d’on ne sait où ?) mais une architecture contrainte par les principes intangibles qui régissent chacune de ces particules élémentaires.
Voilà ce que le Platonisme a supplanté et renvoyé dans les oubliettes de l’histoire des sciences livrant au catholicisme naissant un terrain net et balisé propre à promouvoir et instituer sa souveraineté à venir. Et l’obscurantisme meurtrier qui s’en suivi va durer plus de 2000 ans…..
Suivront bien sûr Aristote, Pascal, Descartes et Malebranche, Kant puis Hegel qui se partageront la lourde responsabilité de perpétuer et d’ « enrichir » ce discours d(t)oxique ce dont l’enseignement universitaire institutionnel ne manquera pas de leur rendre grâce en les plaçant en tête de ses plus grandes figures tutélaires.  
Il faudra attendre le XVIème siècle pour voir réapparaitre, au risque de bruler vif, quelques tentatives scientifiques de retour à l’essence matérielle du monde. Pour aller vite car mon propos n’est pas ici de faire l’histoire de la répression de l’intelligence par l’église catholique, citons seulement Giordano Bruno27 qui finira sur le bûcher et Galilée, bien sûr, suspect d'hérésie et forcé d’abjurer sa croyance que la terre n’est pas au centre du monde.     
Mais à partir de ce moment là le pouvoir théologique va avoir fort à faire pour continuer d’endiguer cette autre ou nouvelle « Philosophie naturelle », jusque là établie sous l’inébranlable autorité scholastique, et qui nait et prolifère avec ces raisonneurs iconoclastes « printaniers ».
D’autant que ce XVIème siècle voit venir la fin de l’unité chrétienne occidentale et débarquer Luther, Calvin, Henri VIII avec le bien nommé « Protestantisme »….Bien qu’avec le recul, il faille ici préciser que ce schisme, qui semblait annoncer la défaite générale du christianisme, lui sera pourtant finalement salutaire, d’ailleurs Nietzche ne s’y est pas trompé :

  1. « Les Allemands ont fait perdre à l’Europe la moisson de la dernière grande époque, l’époque de la renaissance, à un moment où un ordre supérieur des valeurs où les valeurs nobles, qui affirment la vie, qui garantissent l’avenir, étaient parvenues à la victoire au siège des valeurs contraires, des valeurs de décadence – et jusque dans les instincts de ceux qui y siégeaient !  Luther, ce moine fatal, a rétabli l’église, et, ce qui est mille fois pire, le christianisme, au moment où il succombait…» (Nietzche « Ecce homo »)

Mais pourtant, en ce début du XVIIIème siècle, un coup fatal semble à même de terrasser la théologie. « Newton et Locke font un tabac ! »

  1. [Il est temps, ici et à l’occasion de cette citation cavalière mais savoureuse, d’ouvrir une parenthèse, pour vous parler de son auteur au nom impossible à retenir (d’ailleurs non-retenu), Georges Miedzianagora (1930-2003. Docteur en droit et en philosophie, professeur de philosophie à l'ULB, de 1960 à 1974, puis recteur de l'École Élisée). De fait, les pages à venir s’inspirent, pour l’essentiel, de la lecture de son livre (saisissant et éhontément méconnu !) : « Les dieux post-modernes  / Manifeste pour la transparence de la science» aux Edition Complexe 1992. Il y dénonce la captation puis l’annihilation des axiomes de la physique par la théologie protestante qui va lui permettre de récupérer « le monopole du discours sur lé réel » puis il y expose, réunifiant physique et philosophie, un nouveau modèle de compréhension en ligne directe avec la pensée présocratique qui démontre l’impensé de la mécanique quantique et propose enfin une vision cohérente et logique de l’infrastructure de notre réalité. Sans cette lucidité, je n’aurais déjà certainement pas pu m’aventurer aussi loin dans mes réflexions et ce qui suit (qui peut être vu comme une simple fiche de lecture) ne fait que tenter de la faire partager. Alors si mon modeste travail contribue simplement à lui procurer quelques nouveaux lecteurs je pense qu’il s’en trouvera, par là même, totalement justifié.]

Alors ce « tabac » comme dit Georges Miedzianagora, s’il affola les théologiens catholiques qui s’empressèrent d’interdire ses auteurs provoqua bien moins d’émois chez les protestants, par essence plus enclins à l’argumentation qu’à l’application des dogmes, et qui, stratégiquement, décidèrent de discuter la philosophie nouvelle et de réfuter ses prétentions blasphématoires.
C’est cette bifurcation que Miedzianagora met en exergue et désigne comme origine du subtil mais efficace combat que mena cette théocratie pour préserver son pouvoir, qui, de son point de vue, triomphe, aujourd’hui sans conteste :

  1. « La victoire théologique est totale ! La physique et la philosophie se tiennent sur les positions que la théologie leur a réservées. [Elles] ont été remises à la place de servante que la théologie leur avait depuis toujours assignées. »

Au milieu du XVIème siècle des avancées majeures de la réflexion (ré) ouvrent une brèche dans le corpus Platonicien de l’hégémonie théocratique et vont s’incarner dans les deux personnages précités : Isaac Newton et John Locke.
Le premier philosophe, mathématicien, physicien, alchimiste, astronome et (à ne pas oublier) théologien. Son ouvrage « Philosophiæ Naturalis Principia Mathematica » écrit en 1686, décrit la loi universelle de la gravitation, formule les trois lois universelles du mouvement et jette les bases de la mécanique classique. Il a aussi effectué des recherches dans les domaines de la théologie et l'alchimie. C’est un pur phénoménologiste :

  1. « Tout ce qui n'est pas déduit des phénomènes, il faut l'appeler hypothèse ; et les hypothèses, qu'elles soient métaphysiques ou physiques, qu'elles concernent les qualités occultes ou qu'elles soient mécaniques, n'ont pas leur place dans la philosophie expérimentale. ».

Et il n’est d’un quelconque danger pour l’église, bien au contraire ; d’abord parce qu’il se considère comme « un élu de Dieu pour comprendre le message biblique »… Il a consacré plus de temps à l'étude des Écritures qu'à celle de la science, et a déclaré « j'ai une croyance totale dans la Bible comme Parole de Dieu, écrite par ceux qu’il a inspirés. Je l’étudie tous les jours. ».
Ce qui est parfaitement clair lorsqu’il parle de ses théories :

  1. La gravité explique les mouvements des planètes, mais elle ne peut pas expliquer qui a mis les planètes en mouvement. C’est Dieu qui régit toutes les choses et qui sait tout ce qui existe ou peut exister. »

Et puis :

  1. « Ce magnifique système du soleil, des planètes et des comètes n’a pu procéder que de la volonté et de la puissance d’un Être intelligent… Cet être régit toutes choses, et non comme une sorte d’âme du monde, mais comme un maître au-dessus de tout ; et c’est à cause de son pouvoir qu’il veut qu’on l’appelle « Seigneur Dieu ou « Celui qui règle tout »... Le Dieu suprême est un Être éternel, infini, parfait en tout point. »

Et pour finir :

  1. « L'opposition à la religion s’appelle athéisme quand on la professe et idolâtrie quand on la pratique. L'athéisme est tellement insensé et tellement odieux à l'humanité qu'il n'y a jamais eu beaucoup de gens pour l’enseigner. »

Etonnant, non ! Il ne sera donc pas inquiété !
Mais pour l’Autorité c’est un peu plus délicat avec Locke: Il n’est que philosophe (Anglais), considéré comme un des précurseurs des Lumières. Sa théorie de la connaissance fut qualifiée d'empiriste car il considérait que l'expérience est l'origine de la connaissance. On s’éloigne de l’étude du seul phénomène….
Par sa théorie des idées simples, il distingue deux états possibles du réel : Il y aurait des qualités premières, que nous ne pouvons séparer des corps : par exemple, la solidité, le mouvement, etc. Ces qualités seraient intrinsèques à la matière. Et puis les qualités secondes qu’il définit comme les sensations que les corps produisent en nous : la chaleur, la couleur, etc. Nous les percevons directement et il les nomme les sentiments. Ces qualités ne seraient pas réellement dans les corps, et varient bien sûr suivant la capacité et la portée de nos sens. Il affirme ainsi que sans un corps pour les percevoir, la chaleur, la douleur, etc. n’ont pas de réalité objective bien que notre jugement et notre existence même nous prouve le contraire. Il est vrai que ce n’est pas la première fois que nos sens nous trompent (le soleil autour de la terre pour simple exemple…).Et enfin Locke attribue une troisième qualité aux corps : Ils peuvent se modifier mutuellement (voire intérieurement) et ainsi altérer la perception que nous en avons (le feu transforme la matière…et cette dernière peut produire du feu).
Il réintroduit l’idée d’une matière tangible, réceptacle d’une réalité qui lui est propre, tout en continuant à attribuer à l’esprit et au corps celle de notre perception. Le Dualisme est préservé mais la théocratie, à juste titre se sent menacée est, brutalement, réplique.
Les catholiques re-brandissent (sans grand effet) l’Hérésie mais les protestants, plus subtils, vont s’efforcer de pervertir la pensée de Locke, tout particulièrement grâce à l'évêque George Berkeley.
Il a 25 ans lorsqu’il publie en 1710 les Principes de la connaissance humaine et affirme que :
Les idées n’existent pas en dehors d’un esprit qui les perçoit. « Esse est percipi » (être, c’est être perçu). C’est là une « vérité intuitive » (superbe, non !?) : Quand je dis qu’un objet existe, je dis que je le sens, que je le vois, ou qu’il est perçu par un autre esprit. Mais quant à concevoir une existence absolue, c’est impossible :

  1. « [...] considérons les qualités sensibles que sont la couleur, la forme, le mouvement, l'odeur, le goût, etc. c'est-à-dire les idées perçues par les sens. Il est manifestement contradictoire qu'une idée puisse exister dans une chose non-percevante; car c'est tout un que d'avoir une idée ou de la percevoir. Par conséquent, pour exister, une couleur, une forme, etc. doit être perçue. Il suit de là clairement qu'il ne peut y avoir de substance ou de substrat non pensant de ces idées. »

Il « efface » la matière en la redéfinissant comme seule perception que l’esprit s’en fait. Ce qui n’est possible qu’en considérant que ce dernier n’est pas matière, ce qu’en fait, la faiblesse théorique de Locke, lui permet. A distance, il est quand même surprenant qu’un tel ramassis d’inepties (bien que jugé ridicule, par beaucoup, de son temps), ait pu s’inscrire et faire référence dans l’histoire de la pensée au point d’être discuté par Kant (ce qui ne grandit pas beaucoup ce dernier!). La logique ne lui sert qu’à combattre tout ce qui contredit, de fait, ses croyances. Il ne peut exister d’autre réalité que celle que l’esprit perçoit ce qui lui permet d’écrire en toute certitude :

  1. « Il n’y a donc pas de matière : quand on dit que la matière existe en dehors de soi, on commet un abus de langage. Nous ne percevons que des idées, et nous ne pouvons rien concevoir hormis elles. À quoi, dès lors, la matière pourrait-elle ressembler ? »

Et :

  1. « … quel grand ami la substance matérielle a été pour les athées à toutes les époques, il serait inutile de le rapporter. Tous leurs monstrueux systèmes ont à son égard une dépendance si visible et nécessaire que lorsque cette pierre de voûte est retirée, tout l’édifice ne peut faire d’autre choix que de s’effondrer. »

Que serait donc le catholicisme sans la preuve historique de l’existence de Dieu et du Christ ?
Et comme si cela ne suffisait pas, ses prises de positions « politiques» enveloppent le personnage d’un parfum fort nauséabond :

  1. « Les maîtres ont intérêt à avoir des esclaves, qui obéissent en toutes choses à leurs maîtres selon la chair, non pas seulement sous leurs yeux, comme pour plaire aux hommes, mais avec simplicité de cœur, dans la crainte du Seigneur. La liberté de l'Évangile est compatible avec la servitude terrestre, et les esclaves ne pourront que devenir de meilleurs esclaves en devenant chrétiens » (sic !)

Mais il sert (ô combien) la stratégie des théologiens protestants ce qui explique, sans peine, ses appuis et son succès: Eux seuls parlent souverainement du réel ! Aux physiciens et autres scientifiques ou/et tenants de la Philosophie Nouvelle la description des qualités secondes soit en l’occurrence les mouvements des corps ; Galilée, Hobbes, Descartes et Newton décrivent les propriétés des objets et des astres dans leurs mouvements ou/et au repos mais laissent tranquillement au pouvoir divin les forces qui les agissent.
Ce que Georges Miedzianagora résume parfaitement ainsi :

  1. « Tout ce que pourront dire les philosophes [naturalistes] sera (et ne sera que) propos sur les qualités secondes. Ils auront beau,.., déclarer que ces qualités secondes sont en nous, suscitées par les corps en mouvement hors de nous ; prétendre que ces corps existent indépendamment de nous, hors de nous, hors de sentiments qu’ils provoquent en nous, ces déclarations seront considérées comme nulles et non avenues ! A cette condition, la philosophie naturelle sera tolérée, voire théologiquement admissible, ou légitime. En tout cas, maintenue dans les limites de cette réserve, la science cessera d’être blasphématoire. »

Et puis vont venir des esprits beaucoup plus raffinés et retors comme Leibniz et…Kant ! La complexification théorique, sous tendue par une rhétorique sophistiquée et un jargon souvent abscons, intimide et tient à distance autant qu’elle légitime, en elle-même et sans effort de cohérence, le propos. Et comme, il est vrai que l’intelligibilité du monde par l’observation se heurte à de nombreuses résistances et que « Dieu » permet de combler facilement les vides, il est bien plus facile de servir la « démonstration » de l’existence d’un Esprit omnipotent et préexistant à toute réalité que d’affronter la difficile quête de son objectivité.
L’invention, par Leibniz de la « notion » de monade qu’il substitue à celle d’atome est un modèle du genre. Rappelons que ce terme provient du grec monas, monados, tiré de monos « seul », qui substantivé par la philosophie grecque (ê monas) signifie déjà « unité » Il donnera le préfixe mono en français : monologue, monocle, monogramme, etc.
En fait une banalité et une sorte de resucée pythagoricienne (la Monade désigne l'unité originelle d'où dérive la série des nombres, en particulier la Décade) et Platonicienne (Platon appelle ses Idées « Monades » (unités), dans la mesure où chaque Idée (le Juste, le Beau, l'Abeille en soi...) est une Forme sans multiplicité ni changement, un Modèle unique, un principe d'existence et de connaissance..). Retour à la case départ !
Ce qui donne ensuite des tautologies de ce type :

  1. « La monade….n’est pas autre chose qu’une substance simple…. simple c'est-à-dire sans parties. »

Simple, en effet ! Ou encore :

  1. « La où il n’y a pas de parties, il n’y a par conséquent ni extension, ni figure, ni divisibilité possible. Ces monades sont les véritables atomes de la nature et en un mot les éléments des choses. »

Car la vérité (la sienne) réside dans l’harmonie préétablie entre toutes les monades; devinez par qui ? : Et bien par Dieu, « pardi » !

  1. « … L’univers prétendu réel n’est qu’un phénomène sans substance et la réalité est l’esprit avec ses représentations ».

Alors Kant :
Très compliqué, inaccessible, mais incontournable et référentiel, dit-on !
« La Critique de la raison pure » a, au moins, l’avantage, dès le titre, d’annoncer la couleur.
Se référant àCopernic, qui démontre que la terre tourne autour du soleil et non l'inverse, Kant ambitionne d’opérer une révolution du même ordre en « affirmant » (il ne s’agit pas de prouver ; comment le pourrait-il ?) que le « centre » de la connaissance est le sujet connaissant (l'homme ou l'être raisonnable), et non une réalité extérieure par rapport à laquelle nous serions simplement passifs. Malencontreusement, c’est exactement l’opposé du modèle Copernicien puisque nous voilà de retour dans une théorie par essence anthropocentrique. Car, par delà la description enfin établie d’une vérité physique du monde réel, c’est bien les fondements théologiques des croyances antérieures que Copernic a mis à bas et ridiculisées et, en tout premier lieu, une vision autocentré de l’univers. A l’inverse de ce que déduit Kant, ce n’est que par sa capacité à s’extérioriser de sa perception du monde en tant que sujet (sa subjectivité) que Copernic peut envisager et objectiver le contraire de ce que ses sens lui renseignent.
A y regarder de près, Kant prétend à une antinomie : Faire de la métaphysique une science rigoureuse. Mais qu’est ce que la Métaphysique ?
Le mot apparait avec Aristote, mais n’est pas de lui : Une étrange équivoque28 instrumentalisée par les platoniciens a fait de ses textes écrits et intitulés « Après la physique (meta ta phusika) », une discipline reine en soi en y associant ce qu’il nommait philosophie première.
Depuis la métaphysique ambitionne de répondre à deux types de questions fondamentales bien distinctes : Celles concernant l'immortalité de l'âme, l'existence de Dieu, les raisons de l'existence du Mal ou le sens de la vie et celles qui s’attachent à l'étude de l'« être en tant qu'être » et en référence à Aristote, non pas d’une partie de ce qui est, mais de ce qui est dans sa totalité : La substance, la réalité véritable. Net progrès par rapport à Platon qui lui ne s’intéressait qu’à l'essence par laquelle le monde est créé, à la réalité de l’âme.
En fait les premières interrogations ne sont que problèmes existentiels égocentrés qui ne concernent que la relation de l’humain au réel (les sentiments) et, seules, les secondes, visent le réel en soi et définissent en fait une discipline autonome, l’ontologie. C’est La scolastique moyenâgeuse qui cherchant à légitimer la théologie chrétienne par la philosophie grecque (Aristote) l’instaura comme une partie de la métaphysique, en tant qu'elle définit les transcendentiae, les déterminations communes à tous les êtres. La filiation est limpide….
Alors pour un esprit libre, la métaphysique (de Kant) ne peut manquer d’apparaitre juste pour ce qu’elle est : Une sorte de cheval de Troie de la rhétorique théologique visant à saper, de l’intérieur, toute tentative rationnelle et logique d’appréhender [saisir par l'entendement, par un acte précis de la pensée conceptuelle] le réel. Même « épuré par la critique et par elle aussi ramenée à un état fixe», devenue en somme « rationnelle » (celle de Kant, comme toute autre d’ailleurs), n’a pour seul objectif que de démontrer « que toute connaissance spéculative possible de la raison se réduit aux seuls objets de l'expérience. » et que, par conséquence, comme « l’espace et le temps ne [sont] que des formes de l’intuition sensible » connaitre ne peut être que du domaine de la foi.
La « chose en soi », que Kant nous dit, par essence inconnaissable et dont seule une représentation perceptible par nos sens nous est accessible, n’est, en définitive que la production intellectuelle d’un corps/esprit surdéterminé par ses croyances, incapable de concevoir qu’il est lui-même constitué de la substance qu’il rejette dans un arrière monde indépendant de sa propre réalité. Le dualisme Platonicien est bien là toujours à l’œuvre, dissimulé derrière une complexification rhétorique et conceptuelle, sans doute déterminante pour expliquer son succès. Car qui a lu et lit entièrement Kant, si ce n’est ceux qui lui ont élevé une statue et, en le commentant, la perpétue ?    
Alors juste quelques extraits qui, bien sûr, s’exposent à la réfutation car « isolés de leur contexte », ce qui est pourtant toujours le cas d’une citation mais reste une parade récurrente apte à verrouiller toute critique, même légitime, et dispense ainsi d’y donner suite !
Dès le préambule de la Critique de la raison pure / Préface de la seconde édition (1787):

  1. «La critique (il parle de son œuvre…) peut seule couper les racines du matérialisme, du fatalisme, de l’athéisme, de l’incrédulité des esprits forts du fanatisme et de la superstition, ces fléaux dont l’effet est général, enfin de l'idéalisme et du scepticisme, qui ne sont guère dangereux qu’aux écoles et qui pénètrent difficilement dans le public.»
    « Je ne saurais donc admettre Dieu, la liberté et l'immortalité selon le besoin qu’en a ma raison dans son usage pratique nécessaire, sans repousser en même temps les prétentions de la raison spéculative à des vues transcendantes ;

Kant propose donc de sceller un "pacte" entre la raison et la foi : le domaine de la raison ne doit pas s'étendre au-delà des phénomènes, celui de la foi commence là où s'arrête celui de la raison :

  1. "J'ai borné la raison pour laisser une place à la foi."

Ainsi lorsqu’il encense la science c’est pour mieux en montrer les limites….
Il créditera ainsi l'astronomie de nous avoir « appris bien des choses étonnantes », dont la plus importante est qu'elle nous a :

  1. « Découvert l'abîme de l'ignorance, dont la raison humaine, sans [cette connaissance], n'aurait jamais pu se représenter qu'il était aussi profond ; et la réflexion sur cet abîme, [dit-il encore], doit produire un grand changement dans la détermination des fins ultimes à assigner à notre usage de la raison. » ( L'idéal de la raison pure », 2e section: « De l'idéal transcendantal)

Elle nous a donc appris que nous ne savions rien !
Sa capacité rhétorique à usurper les fondements logiques de la science et à les renverser au profit de sa « Critique » est indéniablement fascinante et d’une redoutable efficacité:

  1. « La critique peut seule couper les racines du matérialisme, du fatalisme, de l'athéisme, de l'incrédulité des esprits forts, du fanatisme et de la superstition [l’amalgame est édifiant !], ces fléaux qui peuvent devenir nuisibles à tous, comme aussi de l'idéalisme et du scepticisme, qui du moins ne sont guère dangereux qu'aux écoles et pénètrent difficilement dans le public. Si les gouvernements jugeaient à propos de se mêler des affaires des savants, ils feraient beaucoup plus sagement, dans leur sollicitude pour les sciences aussi bien que pour les hommes, de favoriser la liberté d'une critique qui seule est capable d'établir sur une base solide les travaux de la raison, que de soutenir le ridicule despotisme des écoles, toujours prêtes à dénoncer à grands cris un danger public, quand on déchire leurs toiles d'araignée, dont le public n'a jamais entendu parler et dont il ne peut pas même, par conséquent, sentir la perte.» 
    Préface à la seconde édition de la Critique de la raison pure (1787) disponible ici !

Et il serait donc l’un des plus grands philosophes du siècle des lumières !?

  1. Ecoutons ce qu’en pensait Nietzsche :
    « Comment a-t-on pu ne pas sentir à quel point l'impératif catégorique de Kant met la vie en péril ? C'est l'instinct théologique, et lui seul, qui a pris sa défense.... Une action à laquelle l'instinct de la vie nous contraint, trouve dans le plaisir qu'elle donne la preuve qu'elle est une action juste : et ce nihiliste aux entrailles dogmatiquement chrétiennes a fait du plaisir une objection... Qu'est ce qui détruit plus rapidement que de travailler, de penser, de sentir sans nécessité intérieure, sans un choix profondément personnel, sans plaisir, comme un automate mû par le "devoir" ? C'est tout bonnement la recette de la décadence, et même de l'idiotie... Kant en est devenu idiot. Et c'était le contemporain de Goethe ! Et cette funeste araignée passait - et passe encore ! - pour le philosophe allemand par excellence ! (L’Antéchrist, 11).

Alors ce n’est que pour son influence sur les plus grands esprits scientifiques qui vont suivre, tout particulièrement Ernst Mach (précédant Einstein qui le considérait comme « un précurseur de la théorie de la relativité ») qu’il m’est apparu nécessaire de m’y attarder aussi longuement….
Car pour un lecteur non attentif la théorie Kantienne peut sembler concorder avec celles des atomistes antiques. Pour mémoire rappelons que Les philosophes présocratiques, tous confondus, (matérialistes et théologiques) n’ont pas controversé sur l’existence (ou non) des qualités premières. Ils en reconnaissaient tous l’existence mais s’opposaient sur la cause du mouvement des corps : Les théologiques bien sûr l’attribuaient à Dieu et les autres adossés au principe que «rien ne naît de rien» en affirmaient tout simplement leur caractère éternel : Ce qui est, est !
Ecoutons, encore une fois, Lucrèce dans son « De rerum natura » :

  1. « Au seuil de la science est assis ce principe:
    Rien n’est sorti de rien. Rien n’est l’œuvre des dieux.
    C’est à force de voir sur terre et dans les cieux
    des faits dont la raison cherche en vain l’origine,
    que nous plaçons en tout la volonté divine.
    De là cette terreur qui nous accable. Eh bien!
    quand nous saurons que rien ne peut sortir de rien,
    nous verrons s’éclairer notre route, et les choses,
    sans miracle et sans dieux, nous révéler leurs causes. »

En fait ce lecteur de Kant abusé s’est laissé séduire par une rhétorique absconse et pernicieuse qui lui laisse croire qu’il ne tranche pas, pour au contre, l’objectivité des corps : Il conclut erronément, que, selon Kant, on ne sait pas si l’en-soi est ou n’est pas corporel. Ce que Georges Miedzianagora réfute parfaitement :

  1. …, «puisque le corps est phénoménal, dans le temps et l’espace, il est du côté des qualités secondes, de part en part. Il n’a que cette existence sentimentale : celles des phénomènes. Il serait, selon la doctrine de la Critique, insensé d’accorder à l’en-soi des propriétés qui sont celles du phénomène. Donc le corps en-soi n’existe pas : L’en-soi ne saurait être corporel. […] »

C’est de cette façon que Kant redresse l’ « excès » de Berkeley et Leibnitz tout en conservant l’avantage acquis par ces derniers (mais par eux à trop grand frais) : l’inexistence des corps.
Pourtant ce dont nous informe notre sens du toucher par exemple au contact d’une table c’est uniquement de la résistance de sa surface à la pression de nos doigts. De la sensation, du phénomène qui, si l’on s’en tient à tout ce qui précède, ne nous renseigne en rien sur l’essence, substance, ontologique réalité (peut importe le jargon métaphysique… !) de la table, ni de notre propre corps, évidemment.
Mais alors, compte tenu que l’en-soi de ce dernier ainsi que celui de la table sont structurellement identique (« Le vide, les atomes et le mouvement! »), comment expliquer qu’ils ne s’interpénètrent pas et que la main ne traverse pas tout simplement la table, ou l’inverse ?
L’impénétrabilité des corps entre eux n’est pas un sentiment mais la manifestation irréductible et indéniable de l’existence d’une réalité sous-jacente à notre perception du monde, qui d’ailleurs nous préexiste et nous survivra et dont nous sommes une simple expression parmi d’autres. Seul l’égocentrisme pathologique et condescendant d’esprits aliénés par leur croyances, cherchant à les légitimer en pervertissant le logos par la théologie a pu entrainer l’humanité dans un tel cul de sac de la pensée. L’être en-soi existe puisque nous sommes !
Mais voilà, en ce début de XVIIIème siècle, les théologiens protestants, s’ils n’ont pas encore remporté la victoire, viennent de « théoriser » ce qui va leur permettre de bientôt triompher.
Et pourtant, avec Galilée, Hobbes, Descartes, Newton,…ils s’étaient crus perdus ! Ils ont vu leur échapper la maitrise de l’explication du monde, du mouvement des objets dans le ciel et sur terre. Leur rhétorique fondait comme neige au soleil et la foi redevenait uniquement ce qu’elle a toujours été, une simple et béate croyance que de surcroit, à présent, les faits démentaient.
Mais en jetant le doute sur l’existence des êtres, et surtout en prétendant le faire « scientifiquement », ils retrouvent l’arrogance de leur caste et revendiquent à nouveau la connaissance suprême ! Ils ont reconstruit des thèses qui « vont de soi », une nouvelle Doxa qui va leur servir à corrompre quelques essentielles figures de la science physique qui, jusque là, ne tenait plus grand compte de cet obscurantisme désuet.
Pourtant s’il apparait déjà séduisant, pour quelques physiciens, de circonscrire leurs travaux à la simple étude des phénomènes sans se préoccuper des causes, la plupart (les plus brillants) demeurent exaltés par cette quête du savoir, alors en plein essor….

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Mais ce qui va tout changer c’est la crise théorique qui va surgir en son sein ! Son sujet : La nature de la lumière et sa dualité phénoménologique contradictoire ; onde électromagnétique ou/et flux de photons ? Une énigme qui va déboucher sur celles de la « mécanique quantique », renonciation dissimulée de la physique à élucider les causes des phénomènes, réattribuant ainsi à la théologie la primauté du discours sur le réel.

C’est Ernst Mach 29, se réfutant lui-même comme philosophe (« je ne suis qu’un savant et je ne suis absolument pas un philosophe »), qui va développer une philosophie des sciences et influencer tout le XIXe avec son ouvrage intitulé « La connaissance et l'erreur ». Pur phénoménologiste et fonctionnaliste, radicalisant les thèses de Kant, il affirme et cherche à démontrer l’inintérêt de la quête de l’essence du réel. C’est avec une condescendance ironique qu’il distingue le Savant du Philosophe :
  1. « N’ayant pas la bonne fortune de posséder d’inébranlables axiomes, le savant s’est habitué à considérer comme provisoires ses idées et ses principes les plus sûrs et les mieux fondés, et il est toujours prêt à les modifier à la suite de nouvelles expériences. En fait, cette attitude peut seule rendre possibles les progrès sérieux et les grandes découvertes. »

La force de son raisonnement tient certainement à sa lucidité sur la condition animale de l’humain qui légitime (en partie) l’absolu déterminisme auquel il le soumet. Il sort du dualisme Platonicien ou/et Cartésien pour proposer et affirmer un monisme psychophysique, à savoir l’indifférenciation du psychisme et du physique, ce qui m’apparait comme une incontestable avancée. Mais il en déduit que la liberté décisionnelle dont nous croyons être pourvus se réduit à une succession de mécanismes mis en place au gré des expériences que nous subissons pour assurer notre survie et notre reproduction :

  1. « Ce que nous nommons volonté n’est qu’une façon particulière de faire entrer les associations temporairement acquises dans le mécanisme fixe du corps antérieurement formé. Sans réflexes, ni instincts il n’y aurait pas de volonté. ».

Par glissements successifs il finit par construire une théorie de la connaissance purement mécaniste et utilitariste. Il rejette dans le même élan toute référence à l’existence des corps. Seule l’analyse objective des phénomènes perçus permettant la conceptualisation des lois qui les régissent lui suffit pour rendre compte du réel et surtout y être opérationnel. La question ontologique de l’univers l’indiffère et il la livre à la métaphysique (voire aux philosophes qu’elle préoccupe) qu’en fait il méprise.

  1. « Les sensations, écrit Mach dans La Connaissance et l'erreur, étant à la fois physiques et mentales, elles constituent la base de toute expérience mentale. » et « C'est des sensations et de leurs connexions que naissent les concepts, dont le but est de nous mener, par la voie la plus courte et la plus facile, à des idées sensibles qui s'accordent au mieux avec des sensations. L’intellection part ainsi toujours des perceptions sensibles et y retourne. »

Ce faisant, alors qu’il s’opposait à Kant en refusant, même de parler de la « chose en soi », il le renforce (donc peut-être à son corps défendant) lui apportant une sorte de légitimation scientifique, confortant ainsi à la théologie protestante comme seule détentrice de l’explication du réel, et surtout, offrant, si j’ose dire, « sur un plateau » une échappatoire inespérée aux physiciens embourbés dans les contradictions irréductibles qu’ils doivent affronter dans leur recherche sur la nature de la lumière. De Descartes à Einstein :
Pour bien comprendre ce qui, alors, s’est joué, il est indispensable, à présent, de dresser un bref rappel historique de l’évolution de la connaissance dans ce domaine :

  1. -Pour Descartes, la lumière est une composante de la matière, qui remplit tout l’espace et qui s’y propage instantanément ; il réfute l’existence du vide et lui suppose une substance omniprésente: « L’éther ».
    -Newton en accrédite l’idée mais considère qu’elle est faite de petits corps se déplaçant très rapidement dans l’espace auxquels il applique les principes de sa mécanique.
    -Quant à Christian Huygens, physicien néerlandais du XVIIe siècle, Il propose une théorie ondulatoire de la lumière et en particulier démontre que les ondes lumineuses pouvaient interférer de manière à former un front d'onde se propageant en ligne droite.

Ces deux dernières conceptions vont s’affronter dans un débat qui va durer jusqu’en 1872.
En 1801 Thomas Young réalise pour la première fois une expérience qui semble mettre en évidence la nature ondulatoire de la lumière.
Connue sous le nom de fentes de Young (ou interférences de Young) elle consiste à faire interférer deux faisceaux de lumière issus d'une même source, en les faisant passer par deux petits trous percés dans un plan opaque. Sur un écran disposé en face des fentes de Young, on observe un motif de diffraction qui est une zone où s'alternent des franges sombres et illuminées.

fentes de Young

En 1806 Young détermine une distance, bientôt unanimement admise comme la longueur d’onde d’une seule vague dans « l’éther » (cf.ci-dessous). Fresnel en améliore bientôt les formules mathématiques
En 1865 Maxwell unifie sous une seule théorie et une seule mathématique, toutes les formes possibles de lumières. Les quatre s’accordent à penser que la lumière peut se concevoir comme les mouvements animant la matière supposée qu’est « l’éther ».
C’est une modélisation commode, que les calculs confirment, et qui permet à Max Planck, en 1900, de définir l’énergie propre à chaque sorte de lumière, en fonction de la longueur des vagues propres à chacune d’entre elles. Plus les vagues sont courtes, plus évidemment leur nombre est grand en un temps t donné, et donc plus l’énergie est grande en ce même temps.
Tout semblait cohérent et la conception corpusculaire de Newton s’en trouvait définitivement obsolète.
Pourtant, dans le même temps, Michelson et Morley mettent au point une expérience d’optique qui a pour but de démonter l’existence de « l’éther ». Ils cherchent à mettre en évidence la différence de vitesse de la lumière qui se propage à partir de la terre à partir de deux directions (une dans le sens du mouvement de la terre et une autre perpendiculaire) et concluent que cette différence, si elle existe, est inférieure à ce que le dispositif permettait de mesurer (l'effet attendu étant environ 4 fois supérieur à la précision du dispositif). C’est un échec et abondamment refaite elle donne toujours le même résultat. Or, dans un « éther » omniprésent donc immobile la vitesse de la terre devait d’évidence s’ajouter dans le premier cas…Et la théorie exigeait cette conséquence. L’expérience contredisait donc la loi… Il n’y a plus d’ « éther » et donc plus de vagues !
Et puis un nouveau problème surgit en 1900 :

  1. Dans certaines conditions (en présence de vagues courtes) la lumière est capable d’expulser des électrons (d’une plaque de métal sur laquelle elle est projetée) et à leur communiquer une certaine vitesse mesurable. Il serait logique qu’en augmentant la quantité de lumière (l’amplitude des vagues) cette vitesse augmente en proportion. Or il n’en est rien ! La vitesse reste constante mais le nombre d’électrons éjectés, lui, augmente.
    D’autre part un électron éjecté nécessite une quantité d’énergie que seul, un certain nombre de vagues accumulées est susceptible de générer. Ce qui implique que l’on doit constater un certain temps intermédiaire entre les éjections. Mais ce temps est nul ou quasi nul. Seconde contradiction irréductible !
    Einstein propose alors une solution qui contourne le problème sans le résoudre véritablement. Puisqu’il n’y a plus de vagues il explique l’expulsion de l’électron par sa collision avec une seule « quantité d’action »qui serait d’une énergie équivalente à celle que la somme des vagues était censée produire en une seconde. Comme si, cette succession de vagues se confondait en un instant dans cette « quantité d’action » ou « quantum d’action » notion déjà utilisé par Planck (cf.ci-dessous) qui initiera plus tard la notion de « photon ».

Georges Miedzianagora fait alors remarquer, qu’à ce moment de l’histoire, toutes les conditions sont réunies (plus d’ « éther », expulsion instantanée de l’électron par « un photon ») pour redonner de la plausibilité à la théorie corpusculaire de Newton. C’était sans compter sur l’autorité institutionnelle des « philosophies » Kantienne et Machienne, déjà acquise et qui légitimait le « devoir d’ignorance » que GM résume ainsi :

  1. « On disposait des mathématiques de la théorie des vagues, on disposait de celle des « quantités d’action », on se mit à réunir tout cela en un impeccable bricolage.Puisque le réel, non corporel, autre que nos sensations, est mis hors de la portée de notre connaissance, il ne doit ni ne peut plus servir de critères à nos théories. On cesse de s’imposer à son égard, un discours sans contradictions !!!
    Au terme actuel de cette histoire de la disparition des corps, nous avons donc droit désormais, à un discours incohérent sur le réel »
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La mécanique quantique ou comment s’en débarrasser !
Les termes effrayent ! Associer la banalité du mot « mécanique » à la sophistication ésotérique de « quantique » produit un couple si singulier qu’il est permis de penser qu’il a grandement contribué au succès de ce qu’il prétend désigner. Par son étrangeté il éloigne autant qu’il fascine, confère une aura d’élus aux initiés et interdit à priori, toute intrusion critique inexpérimentée.
Pourtant, à y regarder d’un peu plus près, ils ne sont que l’expression d’une grande perplexité, voire la simple manifestation sémantique des contradictions qui les génèrent.
Comme bien trop souvent, en science, la complexité apparente des mots se substitue à l’ignorance sous-jacente ; plus cette dernière est grande, plus sont « savants » les termes qui la dissimule…
En l’occurrence reprenons-les !

  1. Mécanique est presque trop simple, voire impropre à rendre compte de ce dont-il s’agit. En effet la mécanique de la lumière laisse rêveur quant à la qualité de la réflexion en court tant elle fait songer à des assemblages théoriques de type « mécano » et renvoi immédiatement à « limpeccable bricolage »précité.
    Mais vient quantique et voici le tandem soudain requinqué. Pourtant, nous venons de le voir, quantique provient directement de quantum (d’action) qui ne désigne rien de plus que ce que l’étymologie nous en dit : Mot latin signifiant « combien ». Associé au verbe agir il est donc utilisé par Einstein, après Planck (nous le verrons plus loin), pour définir (limiter dans la compréhension) la plus petite quantité d’énergie indivisible qui compose la lumière susceptible d’arracher un électron d’une plaque de métal. Il faut, ici, bien comprendre, qu’Einstein, pour résoudre le problème que pose la disparition des vagues nous dit, déjà, à ce moment là : Tout se passe comme si… ! Le modèle ondulatoire de la propagation de la lumière ne peut pas expliquer les faits : L’arrachement instantané d’électrons d’une plaque de métal sous l’exposition à un faisceau lumineux …
    Ce qu’il propose si ! Mais il s’agit, somme toute, d’une simple « remontée d’expérience ». Pour que ce que nous observons puisse exister il faudrait que la lumière agisse ainsi. Sauf que, ce faisant, et comme sans s’en apercevoir, on change radicalement la conception, qui jusque là prévalait, de la lumière elle-même.
    Rappelons-nous l’expérience de Young:
    Young concevait la propagation de la lumière comme une déformation, de proche en proche, d’un milieu corporel, lisse et uniforme, parfaitement transparent « l’éther »; l’action de la lumière créant comme une succession de vagues transversales égales entre elles (l’image par tous connus, de l’effet d’une pierre tombant à la surface d’une eau parfaitement immobile)

    fentes de Young

    Un plan percé de deux trous S1 et S2 sur une droite horizontale par lesquels passe un faisceau lumineux
    qui vient se projeter sur un autre plan parallèle au premier. Par tâtonnement, en faisant varier les distances
    (entre les trous, les plans entre eux et celle de la source lumineuse S) on peut finalement observer,
    sur l’arrière plan, l’apparition de zones alternativement sombres et éclairées parallèle à la droite qui relie les deux trous.


    Par cette expérience il voulait prouver, bien sûr, la validité de sa théorie et  mesurer la distance entre deux vagues (crête à crête ou creux à creux).
    La lumière forcée à passer par ces deux trous distincts devait engendrer deux groupes de vagues ne pouvant manquer d’interférer.


    Les vagues de chaque groupe, suivant un chemin séparé, devaient nécessairement frapper l’arrière plan en des lieux également séparés. Si elles l’atteignaient crêtes sur crêtes (ou creux sur creux) les effets lumineux devaient se renforcer et à l’inverse (crêtes sur creux) s’annuler d’où une succession de bandes obscures ou éclairées.  
    Par un calcul géométrique simple pour lui mais qu’il est facile d’intuiter puisqu’il existe d’évidence un rapport mathématique entre la distance qui sépare les bandes éclairées sur l’écran et celle supposée entre deux « vagues » (non détaillé ici mais pour ceux que cela intéresse c’est là !) il put la calculer d’où son nom « distance de Young ». Ce sera possible par la suite de l’établir pour toutes les lumières visibles (ou invisibles) et caractériser ainsi chaque sorte de lumière. C’est universel et spécifique ; toute lumière en a une et chaque couleur la sienne propre. Baptisée plus tard « longueur d’onde » elle devient et demeure un des paramètres essentiels de la physique. Et cette propriété s’applique à ce que les physiciens nomment indifféremment aujourd’hui « lumière », mais aussi « rayonnement électromagnétique » où même « énergie pure ». La croyance dans la nature ondulatoire du rayonnement lumineux est, à ce moment là, validée ! Mais l’exubérance scientifique de ce XIXème siècle finissant réserve encore bien des surprises et il est nécessaire, afin de contextualiser ce qui se joue véritablement avec l’avènement de la physique quantique, d’en donner, à présent, un bref aperçu. Le mérite exceptionnel de Georges Miedzianagora consiste à avoir fait l’effort intellectuel de transcrire dans un langage accessible « destiné à définir les faits découverts et seulement ces faits ».

    1. « Cette analyse institutionnelle des notions permet aux initiés et aux non initiés des doctrines physiques de connaître les faits du dossier. En dehors d’une telle analyse, l’accès à cette connaissance leur est interdit par le « terrorisme » des doctrines établies, exercé sur l’intelligence de ceux, qui ne peuvent être informés de ces faits que par les initiés aux doctrines en vigueur. Initiés et non initiés subissent, en effet, la « terreur » d’un langage doctrinal, où les faits sont immédiatement qualifiés selon leur interprétation doctrinale ! Si bien qu’il n’est plus alors loisible de discerner les faits des doctrines qui les ont mis en œuvre d’une certaine manière. »

    Tout ceux, simples curieux, qui comme moi jusqu’alors, ont tenté de s’approcher, en vain, de cet épisode essentiel de la connaissance en physique comprendrons et s’empresserons de se procurer « Les dieux post-modernes »! Pour ma part je livre ici ce qu’enthousiasmé, j’ai pu en assimiler….
    D’abord les découvertes :
    - La vitesse de la lumière est constante et absolue. Démontré par Michelson et Morley (cf. ci-dessus) - L’énergie des lumières.
    Elle mesurée à partir d’un « corps noir ». Les matériaux noirs absorbent toutes les lumières qui les atteignent. En physique, le corps noir est un objet idéal qui absorberait toute l'énergie électromagnétique (tous les rayonnements) qu'il recevrait, sans en réfléchir ni en transmettre. L'objet réel qui se rapproche le plus de ce modèle est l'intérieur d'un four. Afin de pouvoir étudier le rayonnement dans cette cavité, une de ses faces est percée d'un petit trou laissant s'échapper une minuscule fraction du rayonnement interne. On fait varier la T° du corps (du four) et on mesure celle d’un écran qui reçoit ce rayonnement pour chacune des T° à laquelle il est amené. Ainsi on obtient une mesure qui rend compte de la variation de l’énergie qu’il reçoit. Cette énergie étant considérée comme la cause du réchauffement de la plaque.
    - Les énergies spécifiques.
    Planck va démontrer « mathématiquement » que chaque lumière différente a une énergie qui lui est propre puisque sur l’écran il lui correspond une T° précise. Déjà caractérisée par une couleur, puis par une distance de Young (longueur d’onde) et maintenant par une quantité d’énergie distincte il est possible alors d’affirmer que chaque lumière comporte une énergie spécifique. Ainsi, John Rayleigh énonça que la puissance rayonnée par un corps chauffé est proportionnelle à sa température absolue et inversement proportionnelle au carré de la longueur d'onde de la couleur réfléchie, ce qui illustre l'idée d'un changement continu. Cependant, des mesures ont démontré que sa théorie n'était vraie que pour les longueurs d'onde allant de l'infrarouge au vert. A partir du bleu, l'expérience est en contradiction avec les valeurs théoriques. Paul Ehrenfest appela cette erreur la « catastrophe ultraviolette ».
    Planck, pour tenter d’y répondre, construit un « système d’unités de mesure » qui intègre le temps et établi une constante minimale pour toute les lumières. Georges Miedzianagora l’exprime ainsi :

    1. « [Il…] est tel que l’énergie de chaque lumière est toujours, pour un nombre entier de secondes, le multiple entier d’une quantité spécifique qui la définit. Cette quantité est, elle-même, pour chaque lumière, le produit d’une quantité extrêmement petite (h) multiplié par un indice particulier à chaque lumière. ».

    Chaque lumière est donc ainsi « dotée » d’une énergie spécifique. C’est une avancée scientifique comparable à la découverte d’Archimède qui comprit qu’à chaque volume d’un corps lui correspond toujours le multiple d’une quantité de poids qui lui est propre. Ici, tout bascule! Planck opère à ce moment là une rupture épistémologique fondatrice. C’est la croisée des chemins et lui-même va douter longtemps de la validité de son modèle. Il vient de formaliser mathématiquement la discontinuité du flux lumineux en « paquets d’ondes» qu’il va « séparer » par l’expression de sa fameuse formule : E=hν
    En effet, rappelons-nous que l’on peut comparer deux lumières différentes par leurs deux distances de Young, soit deux nombres. Si celui de la première lumière est N fois plus petit que celui de la seconde, la formulation de Planck affirme que le nombre qui exprimera l’énergie spécifique de la seconde sera N fois plus grand que celui de la première. Ce que l’on peut dire ainsi : L’énergie spécifique des lumières est inversement proportionnelle à leur distance de Young. Mais pour les physiciens cette dernière s’appelle à présent « longueur d’onde » et est représentée comme telle. En poursuivant la logique des calculs si l’on divise la vitesse de la lumière (constante et absolue pour toutes les lumières) soit 300 000 km/s par le nombre de la distance de Young qui en caractérise une on obtient un quotient qui lui est proprement spécifique (ν). Donc les grandeurs qui les caractérisent toutes seront inversement proportionnelles à leurs distances de Young (ν= c/λ)
    Les physiciens en nommant ces quotients « fréquences », purent alors dire que les énergies comparées sont directement proportionnelles à leurs « fréquences » (E=hν). Ce qui implique que l’énergie ne peut prendre comme valeur que des multiples premiers d’une valeur première minimale fixe (La constante de Planck). Donc impose mathématiquement une discontinuité dans le réel…Mais voilà, « ça marche » !
    On va donc, à partir de ce moment, inverser le processus scientifique, qui part de l’observation pour aboutir à une théorie susceptible d’être par la suite expérimentée, pour, à postériori, rechercher dans la réalité des preuves de la validité du modèle qui, à priori, lui, est incohérent. Jusque là en vain ! L’incohérence observée avec les calculs du modèle antérieur (à partir du bleu) est mathématiquement résorbée mais en ouvre une autre dans le réel qui ne va jamais se résoudre. Einstein l’exprimera lapidairement ainsi : 

    1. « Si quelqu'un vous dit qu'il sait ce que veut dire E=hν, dites lui que c'est un menteur !»

    Pourtant, c’est lui qui, oserais-je le dire, va en « ajouter une couche » ! En théorisant l’effet photo électrique (déjà signalé plus haut) il reprend la notion de quantité d’action (quantum) pour interpréter l’arrachement d’électrons d’une plaque métallique sous l’effet d’un rayon lumineux (seules les lumières à distances de Young très courtes chassent ainsi les électrons). Selon lui, cette observation est consécutive à la collision d’une unité minimale de lumière spécifique: Un hν. La vitesse de l’électron ainsi arraché est donc proportionnelle à ν. 30
    Ce que Georges Miedzianagora résume très clairement en proposant une analogie avec la conception qu’exposa Dalton en 1800 pour rendre compte des masses spécifiques (les « poids « spécifiques » d’Archimède):

    1. « Toute quantité d’un corps de masse spécifique donnée est un agglomérat d’atomes, où chacun a une même masse spécifique ; Si chaque lumière a une énergie spécifique c’est qu’elle est composée de « quanta d’action » dont chacun à un même énergie spécifique ».

    La discontinuité dans le processus de diffusion de la lumière est entérinée !
    Mais alors comment expliquer, ce qui n’a bien sûr pas changé, à savoir la distribution des bandes claires et obscures sur l’arrière plan de l’expérience de Young jusqu’alors expliquée par la nature ondulatoire et continue de la lumière et caractérisée par sa dite « longueur d’onde », à l’époque encore nommée distance de Young et inversement proportionnelle à son énergie spécifique.
    Comment faire correspondre deux modélisations de la propagation de la lumière dont l’une s’apparent à des vagues sur une surface liquide parfaitement lisse et l’autre à une pluie de « photons », puisque c’est ainsi à présent qu’il faut appeler ces fameux « quanta d’action », au demeurant pure hypothèse conceptuelle ?
    Et donc comprendre à présent ce qu’il se passe « réellement » lorsque cette lumière « bicéphale » traverse les deux trous de l’expérience de Young et produit toujours le même résultat : Une série de bandes alternativement claires et obscures sur son arrière plan ?
    Soit dit en termes de la nouvelle physique pourquoi (et comment) des « quanta d’action » de grande énergie se répartissent-ils sur les bandes associées à des longueurs d’onde (anciennement Distances de Young31) très courtes alors que ceux de petite énergie le font sur les bandes, elles, associées à des longueurs d’onde très longues ? Et comment expliquer, à présent, la corrélation entre courtes longueurs d’onde et grande énergie et pourquoi la « longueur d’onde » est-elle strictement inversement proportionnelle à l’énergie ?
    Que nous dit Einstein ?

    1. « Mais la lumière qu’est-elle réellement ? Est-elle une onde ou une pluie de photons ? [ …] Nous nous trouvons en face d’une difficulté d’un genre nouveau. Nous avons deux images contradictoires de la réalité ; aucune, prise séparément, n’explique pleinement les phénomènes de la lumière mais ensemble elles arrivent à le faire […] Est-il possible de combiner ces deux images ? Comment expliquer ces deux aspects extrêmement différents de la lumière ? » Albert Einstein et Léopold Infeld, L’évolution des idées en physique, (1936), trad. Par Maurice Solovine, Paris, Flammarion, 1983, p.278-182

    Et plus tard, restant un irréductible lucide :

    1. «Je suis par conséquent enclin à croire que la description de la mécanique quantique [...] doit être considérée comme une description incomplète et indirecte de la réalité, qui devra un jour être remplacée par une interprétation plus complète et plus directe»

    A toutes ces questions il n’y aura pas de réponses ! Ni à l’époque, ni maintenant !
    On va se contenter de les « formuler » au sens premier de « mettre en formule » en l’occurrence mathématique ; à la contradiction du réel les physiciens vont substituer la cohérence du calcul. Ce processus de « rationalisation » de la réalité au détriment de celui de sa compréhension, auquel j’ai déjà fait allusion en ce début de texte, trouve peut être ici sa plus belle illustration, si ce n’est son origine, et paradoxalement sa légitimation scientifique. Pour tenter d’expliquer l’inexplicable les physiciens vont utiliser ce que Miedzianagora appelle, avec une belle ironie, « un tour de passe-passe ou plus exactement un tour de passe et passe-pas » ! Les photons passent et ne passent pas par l’un ou l’autre trou ?!!!
    Ou que les particules peuvent exister indifféremment et simultanément en deux endroits différents bafouant sans aucune lucidité les trois axiomes irréductibles de la physique antique : Le principe d’identité, le principe du tiers exclu et le principe de non-contradiction32 Qu’à cela ne tienne ! Ils vont attribuer, par une formalisation mathématique, une « onde de probabilité » aux « quanta d’action » de lumière qui correspond à ce que l’on observe sur l’écran. Ils inversent le protocole scientifique qui permet de donner une formulation mathématique à partir d’un fait avéré en réduisant, cette fois ci, la contradiction des faits par une expression mathématique, en quelque sorte, juste en soi. Et intègrent de l’incertitude et l’escamotent par le calcul (de probabilité) ; le début de la fameuse modélisation du réel, aujourd’hui incontournables instruments  de connaissance, dont on « mesure » ici le caractère bancal des origines.
    Car alors, au bout du compte, qui comprend ? En fait personne !
    Et c’est ce que nous dit, avec une assurance désarmante Richard Feynman (prix Nobel de physique de 1965 avec Julian Schwinger pour leurs travaux en électrodynamique quantique) dans son livre La nature des lois de la physique (Marabout université, Paris 1983 p.158 puis p.155 sq):

    1. « …Je crois pouvoir dire à coup sûr que personne ne comprend la mécanique quantique. » (Sic !)
      « Les électrons de ce point de vue, se comportent exactement comme les photons; ils sont tous loufoques, mais exactement de la même façon. »
      « Je vais vous raconter comment la nature se comporte. Si vous voulez bien admettre simplement qu’elle se comporte ainsi. Vous la trouverez adorable et charmante. Si vous pouvez l’éviter, ne restez pas là à vous répétez « Mais comment peut-il en être ainsi ?» Car vous serez submergés, noyés et entrainés dans un cul-de-sac dont personne n’a encore réussi à s’échapper. Personne ne sait comment cela peut se passer ainsi. »
      « Proposition A : Chaque électron passe soit à travers le trou N°1, soit à travers le trou N° 2. Nous devons évidemment en conclure que la proposition A est fausse. Vous ne pouvez plus dire qu’il passe soit par un trou, soit par l’autre. Ou plutôt vous pouvez toujours le dire, pourvu que vous cessiez immédiatement de réfléchir et d’en tirer des conclusions ; mais les physiciens, préfèrent ne pas le dire, plutôt que de cesser de penser à l’instant.»
      « Mais le grand mystère est dans ce que j’ai décrit, et personne ne peut aller plus loin aujourd’hui. »
      « Ce n’est pas notre ignorance des rouages internes, des complications internes, qui entraine l’apparition des probabilités dans la nature. Il semble que ce soit intrinsèque, ce que quelqu’un a exprimé ainsi : « La nature elle-même ne sait pas par quel trou va passer l’électron. »

    Si l’on ne comprend pas c’est que la nature est incohérente. Circulez, il n’y a rien à voir ! A partir de l’interprétation d’Einstein, en 1905, tout c’est accéléré…De partout affluent des formalisations mathématiques qui viennent exprimer la situation incomprise (De Broglie, Bohr, Heisenberg, Schrödinger, etc.). Ce sont les premières mécaniques quantiques qui ne se fonderont que plus tard en La mécanique quantique officielle, bientôt institutionnalisée.
    En résulte d’abord un grand soulagement et, plus étonnamment, une sorte de puéril éblouissement ; voici ce qu’en dit Georges Miedzianagora :

    1. « En cet endroit, il convient de rencontrer un argument « d’émerveillement » qui est le suivant, on nous dit : Voici une théorie qu’en dernière analyse, nous ne comprenons pas. Ce qui nous émerveille, c’est que ce formalisme nous permet de prévoir le comportement de la nature, alors que nous ne comprenons pas ce formalisme :
      1) On ne comprend pas la proportion entre énergie spécifique et distance de Young.
      2) On a exprimé par un formalisme, les termes de cette incompréhension, Il n’y a dons pas de raison pour qu’on comprenne ce formalisme mieux que les termes incompris qu’il répète.
      3) La proportion incomprise était avérée. Le formalisme qui la met en œuvre, met en œuvre les données de faits avérées. Il n’y a donc pas à s’étonner de la pertinence de ce formalisme à l’égard des faits. »

    Ainsi un siècle après ce schisme épistémologique rien ne semble avoir changé. Pour le vérifier et se détendre un peu, consultons la page Wikipédia sur ce sujet « Dualité onde-corpuscule ». Tout est compréhensible sauf le dernier paragraphe : « Interprétation de la dualité ». Et si nous ne comprenons pas (ce qui semble envisageable !) en voici la raison ; au premier abord, disons, loufoque, mais, somme toute, plutôt pertinente :

    1. « Il serait inexact de dire que la lumière (comme tout autre système quantique d’ailleurs) est à la fois une onde et une particule, ce n’est ni l’un, ni l’autre. Le manque d'un vocabulaire adéquat et l'impossibilité de se faire une représentation mentale intuitive des phénomènes à petite échelle nous font voir ces objets comme ayant une nature, par elle-même, antinomique..»

    Heureusement qu’il existe un vocabulaire pour nous permettre de comprendre,… que nous ne sommes tout simplement pas aptes à comprendre ! Et que personne ne l’est ! L’incohérence reste flagrante ! Et la non-réponse toujours aussi hermétique….bien qu’il faut le reconnaitre ici, plutôt rigolote !

Mais, si l’on réfléchi un tant soi peu il est assez facile de se rendre compte qu’en fait tout a changé et de manière prodigieuse car, à partir de ce moment là, la science a définitivement renoncé à comprendre et expliciter le réel, s’est détournée, en fait, de ce qui la différenciait foncièrement de la théologie c'est-à-dire réfuter tout dogme inexplicable, tout a priori. Cette capitulation semble aberrante, impossible même, tant la période qui la précède semble nous montrer, à contrario, une recherche scientifique en plein épanouissement, confiante et enthousiaste, se croyant enfin dégagée de l’emprise religieuse et persuadée d’accéder, dans un futur proche, à une ultime et définitive compréhension du réel. Mais alors, l’était-elle vraiment ?

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Que c’est-il s’est passé et pourquoi tout a soudainement basculé ?
Rappelons que l’incompris est consubstantiel à la recherche fondamentale ; il en est même, si j’ose dire, le moteur, voire son origine. Nous voulons savoir ! Cette curiosité nous anime au plus profond de notre être ; elle est ontologique et mérite, de ce fait, question : Qu’est ce qui veut connaitre en nous ? J’y reviendrai peut être….
La physique, comme il a été dit plus haut, a pour unique objet l’observation, pour la comprendre, de la nature des choses, corps, réalité, « en soi », etc. peu importe, ici, le nom qu’on lui donne. Et cela a débuté il y a 25 siècles ! Certainement bien avant d’ailleurs mais il ne nous en reste pas de trace ou bien nos règles d’interprétation, captives de nos conditionnements, ne nous permettent pas de les interpréter sainement…
Cinq siècles étonnamment privilégiés, autant que nous pouvons véritablement le savoir, mais qui nous ont légué l’essentiel, les bases et surtout le mépris du mythe et du divin. Et ce jusqu’à Platon et au triomphe du christianisme…Et puis les ténèbres, 1700 ans d’aveuglement, d’impénétrabilité, de persécutions, de martyrs, de petitesse, d’inepties, de stupidité…, avant de voir réapparaitre un peu de lumière (toujours elle !) pour pouvoir à nouveau affirmer, tout simplement et librement, que la terre n’est pas plate et que le soleil ne tourne pas autour d’elle.
Les XVIIème et XVIIIème siècles qui suivront, seront ceux de la « nouvelle » philosophie naturelle, celle qui semble s’être enfin émancipée de la religion, qui la supplante dans les esprits cultivés et semble en passe, enfin, de régner. Mais nous l’avons vu, la théologie protestante qui n’a jamais renoncé et son influence sur cette communauté en voie d’affranchissement reste prégnante. Et, à l’instar de Mach « inspiré » par Kant, il est manifeste que c’est toute une partie de cette communauté scientifique qui demeure sous influence. Ecoutons Bohr, puis Heisenberg :

  1. « …L’attribution de qualités physiques habituelles aux objets atomiques comporte un élément d’ambigüité essentiel (Physique atomique et connaissance humaine) »
    « …les pierres de construction de la matière (atomes) que l’on avait prises pour l’ultime réalité objective, nous ne pouvons absolument plus les considérer « en soi ». Ils se soustraient à une détermination objective dans l’espace et le temps et au fond nous ne pouvons jamais donner à la science pour objet que notre connaissance de ces particules. (Das Naturdild des heutigen physik) »

C’est de fait une constante historique : Les esprits scientifiques, au même titre que leurs contemporains, sont culturellement déterminés par la pensée dominante de leur époque et cela, malheureusement bien souvent, à leur insu, ne peut manquer, de formater leurs modes de pensée. La question de la croyance au divin, si elle n’est pas, à priori et publiquement extirpée, demeure tapie au plus intime des intelligences les plus rationnelles. C’est d’ailleurs toujours le cas aujourd’hui comme j’ai essayé de le démontrer plus haut… De plus le pouvoir religieux ne s’est jamais contenté de son emprise spirituelle ; de tout temps il est sans cesse intervenu directement dans le temporel. Et à cette époque les honneurs et les carrières lui demeurent encore souvent assujettis. Rappelons que la société allemande « moderne » s’est fondée sur la Réforme luthérienne et a finalement engendré une « théologie laïcisée » prépondérante en occident : L’existence de Dieu et de la science peuvent coexister à la condition impérative que cette dernière cantonne son champ d’action et de recherche aux seuls phénomènes, aux qualités secondes. La « chose en soi » est un domaine réservé et l’opprobre ne pourra manquer de s’abattre sur tous ceux qui transgresseront cette limite. Voilà qui ne peut manquer d’être efficacement dissuasif.
Alors au cours de l'année 1900 lorsque « surgit » la « catastrophe ultraviolette » et que Max Planck propose sa solution « quantique » il est permis de penser que la communauté scientifique manque singulièrement, concernant le réel, d’un socle conceptuel philosophique stable pour résister aux conséquences qui s’annoncent. La science est, soit totalement découplée de la philosophie, soit aux mains de la théologie protestante. Dans les deux cas elle se retrouve poreuse à l’idéalisme et prompte à arrêter sa quête à la simple étude des phénomènes. Et à accepter de ne plus réfléchir dans la mesure où la « simple formulation» est à même de rendre compte du « mystérieux prodige » et la logique mathématique suffisante à la valider.
Sans se rendre compte qu’ils rendent les armes à la croyance, les physiciens vont affirmer que « le réel est hors de portée de toute compréhension possible » et qu’ontologiquement, « c’est la nature des choses elle-même qui interdit l’intelligence de la réalité.» J’ai bien dit « sans se rendre compte ! » car c’est bien là le pire puisqu’il implique qu’à partir de ce moment là, le dogme (non considéré comme tel) ne pourra plus être contesté.
La logique scientifique vient d’entériner logiquement l’illogisme qui à présent la fonde…N’est ce pas d’ailleurs là le substrat de la pansée Kantienne ?
Dorénavant les étudiants en physique vont devoir se faire une représentation du réel à partir de la mécanique quantique qu’ils ne comprennent pas évidemment mieux que leurs enseignants.
Ces fameuses « ondes de probabilités » dont seraient pourvus les photons leurs sont présentés comme des faits. Mutatis mutandis, « ce qui devait être changé ayant été changé », tout est à nouveau possible, et plus aucun délire conceptuel ne nécessitera d’être compréhensible (c.-à-d. qui peut être saisi par l’intelligence) pour être validé. De la théorie du big-bang « preuve scientifique » d’un arrière monde puisque "ex nihilo nihil fit" (« rien ne vient de rien ») à la quête de l’insaisissable « boson de Higgs», de la « théorie des cordes » à l’existence des mondes parallèles, la physique fondamentale semble totalement décomplexée et livre au monde, sans aucune retenue, les résultats (il est vrai souvent extrêmement spectaculaires) de leurs délirantes et fantastiques projections mentales sur le réel.
Très paradoxalement, si ce mot ici a encore un sens, en niant la nécessité de comprendre la structure essentielle de la matière, en lui refusant même ainsi toute existence objective, ils en arrivent aujourd’hui à en « inventer » artificiellement des représentations qui cette fois ci ne sortent d’évidence plus que de leurs cerveaux, il est vrai exceptionnels mais irrémédiablement fêlés !!!
Où en sommes nous donc, aujourd’hui, en ce début de XXIème siècle ? Le pont jeté au dessus du vide semble indestructible. La double discontinuité qu’a introduite la création de la mécanique quantique dans l’évolution récente de la connaissance est, pour la quasi-totalité des intellectuels contemporains (toutes disciplines confondues, physiciens compris) totalement imperceptible ; césure épistémologique gigogne parce que concernant dans un premier temps, comme nous l’avons vu, la structure même du réel (propagation de la lumière par « quanta d’action » et « onde de probabilité ») et, consécutivement en second, l’effondrement du renouveau de l’intelligence («action de comprendre, faculté de comprendre, entendement ») réinitiée par Newton et Locke deux siècle plus tôt. Ainsi, comme le dit Georges Miedzianagora :

  1. « Commencé dans les « Lumières » la physique aboutit dans l’obscurité » !

Mais ces ténèbres, à contrario des antérieures, ne sont plus constatables, ni contestables…et ne suscitent plus aucune révolte. Tout contribue à nous faire croire que la science triomphe, que la connaissance ne cesse de progresser et que nous sommes au seuil de fantastiques découvertes aptes à résoudre l’ensemble des problèmes auxquels nous contraint, pour l’instant, un « progrès » encore adolescent. Quant à la philosophie il est facile de constater qu’elle a totalement abdiqué toute prétention à s’immiscer dans le champ scientifique et qu’elle se contente, quand elle s’en approche, d’en commenter les effets d’un simple point de vue moral. Il est vrai que l’extrême complexité de la « boite à outils » mathématiques des sciences physiques, couplée à leur jargon et leur rhétorique absconse ont établi une barrière quasi infranchissable aux non-initiés. Tout particulièrement dans un monde où l’efficacité du calcul mathématique, sans cesse « prouvée » par l’ubiquité informatique, s’impose dorénavant comme l’indéfectible mythe de notre « modernité ». Ecoutons encore une fois Georges Miedzianagora nous alerter de manière si prémonitoire,

  1. «Il faut garder à l’esprit le fait que le dispositif mathématique est un analogue opérationnel des modifications factuelles qu’il calcule. On n’évitera ainsi, la terreur intellectuelle, produite par cette confusion entre l’appareil de calcul et les faits dont il est l’analogue. Ne pas céder à la rhétorique  de la représentation des modèles mathématiques, où se mêlent : sémantique, mesures, analogies, calculs. A bon entendeur salut !»

avant de revenir, avec lui, sereinement à la double et originelle question, à présent totalement ignorée, voire méprisée et reléguée dans le champ de l’inutile : Qu’est ce qui unifie et que sont les trois « choses » primordiales dont nous sommes sûrs que, par leur interaction, elles (infra) structurent le réel : Les masses, les lumières et les forces ?
Originelle, car souvenons nous que c’était bien, en fait, celle que se posait déjà les sages antiques lorsqu’ils s’interrogeaient sur l’inéluctable interconnexion de l’air, de la terre, de l’eau et du feu. 2500 ans plus tard, même si nous les avons réduites à seulement trois, nous ne savons toujours pas ce que sont ces « choses » ni comment elles se transforment l’une en l’autre et/ou interagissent l’une sur l’autre et réciproquement. Et, c’est bien là le pire et l’expression d’une immense régression, les physiciens ne s’en soucient plus d’aucune façon !
Ils sont finalement tous redescendus dans « la caverne de Platon » 34 où sur le mur en face d’eux, fascinés, ils peuvent admirer les images fabuleuses que produit leur hallucination collective ; rien ne semble plus pouvoir les en détourner et leur faire prendre conscience qu’ils sont en réalité cernés par l’obscurité. Bien que lucides sur le caractère imaginaire de ces projections tout les convainc qu’elles sont fondées sur des axiomes validés et solides alors qu’il ne s’agit que de dogmes par eux-mêmes érigés.

  1. « Les physiciens et les philosophes actuels ne savent pas (ou plus)que la position où ils se tiennent leur a été assignée par les théologiens. Ils croient que c’est la souveraineté de leur propre rigueur qui leur impose ! »
    Et si, par extraordinaire, l’un d’entre eux revenait sur ses pas et remontait vers la lumière, il lui faudrait bien du courage pour redescendre et tenter de les emmener avec lui.

D’une certaine manière, je voudrais affirmer ici que Georges Miedzianagora est cet homme ! Lui, d’abord et avant tout philosophe et irréductible athée, ne s’est pas échappé de la caverne mais a décidé d’y descendre et d’y porter la contradiction. Son intelligence et sa volonté lui ont permis après plusieurs années de travail de franchir la barrière conceptuelle ésotérique qui protège la mécanique quantique au point d’en devenir familier des outils mathématiques qui servent à la légitimer. Et c’est de l’intérieur qu’il l’a pulvérise en ramenant à la surface les insoutenables contradictions qui lui servent de piliers. Et, de plus, poursuivant sur sa lancée, il propose, renouant avec Newton, une nouvelle conception de la lumière, qui permet de résoudre sans la trancher sa double nature, ondulatoire et corpusculaire. Et, se paye le luxe, pour, mathématiquement, la formaliser, de faire appel à Paul Glansdorff (excusez du peu !35) difficilement contestable pour ces compétences.
Il me faut donc à présent tenter d’en donner succinctement (autant qu’il est possible) les grandes lignes, avec le seul objectif de renvoyer à nouveau l’improbable mais précieux lecteur qui m’aura suivi jusqu’ici, à la lecture complète des « Dieux post-modernes » dont il faut encourager l’étude dans toutes les universités du monde. Donc pour répondre aux interrogations que la physique à décider d’ignorer et d’enjamber et qu’à présent elle a tout simplement oubliées il propose donc d’envisager la lumière à partir d’une nouvelle supposition ….Elle est « fort simple » :

  1. «…Toutes les lumières sont composées de corps extrêmement petits : Les infraphotons. Chacun de ces très petits corps a la même célérité, le même volume et la même énergie que tous les autres. Chaque espèce de lumière physiquement définie est ainsi composée de petits corps de ce genre, lesquels sont identiques, quelle que soit l’espèce de lumière considérée. Un photon de lumière quelconque est donc, en fait un débit, ou un flux, ou une « pluie » de ces petits corps, tous parfaitement identiques les uns aux autres. Ce qui fait la différence d’une espèce à une autre, c’est et ce n’est que : La densité du débit ou de flux de tels corps. Le concept révèle qu’en réalité les deux grandeurs, mesurées en termes de « longueurs d’ondes » et d’énergie, sont et ne sont que des paramètres, mesurant indirectement la densité propre à chacun de ces débits. »
    Ce qu’il précise ainsi :
    « Ici, je propose de considérer une conception de la lumière, telle qu’une grandeur
    --la densité - qui caractérise la lumière rende raison de ces difficultés.
    Ici, je propose de considérer qu’en mesurant les énergies des diverses lumières, d’une part, et leurs longueurs d’ondes d’autre part, on a mesuré les paramètres de cette densité.
    Cette densité impose par sa nature, que ces deux paramètres varient en raison inverse l’un de l’autre.
    Bref je propose une solution à l’ensemble de ces difficultés. »
    Je considère un photon de lumière comme un débit de particules élémentaires. Ces particules sont étendues (ce sont des corps !) et une rapidité de mouvement leur est indissolublement inhérente.
    Considérant les diverses lumières – lesquelles différent l’une de l’autre, selon le langage des physiciens, par l’énergie et la « longueur d’onde » - je conçois la différence de l’une et de l’autre comme étant le fait de la densité, en particules élémentaires, propre à chacune. » (C’est moi qui souligne !)

Rappelons que la notion de« longueur d’onde », que continue d’utiliser les physiciens, ne correspond qu’à une conception « ondulatoire » de la lumière dans l‘ « éther » devenue fort « problématique » par la disparition de ce dernier. Seule l’expérience des fentes de Young, observation incontournable, demeure et doit toujours être explicitée. Elle permettait, à partir de la répartition des bandes claires et obscures sur l’arrière plan de l’expérience, de calculer les longueurs séparant deux ondes de ces lumières alors « ondoyantes » et ainsi de les caractériser. Mais cette théorie ne permettait pas de rendre compte de l’arrachement de photons à une plaque métallique avec certain type de lumières à ondes très courtes. Einstein « résolu » ce problème en supposant « l’aplatissement temporel » (ou la réunification en un instant d’une série de vagues) en un « quantum » de lumière d’une énergie instantanée composé de « v » vagues chacune d’énergie « h » (Planck) et donc égale à 1 (hv). Mais cela n’explique toujours pas pourquoi et comment les lumières qui se sont « aplaties » peuvent en passant par deux trous distincts se répartir, comme l’expérience persiste à le montrer, en « franges d’interférences » à distances de Young courtes pour celles de grandes énergies et en « franges d’interférences » à distances de Young longues pour celles de moindre énergie ?
Ce que propose Miedzianagora part bien de l’idée de Planck que dans chaque lumière d’une « longueur d’onde » donnée existe une énergie spécifique qui lui est propre. Dont Einstein interprétera l’existence (comme Dalton pour les masses spécifique avec leurs atomes spécifiques) en affirmant que chaque lumière d’une énergie spécifique d’indice « hν » est faite de quanta ayant eux même une énergie spécifique égale à un « hν ». Il en déduit que l’on peu interpréter l’énergie spécifique d’une lumière comme consécutive à la densité spécifique de son débit en quanta ; l’énergie spécifique de ce quanta-unité demeurant commune à toutes les lumières. Il en déduit donc que : 

  1. « La densité est la « grandeur » dont l’énergie et cette fameuse « longueur d’onde » sont les paramètres. »
    « Considérons, en général, un débit quelconque de particules identiques, isotropiquement réparties sur toute tranche de ce débit. Par définition : la densité d’un tel débit est d’autant plus grande qu’il y a plus de particules par unité de débit ! Par ailleurs, plus ce débit est dense plus la distance entre deux particules voisines est petite.
    Autrement dit : cette densité et cette distance sont des grandeurs qui varient (par définition) en raison inverse l’une de l’autre. »

Or, nous venons de le voir, plus le débit est dense, plus l’énergie est grande et, plus sont donc proches, l’une de l’autre, les particules voisines qui le constitue. Plus est donc courte « la longueur d’onde ». L’énergie et la « longueur d’onde » sont donc bien ici en proportion inverse l’une de l’autre. De même concernant l’effet photoélectrique (qu’Einstein explique par l’action d’un quantum d’1 hν) il est facile de comprendre qu’il faudra une densité de particule minimum (liée à une intensité de débit spécifique) au contact de l’électron pour l’éjecter et que plus augmentera cette densité, plus la vitesse de l’électron éjecté s’en trouvera amplifiée. 
A présent essayons de comprendre la formation des bandes claires/obscures que l’absence d’onde n’explique plus. Pour ce faire il est nécessaire de se souvenir de l’effet de diffraction « de bord » en optique. Il se produit lorsqu’une lumière, à partir d’une source ponctuelle, « rase » le bord d’un écran comme on peut le constater sur le schéma ci-dessous. Si la lumière est assez « intense » on peut constater un effet de « franges » alternées claires et obscures à la limite de l’ombre portée et de la partie éclairée.

Détail
diffraction de bord


Voici l’interprétation qu’en donne Miedzianagora, partant de son hypothèse que la lumière est un flux de particules:

  1. « J’analyse cet effet de bord qu’est la diffraction, comme le résultat des changements de direction de certaines des particules engagées dans une telle situation.
    Une partie des particules dépasse l’écran sans le toucher. Je nomme cette partie : « A »

    diffractionA
    Une autre partie des particules heurte le bord de l’écran et est réfléchie vers l’avant, c'est-à-dire dans l’espace au delà de l’écran. Je la nomme : « B »
    diffractionB

    Des particules réfléchies de type B rencontrent, en les déplaçant, des particules de type A [et vice-versa]. (Des particules de typa A, déplacées par des particules de type B, rencontrent, au cours de leur déplacement, d’autres particules) ; Des effets de ces rencontres, résultent des franges, plus ou moins claires et obscures, observables sur un second écran posé en arrière du premier. »

La densité relative des particules A et B sont bien sûr déterminantes pour obtenir le phénomène ; celle de B étant d’autant plus importante que la lumière est rasante….

  1. « […] Il existe une proportion ad hoc entre particules de typa A et particules de type B qui est la condition nécessaire pour l’obtention des franges sur l’écran final. »

C’est exemple est la modalité la plus simple ; observons ce qui se passe lorsque le débit de particules rencontre un écran percé d’un petit orifice :

diffraction-trou

  1. « Les particules B heurtent, ici, le bord circulaire [les particules A passent bien sûr par l’orifice] ; En outre, dans cette situation, des particules de type B, ayant heurté une partie du bord circulaire, peuvent rencontrer des particules de type B, ayant heurté une autre partie de ce bord. » 

Il en va de même dans le dispositif de Young qui n’est qu’un doublement du précédent : Deux orifices séparés par une petite distance dont on fait varier respectivement le diamètre et la distance afin d’obtenir sur l’écran des franges dites cette fois ci d’interférences. Rappelons que :

  1. « C’est de la disposition et de la largeur de ces franges que dépend la grandeur de la distance de Young, cette distance, précisément, que l’on a nommé longueur d’onde. »

Sans la décrire ici (en renvoyant donc à son livre) la démonstration de Miedzianagora, permet d’expliquer l’apparition (ou non) des franges lumineuses observées dans l’expérience de Young et ce dans tous les cas de figures consécutifs à la modification possible des différents paramètres (diamètre des orifices, distance de la source lumineuse au plan percée, distance entre les trous, etc.). Cette conception de la lumière qui considère le photon comme un débit de particules (infraphotons) fourni, enfin, un modèle logique d’interprétation des franges d’interférence de l’expérience de Young.

  1. « Je crois, ainsi, avoir montré comment on peut se débarrasser de l’interprétation paradoxale des franges d’interférences. (Comment, en somme, on peut se débarrasser de ces difficultés paradoxales proposées par les concepts des « mécaniques » quantiques !)»

En 1938, dans un livre « L’Evolution des idées en physique » (Ed. Flammarion) coécrit avec Léopold Infeld, Albert Einstein déclarait ceci :

  1. « Les idées fondamentales jouent un rôle essentiel dans la formation d’une théorie physique. Les ouvrages de physique sont remplis de formules mathématiques compliquées. Mais c’est la pensée, ce sont les idées qui sont à l’origine de toute théorie physique. Les idées doivent plus tard revêtir la forme mathématique d’une théorie quantitative pour rendre possible la comparaison avec l’expérience. ».

Alors, 54 ans plus tard, la démonstration de Georges Miedzianagora (1992) n’est-elle pas, le début d’une splendide réponse aux questions écartées mais non résolues, subterfuge qu’Einstein ne se résigna jamais à entériner !

  1. « Je crois encore à la possibilité d’un modèle de la réalité, c.à.d. d’une théorie qui représente les choses elles mêmes et non pas seulement la probabilité de leur apparition »
    « Pour avoir voulu édifier une discipline n’ayant plus pour unique objet l’établissement de lois compatibles avec les faits expérimentaux, mais capable en outre, de les rattacher l’une à l’autre grâce à une réduction progressive des hypothèses de base en vue de tendre vers une théorie unitaire suprême, la physique du XXème siècle a engendré un sentiment de frustration répandu. On a assisté ensuite en effet, à une prédominance de plus en plus marquée de l’effort d’abstraction ainsi que des concepts intellectuels et métaphysiques, au détriment de toute considération de réalité objective dans les formulations axiomatiques des lois naturelles. » 36

Pour en apprécier la pleine mesure il nous faut aborder la seconde partie « [D]es dieux post-modernes » où son auteur, à partir de cette nouvelle conception corpusculaire de la lumière, renouant cette fois ci avec la pensée « atomiste » antique, propose enfin aux physiciens (sous influence) une théorie simple et unificatrice de la réalité des corps, celle à laquelle Einstein ne cessa, en fait, jamais de songer.
Miedzianagora pense ce nouveau modèle et nous entraine à sa suite dans un possible où tout devient compréhensible, où les relations de causalité décrivent logiquement les phénomènes sans avoir à enjamber d’irréductibles contradictions. Mais pour ce faire il lui faut au préalable, et nous avec, revenir à la philosophie fondamentale (comme il y a une recherche fondamentale…), celle qui s’occupe de l’essence de l’être, celle qu’Aristote définie ainsi :

  1. « Par conséquent, celui qui connait les êtres en tant qu’êtres doit être capable d’établir les principes les plus fermes de tous les êtres. Or celui-là, c’est le philosophe ; et le principe le plus ferme de tous se définit comme étant celui au sujet duquel il est impossible de se tromper…Evidemment, alors, un tel principe est le plus ferme de tous. Mais quel est-il ? Nous allons maintenant l’énoncer : Le même est incapable d’à la fois appartenir et ne pas appartenir au même, et, selon le même. »

Ce texte pose le principe (déjà évoqué plus haut) qui fonde tout acte philosophique. Une chose ne peut être autre chose que ce qu'elle est et ce qui est vrai ne peut être faux soit celui de l’identité de l’être et de non contradiction logique.Et puis tout particulièrement celui qui dit (déjà, au Vème siècle avant JC, par les voix de Parménide et d’Héraclite), que l’être ne peut être que de toute éternité, soit l’Axiome de conservation !
Ecoutons Parménide37 :

  1. «Il n’y a pas à redouter que jamais on te prouve que ce qui n’est pas, est. Et toi, éloigne ton esprit de cette voie de recherche. Il nous reste un seul chemin à parcourir : L’être est incréé, impérissable, car seul il est complet, immobile et eternel. On peut dire qu’il a été ou qu’il sera, puisqu’il est à la fois tout entier dans l’instant présent, un, continu.
    En effet quelle naissance lui attribuer ? Comment et par quel moyen justifier son développement ? Je ne te laisserai ni dire, ni penser que c’est par le non-être. On ne peut ni dire, ni penser que l’être n’est pas. Car s’il ne venait de rien, quelle nécessité eût provoqué son apparition ou plus tard ou plus tôt ? En effet l’être n’a ni naissance, ni commencement. Ainsi donc il est nécessaire qu’il soit absolument ou ne soit pas du tout. Nulle puissance ne persuadera de laisser dire que du non être pourrait naître quelque chose à côté de lui. […]Comment donc l’être pourrait-il venir à l’existence dans le futur ? Ou comment y serait-il venu dans le passé ? S’il est venu à l’existence, il n’est pas. Il en va de même s’il doit venir à exister un jour. Ainsi est éteinte la génération et la destruction est inconcevable. 

Et Héraclite :

  1. « Ce monde-ci, le même pour tous, nul des dieux ni des hommes ne l’a fait, mais il était toujours, est, et sera. »38

Et il ne s’agit pas ici, comme certains pourraient bien seulement l’entendre, d’une simple rhétorique, d’une logique purement formelle, qui par abus de langage, décrirait le réel par une correspondance usurpée. Mais bien du résultat d’observations, d’expériences et de réflexions que les humains ont accumulées au cours des âges et de processus mentaux logiques, substrats de notre capacité à connaître.
Pour tous ceux que l’abstraction apparente de ces deux citations rebuterait je leur conseillerais de remplacer « être » par « univers » et de se référer à ce qu’ils savent, par exemple, de la théorie du Big Bang. Comment penser que l’univers est issu d’un lieu ponctuel dans le néant ? S’il n’y avait rien « avant », le positionnement même de cette origine n’a lui aucun sens ! Pourtant, de nos jours, les physiciens s’acharnent à remonter au plus près de cet instant/espace avec le fol espoir d’en atteindre l’au delà où d’évidence ils ne peuvent que rencontrer,… Dieu !
Car le dilemme (celui que la théologie s’emploie à nous imposer…) s’exprime bien par, et uniquement par, cette alternative :
-Soit l’ « être » (l’univers comme totalité de ce qui est) a toujours existé, est eternel et donc, unique…
-Soit il provient, par nécessité, d’un au-delà de lui-même ce qui n’a de sens que pour des esprits assez faibles pour croire en « quelque chose » qui contiendrait cet univers donc, dans le même temps, en serait dissocié, extérieur ! Ce qui implique donc des réalités gigognes et détruit l’idée même du tout qu’elle prétend expliquer car l’existence de deux totalités est, par définition, une absurdité.
Ce qu’Aristote, par la voie de Simplicius39, avait aussi entériné simplement ainsi :

  1. « Et Mélissos40 a démontré à propos de l’être qu’il est le non engendré en usant de cet axiome commun : Toujours était ce qui était, et toujours il sera. Car s’il résultait d’une génération avant cette génération, c’eût été nécessairement le néant. Si cela avait été le néant, en aucun cas rien n’aurait pu en provenir. »

Il est important de remarquer que depuis lors ces principes et notamment le dernier « Ex nihilo nihil fit », s’ils n’ont plus jamais été contestés, même par les théologiens, n’ont, par contre, pas été rigoureusement appliqués.
Surtout parce qu’à peine énoncé, celui de la conservation offrait un paradoxe énigmatique :
Si l’univers est éternel comment expliquer le changement permanent que nous pouvons y constater ; la réponse antique commune à tous fut : Le mouvement… Les corps (ou choses) qui constituent le réel qui ne changent pas….peuvent changer de place ! Et le paradoxe n’étant pas une contradiction les physiques naturalistes et/ ou atomistes d’un côté et celles de Platon de l’autre ne pouvaient manquer d’y apporter des réponses, sans surprise, opposées.
Bien sûr, pour les seconds, ce mouvement ne peut que leur être imposé de l’extérieur par une intelligence qui les organise. Platon:

  1. « Il voulut en effet, le Dieu, que toutes choses fussent bonnes, et qu’il n’y eut rien de vil, dans la mesure du possible : ainsi donc, tout ce qu’il y avait de visible, il le prit en main ; cela n’était point en repos, mais se remuait sans concert et sans ordre ; de ce désordre, il l’amena à l’ordre, ayant estimé que celui-ci vaut infiniment mieux que celui-là. » (Timée) 

Il est toujours étonnant de constater l’illogisme consternant de l’idée d’un Dieu, anthropomorphe, maître d'œuvre de l’univers (avec ses petites « mimines »), à qui, de surcroit, l’on (en l’occurrence Platon) prête des jugements de valeurs (ordre/désordre) qui ne sont bien sûr que les siens. On a peine à penser qu’une intelligence, de son niveau supposée, puisse avoir cru et théorisé de telles billevesées.
Au moins Aristote, reprenant Anaxagore, se maintient-il dans le cadre de la litote :

  1. « Il y a dans la nature, comme chez les animaux, une Intelligence, cause de l’ordre et de l’arrangement universel. » (La Métaphysique)
    Par contre, pour les premiers, le mouvement est inhérent au corps et leurs possibles collisions expliquent ce que nous en percevons. Cicéron rapporte :
  2. « [Démocrite] croit que ce qu’il appelle atomes, c’est-à-dire corps indivisibles en raison de leur solidité, se meut dans le vide infini qui n’a ni haut, ni bas, ni milieu, ni extrémité, ni limite, de telle sorte qu’ils s’accolent au cours de leurs rencontres, pour former tout ce que nous voyons exister : il faut comprendre que ce mouvement des atomes n’a pas eu de commencement et est éternel. » (Des fins, La pléiade « Les Présocratiques » p.777)

Nous voilà de retour dans l’intelligible dont on peut, au passage et 2500 ans plus tard, admirer la pertinence! Pourtant ni Démocrite, ni son épigone Epicure ne pousseront le raisonnement jusqu’à y inclure les sentiments (les phénomènes) qu’ils dissocieront de la matière en nous en attribuant, à nous humains, la seule production.

  1. « La vraie réalité appartient à l’atome et au vide ; les autres propriétés que nous donnons aux choses, sueur, chaleur ou couleur, leur appartiennent simplement par convention. » (Démocrite rapporté par Sextus Empiricus, Contre les mathématiciens, VII, 135)

Et puis :

  1. « Et il faut encore penser que les atomes ne retiennent aucune qualité des phénomènes, en dehors de la forme, du poids, de la grandeur et de tout ce qui est nécessairement lié à la forme […] Car toute qualité change ; mais les atomes ne changent en rien. » (Epicure Lettre à Hérodote, 54)

Il est facile de repérer ici l’origine de la fameuse distinction Lockéenne entre « qualités premières » et « qualités secondes » que nous avons déjà évoquée ci-dessus; mais pour Locke, cette distinction, n’implique pas une véritable rupture avec le principe de conservation. Puisque « rien ne peut provenir de rien » il lui faut penser que les qualités secondes possèdent aussi une certaine objectivité même si elle ne peut être révélée que par la conscience que nous en avons. Si un corps existe en dehors de notre perception (la lune ne disparait pas si nous ne la regardons plus !) il ne peut, d’évidence, en être de même pour sa couleur, puisque, sans nous, l’idée de couleur n’existe pas ;  mais cela ne signifie pas qu’il n’existe rien de tangible et d’indépendant dans la matière, une fois « activé » par la lumière (ou l’inverse !), apte à produire en nous une perception différenciée pour chaque couleur :

  1. " Considérons la couleur rouge et blanche dans le porphyre41, faites que la lumière ne donne pas dessus, sa couleur s'évanouit, et le porphyre ne produit plus de telles idées en nous. La lumière revient-elle, le porphyre excite encore en nous l'idée de ces couleurs. Peut-on se figurer qu'il soit arrivé aucune altération réelle dans le porphyre par la présence ou l'absence de lumière ; et que ces idées de blanc et de rouge soit réellement dans le porphyre, lorsqu'il est exposé à la lumière, puisqu'il est évident qu'il n'y a aucune couleur dans les ténèbres ? " (Essai sur l’entendement humain : De la Puissance. Liv. II.)

De là à étendre à l'esprit et aux idées elles-mêmes, il n’y a qu’un pas dont Locke ne se prive pas :

  1. « Jusqu’ici j’ai exposé comme dans un petit tableau nos idées originales d’où toutes les autres viennent, et dont elles sont composées. De sorte que, si l’on voulait examiner ces dernières en Philosophe, et voir quelles en sont les causes et la matière, je crois qu’on pourrait les réduire à ce petit nombre d’Idées primitives et originales, à savoir,
    L’Etendue, la Solidité, la Mobilité ou la Puissance d’être mû.
    Idées que nous recevons du Corps par le moyen des Sens :
    La Perceptivité, ou la Puissance d’apercevoir ou de penser,
    La Mobilité, ou la Puissance de mouvoir. (Qu’on me permette de me servir de ces deux mots nouveaux, de peur qu’on ne prît la ma pensée si j’employais les termes usités qui sont équivoques dans cette rencontre.)
    Ces deux dernières Idées nous viennent dans l’Esprit par voie de Réflexion.
    Si nous leur joignons :
    L’Existence, la Durée et le Nombre,
    qui nous viennent par les deux voies de sensation et de réflexion, nous aurons peut-être toutes les idées originales d’où dépendent toutes les autres. Car par ces idées-là, nous pourrions expliquer, si je ne me trompe, la nature des couleurs, des sons, des goûts, des odeurs et de toutes les autres idées que nous avons; »
    (« Essai sur l’entendement humain »)

Sa modestie, vu la puissance du raisonnement, laisse rêveur, comparée tout particulièrement aux certitudes erronées et dogmatiques de tous ses détracteurs (Berkeley, Leibniz, etc.).
Ceci bien en mémoire, revenons au présent et à l’état de la physique post-quantique…qui, c’est un fait avéré, ne prétend plus (ne s’intéresse même plus !) à ce questionnement pourtant fondateur… Et qui le dit ? Ernst Planck !

  1. « … il n’y a plus maintenant, sur le terrain scientifique, pour ainsi dire, aucun principe dont la validité n’ait été mise en doute : il n’y a pas une extravagance qui n’ait trouvé des partisans….assaut d’un scepticisme qui ébranle tout. (« Initiation à la physique », Flammarion, 1989, p.205)
    « …la conception de l’univers selon la physique n’est-elle qu’une création arbitraire de notre esprit ou bien devons-nous affirmer, au contraire, qu’il y a des phénomènes naturels tout à fait indépendants de nous ? […]Après tout ce que je viens de dire on comprendra aisément que je réponde affirmativement : mais je ne me le dissimule pas, ma réponse va, dans une certaine mesure, à l’encontre de certains courants d’opinion philosophiques auxquels l’autorité d’Ernst Mach a donné beaucoup de prestige, précisément dans les milieux scientifiques. Suivant cette opinion, il n’existe pas d’autre réalité que nos propres sensations. » (pp. 33,34)
    « Mais il a dépassé la mesure, car en rabaissant les prétentions du mécanisme, il a dégradé en même temps l’idée que la physique doit se faire de l’univers. » (p.36)

Ce que Miedzianagora résume très clairement ainsi :

  1. « La philosophie – geste des amateurs de la connaissance pour elle-même – a été remplacée par la technique – geste des amateurs de l’utilisation des connaissances comme outils de production. Et aujourd’hui, la doctrine officielle du « Club » des physiciens rejette l’objectif des amateurs de la connaissance. Il ne s’agit pas de répondre à l’étonnement par des raisons acceptables. Il ne s’agit pas de comprendre l’exacte nature des choses. Il s’agit de mesurer les effets, de combiner, dans les calculs, les résultats des mesures. Mais surtout, il s’agit de ne plus poser de questions d’amateurs de la connaissance pour elle-même. »

Et, implacablement, poursuit par cette affirmation :

  1. « Nous voulons, au contraire, reprendre le projet, reprendre l’ « Aufklärung »42. Poser des questions raisonnables et y répondre. Comment agit une force, en quoi consistent : elle et son action ? En quoi consiste la lumière ? Comment expliquer les propriétés communes à la lumière et à la masse et leurs propriétés non communes et cela alors qu’elles transmutent incessamment ? »

Alors que savons-nous ?

  1. Principe d’identité et de conservation ; « ce qui est, est », « ce qui n'est pas, n’est pas » et « rien ne se crée, rien ne s’anéantit ». Le « changement » est et n’est que le déplacement de ce qui ne change pas.
    « Et ce que les physiciens du XXe [et pire encore ceux du XXIe] ne savent plus, ou ne veulent plus savoir : Il y a du corps ! « 
    « Voici le peuple des choses physiques. Trois classes s’en font le partage : masses, lumières, forces. En une alchimie non-conçue, aux conséquences exactement mesurées, masses et lumières transmutent. En un non-conçu mécanique, les forces vont des masses aux masses, tantôt elles repoussent tantôt elles font l’inverse. Tandis que les « ondes de probabilité » portent leur impact quantique ! »

D’où les questions:

  1. « Quel est l’être des choses physiques ? Autrement dit : que sont les choses physiques ?»

A présent nous avons à notre disposition l’hypothèse opérationnelle que les « photons », associés à la lumière par Planck et Einstein comme « paquets » d’énergie élémentaire (ou quanta de rayonnement électromagnétique) puissent, eux même, être composés d’infraphotons. Ces derniers (cf. p.44) sont considérés comme des particules toutes identiques ; et seule la variation de leur densité de flux à un instant donné différencie une lumière d’une autre…
Alors les masses (ou corps):
Comme la sagesse antique l’avait déjà décrit et la physique contemporaine le confirme tous les corps se transforment les uns dans les autres : Ils transmutent ! De la masse peut devenir lumière et vice-versa (E= mc2). Il est donc possible d’en déduire logiquement que les deux, en dépit de leur discontinuité apparente, possèdent une identité commune ;

  1. « Pour identifier cette élémentarité commune, il suffit de considérer que les corps composant les lumières en viennent, dans certaines circonstances, à la situation topologique, où on les reconnait comme des masses. Pour comprendre ce changement topologique des infraphotons, il suffit de supposer qu’une courbure ou un redressement peut s’imposer à la forme de ces corpuscules. »

Le schéma ci-dessous en donne une représentation très simple mais explicite. Si le flux d’infraphotons s’incurve selon un arc de cercle on est en droit de supposer qu’ils aboutissent ainsi à former « masse ».

de la masse à la lumiere

Sachant que chaque particule (ou infraphoton) est doté, de quatre propriétés, inaliénables et indissociées :

  1. 1) la même quantité d’énergie
    2) la même célérité
    3) la même quantité de volume
    4) une orientation commune impliquant un « avant » et un « arrière » ;

et que passer du trajet en ligne droite à celui incurvé ne modifie en rien ces quatre propriétés, il devient évident qu’une lumière incurvée peut ainsi acquérir toutes les propriétés des masses. Par ailleurs et par observation, on sait, que la lumière est sensible à la gravitation et s’incurve par exemple à proximité d’un trou noir. Cette inertie latérale ne peut que se conserver à l’état de masse et explique ainsi la sensibilité de ces dernières, aux mêmes effets.
A l’inverse, à partir d’une masse, la courbure des infraphotons se « redressant » en ligne droite permet d’expliquer sa transmutation en lumière… ;

  1. « Dès lors, nous n’avons plus que deux genres de choses en physique : les corpuscules et les « forces » ! Les mêmes corps, droits ou courbés, et les « forces […] On a ainsi repéré, conformément aux principes, ce qui se conserve.»

C’est le principe de non-création, non-anéantissement (« ex nihilo, nihil fit ») qui est à la source de la 4ème propriété. Pour qu’une particule (comme tout autre corps en mouvement) puisse inverser, instantanément, le sens de son déplacement il lui faudrait anéantir son mouvement puis le créer dans le sens opposé. Cela supposerait qu’il ne soit pas inséparable de cette particule et qu’en quelque sorte elle en soit seulement le réceptacle, une fois dans un sens et une fois dans l’autre.
Difficilement concevable! Pourtant l’indissociabilité d’un mouvement orienté et d’un corps n’a jamais été théorisée ; a contrario, on explique le déplacement d’un corps par un autre par suite d’un transfert d’énergie cinétique consécutif à leur collision. Tel que nous pouvons l’observer par exemple suite au choc de deux boules de billards. Mais si l’on considère ces deux masses comme « amas cinétique d’infraphotons », ce qui (nous venons de le voir) n’est envisageable que si les quatre propriétés se conservent, le transfert de mouvement alors impossible devra être remplacé par un transfert d’infraphotons d’une masse à l’autre sans que chacune d’entre elles ne perde sa spécificité.
On peut par exemple imaginer, pour chaque corps, un redressement ponctuel d’une certaine quantité de particules, provoqué par le « choc » et proportionnel à son intensité (soit à la vitesse conjuguée des deux corps en mouvement opposé), puis réabsorbée (réincurvée) dans le même instant par son vis-à-vis, lui « insufflant » en quelque sorte ainsi le mouvement dont elle est toujours détentrice, donc inverse au sien. Le principe de conservation s’en trouverait préservé…43
A présent les « forces » :

  1. « Parmi les ignorances les plus anciennes et les plus fondamentales de la physique des Temps modernes, il y a celle de la nature réelle des « forces ». La « force » fut, d’abord, considérée comme une cause inconnue, ensuite comme une cause inconnaissable, puis comme une cause sur laquelle il ne faut pas s’interroger
    Ignorance ancienne, constante et fondamentale ; quatre forces sont reconnues dans les équations fondamentales de la physique contemporaine :
    La gravitation, l’électromagnétique, l’interaction faible et l’interaction forte.»

Ces noms recouvrent encore une fois l’incompréhension profonde dont ils définissent pourtant les effets. La notion de « champ » sert d’explication ultime alors qu’elle ne répond en rien à la question : Qu’est ce que la force ? Elle permet cependant d’en prévoir les effets sur les corps ce qui pour les physiciens est à présent amplement suffisant et autorise de penser que cette question ne se pose plus.

  1. « Il s’est établi, d’après la conception de Faraday, à côté du point matériel et de son mouvement [un corps], une nouvelle espèce d’objets physiques réels, à savoir le « champ » ; on a d’abord cherché à concevoir ce dernier, en s’appuyant sur la conception mécanique, comme un état (de mouvement ou de contrainte) mécanique d’un milieu hypothétique (l’éther) qui remplirait l’espace. Mais comme, malgré les plus optimistes efforts, cette interprétation mécanique n’a pu réussir, on s’est, peu à peu, habitué à concevoir le « champ électromagnétique » comme le dernier élément irréductible de la réalité physique. Nous sommes redevables à H. Hertz d’avoir dégagé, en connaissance de cause, le concept de champ de tout accessoire tiré du fond des concepts de la mécanique. » (Albert Einstein, « Comment je vois le monde », Flammarion, 1958, p.190)

Rappelons que les « forces » agissent au sein de deux espaces distincts bien qu’intriqués : l’infiniment grand et l’infiniment petit ; celui des planètes et des astres pour la gravitationnelle et celui subatomique (électrons/noyaux des atomes) pour l’électromagnétique. Cette dernière ayant un double caractère ; en plus d’attirer

  1. La « force » à la vertu d’agir comme les effets de son action le démontrent, elle attire parce qu’elle est puissance d’attirer ! La vertu de l’opium étant de faire dormir, il fait qu’on dort ! Ces mots faisaient rire…aujourd’hui on ne rit pas. On consacre plutôt le mystère des essentielles essences…dont les vertus sont manifestées par les effets qu’elles produisent !»

Du temps de Newton et face à la même démission, Voltaire s’insurgeait déjà, en dénonçant les implications théologiques. Car dès que la science ne prétend plus comprendre, Dieu s’engouffre dans le vide ainsi laissé…

  1. « Les physiciens sont devenus les héros de la providence : un catéchiste proclame Dieu aux enfants et un Newton le proclame aux sages […] Toute la philosophie de Newton conduit nécessairement à la connaissance d’un être suprême qui a tout créé, tout arrangé librement…Si la matière gravite comme cela est démontré, elle ne gravite pas de sa nature, ainsi qu’elle est étendue de sa nature ; elle a donc reçu de dieu la gravitation. Si les planètes tournent en un sens plutôt qu’en un autre, dans un espace non résistant, la main de leur créateur a donc dirigé leur cours en ce sens avec une liberté absolue. » (Voltaire, cité par N.Hampson, Histoire de la pensée européenne, le siècle des lumières, coll. Point. Seuil.1972)

Cette condamnation, sans appel, d’un des esprits les plus éclairés de ce XVIIIe siècle, qui nous dit qu’une science qui mène à Dieu ne mérite pas plus de considération qu’un catéchisme, devrait encore retentir sèchement aux oreilles de nos philosophes « dits » modernes si peu enclins à s’interroger sur le bien-fondé et l’aboutissement de nos sciences, « dites », elles, exactes ! Mais au XVIIIe la théorie de Newton crée un schisme car elle est en contradiction avec le principe de conservation : rien ne se crée de rien ; Or sa « force » crée le mouvement des planètes et des astres ou/et sa variation « ex nihilo » ! Impensable pour les Cartésiens qui forts de l’axiome d’identité éternelle des physiciens grecs, alors réactualisé, qui affirmait l’éternité de l’univers et de tout ce qui le compose, considéraient qu’ :

  1. « Un corps en mouvement poursuit à jamais ce mouvement à la même vitesse, si aucune cause extérieure n’intervient pour le modifier. »

Y déroger impliquait de régresser vers les conceptions Platoniciennes et Aristotéliciennes qui croyaient à la genèse du mouvement à partir d’un « moteur immobile » ; Dieu, bien évidemment !Pourtant l’efficacité des calculs de Newton et la justesse de leurs prévisions ne pouvaient être niées... Avant-goût de ce qui se passerait deux siècles plus tard avec la mécanique quantique, et Voltaire passant, on se résigna ; et à cette « force occulte» qu’il fallait bien admettre, on en ajouta d’autres aussi mystérieuses pour finalement aboutir aux quatre précités.

  1. « L’habitude de ne pas savoir devenant par la vertu du temps qui passe…une explication. Dès lors qu’on ne pose plus une question, il peut sembler en effet que cette question ne se pose pas

Rien n’a donc bougé et, aujourd’hui, cette « force » mystérieuse l’est toujours tout autant ! Si nous savons, évidemment, bien mieux calculer et prévoir, pas la moindre avancée sur ce qui agit et comment cela agit ? Comment, d’ailleurs, pourrait-il en être autrement puisque ces questions sont à présent obsolètes voire même tout simplement « ringardes »…
Seul, Miedzianagora qui n’a pas renoncé, poursuit mordicus son intraitable logique !

  1. « On peut supposer que l’action que l’on attribue, en physique, à ces « forces » est elle-même, en dernière analyse, celle des infraphotons (i.ph.)44. »

L’on n’a pas oublié que ces « corps lumières » sont éternels, qu’ils possèdent une certaine étendue (volume) et sont indéfectiblement associés à la quantité de mouvement qui les anime et dont, de plus, la vitesse (la célérité) est ultime et constante (c= 299 792 458 m/s). Et, considérant que toute notre perception du réel est conditionnée à l’existence de la lumière, de notre point de vue donc, omniprésents.
Ce qu’en quelque sorte, corroborent la recherche et la découverte fortuite en en 1964 d’une sorte de rayonnement fossile interprété, dès lors, comme une preuve de la théorie du Big Bang.45

  1. « En 2010, le fond diffus cosmologique reste toujours un sujet de recherche extrêmement actif du fait qu'il est censé donner un aperçu de l'Univers tel qu'il était très peu de temps après le supposé Big Bang, environ 380 000 ans plus tard » (sic !) (Sc. Wikipédia). On en produit même des « photos » ; image serait certainement un terme plus approprié tant ces représentations technologiquement artificielles font plus appel à l’imagination qu’à l’observation objective d’un phénomène avéré. Jugez-en par vous-même !
rayonnement fossile
Carte du fond diffus cosmologique du ciel
en entier, duquel on a soustrait la lumière
de la voie lactée ; ce rayonnement a été émis
il y a 13,77 milliards d'années et démontre
des variations de températures
de l'ordre des microkelvins.

Alors pour Miedzianagora, vous l’aurez pressenti, il ne s’agit, ni plus ni moins que de la preuve de l’omniprésence d’une lumière (i.ph.) universelle. Et cela ne peut que conforter l’hypothèse étonnante mais explicite qu’il propose pour expliquer d’abord le « champ de forces » électromagnétiques et qu’il expose ainsi:

  1. « Ces atomes d’étendue mouvante sont responsables de l’action attribuée aux « forces » magnétiques et gravitationnelles. […]
    Dans le cas des « champs de forces » électromagnétiques :
    Des Collisions entre i.ph et électrons et des collisions entre électrons semblent pouvoir expliquer les effets de répulsion et d’attraction propres à l’action attribuée à ces champs de forces. ».46« 
    Cette mécanique, fondée sur l’émission i.ph et les collisions subséquentes, entre i.ph et électrons, électrons et électrons, flux d’i.ph et masses subatomiques, est propre à rendre intelligible l’action des « forces » électromagnétiques. Au lieu d’une action attribuée à une « force » nous avons des actions produites par des i.ph et les collisions d’électrons. Bref, nous comprenons ce qui se passe. Nous n’avons plus désormais à attribuer les effets reconnus à des réalités-forces- mystérieuses. […et bien qu’...] il reste à accomplir dans le détail ce programme d’explication, à déterminer le type de configurations propre aux matériaux ferromagnétiques et autres, correspondant à une telle mécanique […], l’explication proposée ne contredit ni les faits ni les lois de la physique. Simplement, on en revient à expliquer et comprendre ce qui se passe. »

Et maintenant la « force » de gravitation : 1038 fois plus faible que l’électromagnétique !
Ici la notion de « fond diffus cosmologique » vient encore le servir… En effet, en y superposant l’idée de l’omniprésence d’un flux d’i.ph éternels et omnidirectionnels, on parvient se représenter l’univers comme un « bain » infini, sans origine et sans fin, de lumières/corps (étendues) en perpétuel mouvement à vitesse constante (C) dont tout « être » procéderait ; une totalité enfin, physiquement compréhensible !
De là, chaque corps/masse (planètes étoiles) en résultant y demeure soumis à une pression constante provenant de toute part et le soumet à « une action d’accélération nulle ».

  1. « Mais dès que des masses voisinent sous ce rayonnement, elles définissent, dans l’espace qui les sépare, une région où l’accès du rayonnement universel est modifié. »

Il est facile de se le représenter en tant qu’ « ombre portée » et de comprendre que les surfaces ainsi définies (les « ombres » réciproques que chacune d’entre elle produit sur l’autre) recevront une quantité moindre d’ i.ph et qu’ainsi un « tunnel » de moindre résistance entre ces masses sera généré. Et que, par conséquence, elles auront tendance à se rapprocher :

  1. « En raison des masses, en raison inverse du carré de la distance qui les sépare ! » (Loi de newton)

Et aussi l'interaction électromagnétique au sein de l’atome :
Bien que le modèle subatomique corresponde, grosso-modo, à celui des planètes gravitant autour des étoiles, la petitesse des masses respectives des électrons et du noyau, corrélée à la très faible distance qui les séparent n’a pas permis aux physiciens de lui appliquer la loi de la gravitation. Ils ont donc fait appel au champ électromagnétique et depuis la mécanique quantique à une nouvelle sorte de particules : « Les virtuelles » ! Concept qui mérite certainement un petit détour tant « elles » sont emblématiques de ce que l’on ne peut nommer autrement que l’ « imposture quantique ». Comme l’on peut le constater en consultant la note ci-dessous47 il s’agit, ni plus ni moins, que de postuler l’existence (la non-existence ?) de particules qui peuvent « être » « en  dehors des lois », en parfaite contradiction avec tous les principes fondamentaux (viol de celui de la conservation, apparition/disparition, etc.) en toute quiétude épistémologique puisqu’elles sont (et la formulation est des plus cocasse !), « compatible avec les relations d'incertitudes » !!! C'est-à-dire qu’elles sont censées donner « corps » aux élucubrations mathématiques qui sont forcées de les prédire pour demeurer cohérentes… Et depuis on les cherche, tout particulièrement le boson de Higgs 48
Pour Miedzianagora tout est un peu plus simple !
Il rappelle d’abord que, par exemple pour un atome d’hydrogène, la masse de son électron est 1840 fois petite que celle de son noyau, mais qu’ils ont une « étendue » similaire de l’ordre de 10-12 m.

  1. « Autrement dit, l’électron pour une même surface extérieure comporte 1840 fois moins de masse-matière que le noyau. Dans la mécanique de gravitation supposée ici, c’est précisément la quantité de surface inerte-massive atteinte par les impulsions des i.ph qui définit la quantité des chocs reçus ! »

Deux sphères de même diamètre, donc de même surface, dont l’une serait 1840 fois moins « lourde » que l’autre! On comprend aisément que cette dernière soit beaucoup moins déplacée par les chocs des i.ph et soit d’une bien plus grande « stabilité ». Le nouveau principe de gravitation semble donc, également ici, apte à comprendre et expliquer ce qui se passe réellement…Et ca continue !

  1. « On retrouvera ainsi la propriété einsteinienne de non instantanéité de l’action de la « force » de gravitation ;49 c'est-à-dire du champ gravitationnel. La vitesse C de sa propagation étant celle précisément des infraphotons, lesquels sont ici les auteurs des effets de champ. »
    « On retrouvera ainsi l’inflexion de la trajectoire de la lumière par la « courbure de l’espace temps ». Les i.ph passant au voisinage d’une masse, étant donné l’ombre portée par celle-ci, ne sont heurtés (latéralement) que par des i.ph venus des directions d’où cette ombre ne porte pas. Ils ne sont pas « attirés par le champ de gravitation d’une telle masse » ; leur trajectoire ne suit pas la « courbure » que cette masse impose à l’espace temps à cet endroit là. L’i.ph n’a pas, non plus « choisi » le chemin le plus court qui serait courbé, il a été latéralement déporté ! »

Soit « poussé » par les i.ph extérieurs vers la masse (c’est moi qui rajoute !). Et Miedzianagora clos ce chapitre ainsi :

  1. « De ces façons, on en vient donc fermement à l’espoir de pouvoir ramener l’ensemble des effets physiques à la composition de ceux des i.ph ! Ceux-ci ont deux caractéristiques pertinentes à cet égard :
    1) des propriétés constantes d’impulsion énergétique, de célérité et de quantité de volume
    2) une topologie variable qui les met tantôt sous la forme massive tantôt sous la forme des lumières »
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Et puis dans les 10 dernières pages de cet extraordinaire ouvrage qu’est ce « Manifeste pour la transparence de la science », Miedzianagora nous accompagne et nous instruit de ses ultimes déductions. Et, comme c’était prévisible, il soutient que ce qui est à présent validé pour les « corps » doit pouvoir l’être pour la « conscience », le « sentiment », la « pensée ». Et qu’en appliquant, sans défaut, toujours les mêmes principes (identité, conservation) il est possible, (enfin !), de s’extraire du Dualisme, d’unifier le psychisme et la corporéité. Il introduit son argumentation par deux citations (en fait une dédoublée !) qu’il me faut, d’évidence, reproduire ici, tant elles relient cette partie de mon texte à son intitulé ;
Descartes d’abord :

  1. « Ce que c’est que penser.
    Par le mot de penser, j’entends tout ce qui se fait en nous de telle sorte que nous l’apercevons immédiatement par nous-mêmes ; C’est pourquoi non seulement entendre, vouloir, imaginer, mais aussi sentir, est la même chose ici que penser .»
    (Les principes de la philosophie, I, 9 ; La Pléiade, op.cit. p. 574)

Que Spinoza reprendra à son compte, mots pour mots :

  1. « Définitions
    I. Par le mot pensée je comprends tout ce qui en nous et dont nous avons immédiatement conscience.
    Ainsi toutes les opérations de la volonté, de l’entendement, de l’imagination et des sens sont des pensées. » (Les principes de la philosophie de Descartes. Pléiade. Œuvres complètes. P.196)

Nous savons d’expérience que notre conscience est « changeante », que des superpositions de sentiments parfois même contradictoires « nous habitent » et que notre perceptivité (comme l’invente Locke) recouvre l’ensemble des sensations qui nous parviennent et nous mobilise (également de lui), nous font bouger. Pourtant quoi qu’il se passe en nous nous restons indéfectiblement nous-mêmes, en quelque sorte identiques à nous-mêmes. Pour chacun d’entre nous, la conscience que nous avons de nous même, est insécable, impartageable, intransposable. Elle est unique et fonde la distinction entre chaque individu, son ontologique identité. L’idée de la « télépathie », comme réceptivité à autre que soi, est une absurdité ; l’esprit d’un être humain ainsi doté, soudain submergé, n’y résisterait évidemment pas et se désintégrerait instantanément.
Mais nos sentiments changent, évoluent, modifient en permanence ce qui nous constitue et ne peuvent être créés « ex nihilo ». Bien qu’ils puissent se succéder, le sentiment de colère ne peut surgir directement de celui de la peur, ou la sensation de froid de celle de la solitude !
Cela impliquerait, dans le même instant, l’anéantissement de l’un et la création de l’autre ce qui est exclu par nos principes ! A s’en tenir à eux il nous faut donc trouver ce qui « change de place » sans altération d’identité.
Mais (ici, et ce n’est peut être pas si étonnant, le langage nous renseigne…), la conscience, peut être dite composée d’états ; il nous suffit alors de supposer qu’eux, ne changent pas.

  1. « Dès lors, la vie de la conscience, dans sa complexité, et sa variété est circulation d’états, restant identiques à eux-mêmes, venant ici puis allant là ; ces états configurent, sont ensemble, se dispersent, etc. et forment ainsi le « flux » de notre expérience vécue. 
    De cette façon, on peut penser la nature de notre conscience sans contradiction ; sans supposer que l’identique n’est pas identique ! Ou qu’il y a création et anéantissement !
    Mais si sentir est forcément états, chacun identique à soi, et configuration de ceux là [alors] comment comprendre que nous puissions, par notre conscience être averti de l’existence d’autre chose qu’elle ?»

Pour répondre à cette difficulté Miedzianagora émet l’hypothèse, au premier abord déroutante, mais imperturbablement logique, que puisque les sentiments changent cela implique que « ce » qui les constitue a changé de place ! Et que ces changements de place sont consécutifs à d’autres changements de place qui ont eu (ou ont) lieu en dehors d’eux. Sans, pour autant, retourner à la thèse des atomistes grecs qui considéraient que « les sentiments ne sont que des corps et du mouvement de ces corps », ni que les corps, « dépourvus de sentiment en produisent »,il est possible de penser que le sentiment est l’occupant d’un lieu. Comme, il l’a déjà été démontré, l’impénétrabilité des corps est un fait et ne peut être démenti sauf à régresser en théogonie ; Il est de même alors possible de postuler que deux sentiments ne peuvent se trouver, en même temps, à la même place….

  1. Nous, humains, passons d’ailleurs successivement d’un état à un autre ; et bien qu’il soit possible pour un acteur de simuler une complexité contradictoire de sentiments, notre expérience intime nous montre qu’il est impossible (sinon à sombrer dans la folie), d’être réellement submergé par deux émotions profondes antinomiques (comme, par exemple, la joie et la désolation).

Pour qu’un sentiment s’installe à la place d’un autre sentiment il faut donc que ce dernier la quitte du fait de son impénétrabilité… « Autrement dit, l’être, où sont les sentiments, comporte l’étendue, l’antitypie.50 ». La conscience peut donc être vue comme le lieu où les êtres-sentiments, comme une gamme qui la compose, peuvent se déplacer constituant aux grès de nos expériences la partition variée de nos sentiments. La perception, comme réceptivité à une autre conscience que soi, apparait alors, comme l’intelligible modification de cette partition induite indirectement par cette conscience là. Ne peut-on y voir alors et tout simplement la description de l’empathie ?

  1. « On avait considéré la perception comme une « vertu » : « Les esprits perçoivent », « ils sont affectés ». Les molécules perçoivent, « elles sont averties de la présence des autres molécules ». Mais l’identité et le changement de la substance esprit ou molécule, étaient impliqués par cette façon de dire. Avec les contradictions que cela impliquait, être le même et changer ou avec la création et l’annihilation que cela impliquerait.
    Bref, l’analyse existentielle, selon les deux principes axiomatiques, révèle que notre être conscient n’est pas ontologiquement parlant « conscience de », « perception de » ou « être à » mais sentiment identique à soi. Ce n’est qu’indirectement que nous nous apercevons de l’existence des autres choses. Un être non créé, non anéanti, ni en tout ni en partie, est un être qui ne change absolument pas. Même s’il a changé de place, il reste le même. Un tel être si il sent, sent toujours la même chose, ne sent pas tantôt ceci ou cela. »
    « Des êtres sentent toujours la même chose, de toute éternité, les déplacements de ces êtres là, configurant, font notre situation conscient. »

Ainsi Miedzianagora aboutit à mettre en parallèle d’une part la réalité des choses physiques comme étant celle (et uniquement celle) des infraphotons formant masses et/ou lumières et d’autre part la réalité des êtres conscients comme étant celle (et uniquement celle) « de sentiments constants, identiques, éternels, configurant ensemble notre existence consciente ».

  1. « Comment résister alors à reconnaitre que ces deux sortes de réalités élémentaires- physique, consciente – sont une seule et même sorte d’êtres ? »

La dichotomie entre « qualités premières » et « qualités secondes » s’en trouve enfin résolue dans le respect rigoureux des deux principes d’identité et de conservation et renouant avec le programme antique de connaissance affirme l’évidence de l’élémentarité de l’être, d’une éternité élémentaire du monde.
Paradoxale ? Certainement puisque notre « façon de penser » est brutalement contestée, que cela remet radicalement en question la « doxa » qui règne indûment et aliène le monde depuis plus de vingt siècles mais non contradictoire car indubitablement cohérent, logique, intelligible à l’inverse d’un modèle non explicatif essentiellement fondé sur la croyance en l’universalité divine !

  1. « La réalité est faite de cette élémentarité qui est à la fois sentiment, corps et mouvement. Masses, lumières, forces et sentiments : Myriades d’êtres d’un genre unique ! »

Tout se réduit soudainement à une seule substance, omniprésente et éternelle (qui a donc toujours été et ne peut s’anéantir), corpusculaire (qui a du corps, donc étendue et massive), pourvue d’une indéfectible et constante célérité et pouvant être considérée comme l’emplacement ultime et impénétrable du sentiment.

  1. « Car le pensé et l’être sont une même chose. »
    Parménide (544 à 450 avant « notre » ère)

Nous voilà définitivement sorti de l’ « Idéalisme anthropocentrique », enfin analysé et compris uniquement pour ce que nous sommes, un agencement d’énergie matière élémentaire dont seule la complexité organisationnelle est apte à générer la forme et la conscience… Finis les arrières mondes, l’au-delà, les mystères incompréhensibles et de ce fait érigés en dogmes, l’être et le non-être, cette réalité issue du néant et prompte à y retourner. Une seule chose présente au monde, déjà évidente pour toutes et tous comme génératrice de la vie, de l’ « être » au monde : La lumière : Le toujours étant !

  1. « Et si l’on trouve « un peu facile » le fait de supposer la gamme des « sentiments atomiques » - en effet les supposant, il est « facile » de comprendre qu’ils soit combinés ensuite en divers « mélodies » - qu’on se dise que cela fait peu de choses…supposées. » 
    [Car…] « Cette façon de comprendre est très étonnante, en effet, cependant elle rend moins étonnante l’unité du monde.»
    « Quoi de plus simple, de plus élégant, qu’un monde à une seule identité ?»

Et puis qu’elle magnifique adéquation entre notre ressenti le plus intime, le plus « ontologique » et cette sublime théorie. Sans lumière, qu’existe-t-il ?
A l’admettre et le comprendre, par nos sens, nos cellules, nos molécules, nos atomes, tout contribue…Nous sommes lumières, nous ne pouvons être que lumières51, car, même si, dans ces temps qui s’obscurcissent, nous commençons à en perdre le(s) sens, la lumière est partout dans le vide et le néant n’existe pas (ce qui est, au demeurant, une tautologie!). Imaginer un monde sans lumière n’a aucun sens ; « êtres de lumières » nous ne pouvons que demeurer êtres de lumières ! (bien plus enthousiasmant que « Souviens toi que tu étais poussière et que tu redeviendras poussière »). Seul l’agencement qui nous constitue peut être changé (ce qui d’ailleurs s’opère en permanence), la variabilité de nos états physiques et conscients en témoignent ; Et, in fine (et pour en rire un peu !) ce que nous nommons la mort n’est peut être, somme toute, qu’une «nouvelle partition » dont nous ne connaitrons la musique qu’une fois par elle structurés !

  1. « C’est quand le principe d’identité se conjugue avec la [certitude] de la non création et du non anéantissement qu’il devient l’expression de la réalité des choses elles mêmes. Il devient alors le principe général de la conservation de la réalité : L’expression d’une connaissance. »

Au côté de Georges Miedzianagora nous venons de faire un extraordinaire voyage, qui de manière rigoureuse et logique ré-ouvre la porte du savoir, de l’intelligence et nous ramène, à la source de tout, en définitive, au sens exact du mot, « lumière » ! Celui qui, dans nos esprits, a toujours été et continue de demeurer (bien que toutes les religions se soit acharnées d’en usurper et polluer le sens)52 l’équivalent de : « connaissance ». Comment pourrait-il, d’ailleurs, en être autrement, et nous le comprenons mieux à présent, tant il est évident que ces deux termes n’exprime qu’une seule et même réalité, notre ontologique identité ! Et que nous touchons, oserais-je dire, « originellement », à ce qui saiten nous…Soit pour le dire autrement, que nous avons enfin là, matière à tenter de répondre à la question « qui pense quand je dis je pense ? » et, cela surtout sans perdre notre liberté. Car ce déterminisme structurel n’est constitutif d’aucune idéologie, d’aucun idéalisme. Il n’est pas moral ! Il est purement objectif, matériel. La conscience est un état de réceptivité au monde et à d’autres consciences. Il n’y en a pas de bonnes et de mauvaises ! Nous, humanité, n’avons de compte à rendre qu’à nous-mêmes et soudain tout devient différent. Notre responsabilité est immédiate, entière, irréversible. Nous ne serons pas jugés « post mortem » pour décider de notre sort dans l’ « au-delà », et, en fait « rien », à part nous même, n’est à même d’évaluer nos actes, nos existences, notre présence au monde ! Les règles théologiques, sensées contenir nos animales pulsions, nous ont d’abord, en les masquant et/ou les pervertissant, dépossédé de nos origines cosmiques. Leur premier but est de mettre un écran entre le réel et nos sens ; d’éviter que le caractère brutalement subversif de la conscience éveillée à sa nature ne balaye tous les pouvoirs religieux et séculiers, soudain révélés dans toute leur imposture et leur stupide absurdité. Des « atomistes antiques » aux « philosophes des lumières » il est facile de constater la somme d’énergie déployée pour endiguer, par tous les moyens, l’émergence ou la réapparition d’une conception de l’existant débarrassée de toutes mythologies, légendes ou autres balivernes dont finalement le seul but est de maintenir le peuple dans l’insignifiance et l’immaturité.
Mais, aujourd’hui, après plus de vingt siècles de catéchisation et de prosélytisme mensonger, force est de constater que plus l’enracinement de la croyance est révélée, plus s’éloigne l’espérance qu’elle puisse être, un jour, éradiquée. Rien dans ce monde ne lui échappe, et à présent nous le savons, même la science « moderne » la plus raisonnée, en est à sa source, aveuglément contaminée. Le protestantisme a sauvé la chrétienté au moment crucial où elle était en train de perdre sa toute puissance sur l’essence du réel ; en accordant aux « savants » toute latitude pour interpréter les phénomènes physiques, à condition qu’ils s’en tiennent à la surface et délaissent ainsi toute prétention à en comprendre objectivement les causes, il en a fait, à leur insu, ses plus efficaces propagateurs.
En effet, l’avènement des « mécaniques quantiques » et leur succès scellent, peut être, en ce début de XXème siècle si prometteur, la tombe de tous les espoirs d’un monde susceptible de devenir enfin athée. La main mise de la philosophie protestante allemande sur la pensée du continent en ayant déjà fait le lit, cette débâcle ne rencontrera que peu d’opposition.
Même celle de Nietzche fut sans effet ! Trop égocentrée, trop arrogante et finalement bien trop légitimement contestable ! Il a cru à sa capacité de lucide mégalomane pour dynamiter par la toute puissance de son verbe l’inanité de la morale chrétienne. Et bien que, comme il l’avait prévu, ses écrits soient passés à la postérité et demeurent aujourd’hui une des rares références pour une pensée libérée de la chrétienté, ils n’ont pas généré l’effondrement civilisationnel escompté. L’ont-ils même ébranlé ? Pourtant la charge était terrible et, pour l’époque, l’impact semblait particulièrement destructeur…Alors pour mémoire, écoutons le un instant :

  1. « M’a ton compris ? --- Ce qui me sépare, ce qui me met à part de tout le reste de l’humanité, c’est d’avoir découvert [au sens de dévoilée] la morale chrétienne. […]N’avoir pas ouvert les yeux plus tôt est selon moi la plus grande malpropreté que l’humanité ait sur la conscience. J’y vois la duperie de soi faite instinct, la volonté d’ignorer par principe tout ce qui arrive, toute cause, toute réalité, une sorte de faux monnayage en matière psychologique qui va jusqu’au crime. L’aveuglement devant le christianisme, c’est là le crime par excellence — le crime contre la vie. »
    « Peut-on se méprendre à ce point, non pas en tant qu’individu, non pas en tant que peuple, mais en tant qu’humanité ?... On a enseigné à mépriser les tout premiers instincts de la vie ; on a imaginé par le mensonge l’existence d’une « âme », d’un « esprit », pour faire périr le corps ; dans les conditions premières de la vie, dans la sexualité, on a enseigné à voir quelque chose d’impur ; dans la plus profonde nécessité de la croissance, dans le sévère amour de soi (le mot lui-même est déjà injurieux !) on a cherché un principe mauvais ; au contraire, dans le signe typique de la dégénérescence et de la contradiction des instincts, dans le « désintéressement », dans la perte du point d’appui, dans l’impersonnel et l’amour du prochain, on aperçoit la valeur supérieure, que dis-je, la valeur par excellence... Comment ? L’humanité elle-même serait-elle en décadence ? Le fut-elle toujours ? — Ce qui est certain, c’est qu’on ne lui a jamais présenté que des valeurs de décadence sous le nom de valeurs supérieures. La morale du renoncement à soi est par excellence la morale de dégénérescence, c’est la constatation : « je suis en train de périr » traduite par cet impératif : « vous devez tous périr », et non pas seulement par l’impératif !... Cette seule morale qui a été enseignée jusqu’à présent, la morale du renoncement, laisse deviner la volonté d’en finir, elle nie la vie à la base même de la vie. »53

A-t- on depuis entendu une telle lucidité ?
Mais, finalement simple philosophe/psychologue dissident, moraliste « a-moral », obsédé par son combat d’ « Antéchrist » contre l’idéalisme allemand et, quelle que soit la rhétorique subtile qui tente de le justifier, égocentrique patent, il n’aura pas vraiment perçu les véritables enjeux scientifiques, économiques et politiques de son temps, hermétique par essence à tout ce qui n’était pas lui !
Mais qu’on ne s’y trompe pas, ma critique est légère en regard du legs qu’il nous a offert. Indispensables dévoilements pour toute rébellion à l’ordre établi par, à présent, vingt et un siècles d’ « IdéalismeChrétien ». Il a mis a nu notre soubassement théologique même s’il n’a pu, comme il en a toujours eu l’objectif, le pulvériser. Bien plus lucide que Marx sur l’imprégnation de la conscience humaine par le corpus idéologique platonicien et de ses délétères conséquences…
Car Marx n’a pensé la religion que comme instrument de soumission et d’endormissement (« l’opium du peuple ») créé et entretenu par les « classes dominantes ». Or ces dernières (les tenants du capital) sont d’évidence tous formatées par la morale chrétienne et n’existent et perdurent que par leur collusion avec les pouvoirs religieux. Marx décrit l’aliénation mais ne l’explique pas ! Il reste, pourrait-on dire, un phénoménologiste. Alors que Nietzche, plus introspectif, remonte à la source et désigne les causes, les bifurcations, met à jour le substrat idéaliste dont nous sommes tous faits, la turpitude platonicienne qui nous anime et contre laquelle, une fois révélée, il faut sans cesse continuer de lutter. Mais en rejetant toute métaphysique il abolit également la possibilité d’une réalité objective et ne se préoccupe plus que de l’individu souverain dans son rapport au monde.
Ainsi, a son corps défendant, ouvre-t-il grand la porte à la pensée libérale, socle idéologique du capitalisme industriel naissant. Son aspiration, ô combien légitime, à une éthique issue du soi, d’un corps et d’un esprit indissociable dans leur existence au monde, et ne revendiquant que la santé dionysiaque, la « bonne humeur » et l’affranchissement de toutes contraintes autres que celles qu’il décide de s’imposer à lui-même, s’est fracassée sur son immense et désespérante solitude.
Au lieu de déboucher, comme elle aurait pu (du), sur la socialisation de cette singularité (tant elle est isolément inhumaine et non surhumaine comme il a pu le penser !), cette extraordinaire volonté, capable d’appréhender un autre monde possible, s’est effondrée sur elle-même, finalement anéantie ! 54
La morale chrétienne lui a donc survécu : « Dieu » n’est pas mort ! Et bien que le matérialisme consumériste vide les églises, ses racines sont encore vigoureuses et les sucs qu’elles génèrent toujours aussi vénéneux.
D’autant que c’est au tour de l’Islam, après le protestantisme de la ragaillardir (et de quelle manière !) ; Il vient de réactiver, en quelques décennies, tout ce à quoi la chrétienté avait été forcé de renoncer : Son emprise autocratique et sans partage sur les consciences et sa prédominance sur le politique, sans oublier bien sûr sa détermination à renvoyer les femmes dans l’arrière-cour de l’histoire et de les recouvrir du voile de mépris qui leur est dû !
Car, et tout le monde semble l’avoir oublié, l’islamisme n’est (avec le judaïsme et le christianisme) qu’une des trois branches du « monothéisme abrahamique » et donc de la chrétienté. Sa spécificité, qui explique certainement le danger qu’il représente et la haine qu’il suscite, réside dans sa prétention à représenter, lui et lui seul, le prophète fondateur….
Dans le Coran, l’islam s’affirme comme « la religion d'Abraham » figure d'un monothéisme supra confessionnel. Les juifs et les chrétiens sont considérés comme des corrupteurs, voire usurpateurs de la parole divine. Noé, Abraham et Jésus sont regardés comme des prophètes musulmans, ce qu’il faut le reconnaitre, est une manière espiègle mais plutôt efficace de contester la concurrence ! En effet, les vrais juifs et les vrais chrétiens ne peuvent être, « en réalité », que de purs musulmans. Et si le catholicisme peut légitimement s’inquiéter de la concurrence, la morale chrétienne, elle, n’a donc rien à craindre de la « Charia » ou loi Coranique.55 Car pour celui qui a encore en mémoire l’histoire du christianisme il est assez aisé de percevoir que ce qui les unit est bien plus évident que ce qui les différencie. La liste est trop longue pour prétendre à l’exhaustif, mais citons quelques traits bien communs :

  1. -«L’ au-delà » comme espérance et par conséquence le mépris de la vie et du corps et la mort comme une porte vers Dieu,
    -la « famille patriarcale » comme seul modèle social admis où la phallocratie ne tolère aucune résistance et par conséquence directe,
    -la haine/peur du féminin et de la sexualité (bien sûr, en tout premier lieu, celles des femmes), puis le rejet des « déviants »,
    -l’asservissement du politique au religieux et la loi divine comme ultime référent,
    -la persécution des hétérodoxes et des non-croyants,
    -l’endoctrinement dès le plus jeune âge
    -la violence physique, la torture et finalement le terrorisme aveugle en guise de suprême prosélytisme,
    -etc., etc.

Qui osera dire que le christianisme, dans son histoire, puisse s’exempter de ce qui précède et qu’il n’existe pas encore aujourd’hui un intégrisme catholique qui, s’il accédait au pouvoir, ne réactiverait pas immédiatement la plupart de ces subtils préceptes ?
Alors oui, l’islam, est porteur d’un corpus idéologique puisé à la source de la morale chrétienne à l’œuvre depuis plus de 2000 ans, et l’extrémisme d’une partie, somme toute, infime de ses adeptes ne peut que servir, au final, son maintien et sa prospérité; peu importe, au fond, la forme qu’elle finira par prendre tant ce qui compte d’abord est la prédominance de la foi sur l’intelligence.

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Alors que nous reste-t-il ? J’aborde ici certainement la partie la plus difficile de ce texte…Trouver quand même matière à envisager une issue à l’enfermement ! En ai-je la force, l’intelligence ? J’en doute ! Existe-t-il d’objectives raisons de penser que l’humanité pourra un jour s’extraire de deux millénaires de contre vérités, d’hypocrisie, de duplicité, de fourberie, de bêtise : Dogmes aberrants, doctrines corrompues, mystifications et mythifications historiques, propagande (à présent subliminale), usurpations du pouvoir étatique violentes ou pacifiques, la liste remplirait mille pages.
Derrière la vitrine de la modernité, les valeurs archaïques, platoniciennes et chrétiennes, sont toujours à l’œuvre. D’autant plus efficaces qu’elles ne sont plus directement visibles, que le « matérialisme », à présent purement consumériste, déferle inéluctablement sur planète entière, habillé des atours de la liberté individuelle (le libéralisme et le pouvoir politique dit « démocratique ») en produisant l’illusion d’une civilisation hédoniste et affranchie.
Il faudrait enfin comprendre que tout ce qui prétend, aujourd’hui, nous libérer en fait nous asservit, que la technologie est un leurre dans la mesure où elle a phagocyté la science et qu’elle n’est plus qu’un rouage au service d’un système économique délétère producteur d’un futur non pensé. Que l’ « industrialisation » étendue, sans exceptions, à tous les domaines composant notre quotidienneté (travail salarié, nourriture, santé, déplacements, loisirs, reproduction et sexualité, « communications », etc.) abouti, sous prétexte d’efficacité, à nous déposséder de notre rapport au monde et à la maitrise de nos vies ! Je voudrais ici rappeler, car plus personne ne semble le savoir, ce qui signifie réellement le terme « industrie » :

  1. « C’est un emprunt (1356) au latin industria « activité secrète », puis « activité » en général et « application » dérivé de industrius « actif, zélé ». L’adjectif est formé indu, forme renforcée de in « dans » et de struere, structus « disposer, arranger, préparer » et « empiler les matériaux ». D’abord apparu avec le sens d’ « ingénieux », au XIVème, il désigne également l’habileté à exécuter qqch. et par extension « profession manuelle exigeant une certaine ingéniosité » puis tombe en désuétude. Puis au XVème apparait le sens de « toute activité productive » et à la fin du XVIème se spécialise comme terme de finances, appliqué au travail du fermier au commerce d’un marchand. Et c’est de ses valeurs que procède le sens moderne…. Par ailleurs [et là cela devient intéressant…] de l’idée de « savoir-faire », on passe au sens de « finesse, ruse » (1440-1475, encore relevé au XIXème, et qui survit avec une valeur péjorative dans vivre d’industrie « d’expédients » (1694) et chevalier d’industrie (fin XVIIème), toujours en cours il y a peu.
    Industrie s’emploie ensuite au sens large (1735) pour désigner l’ensemble des opérations qui concourent à la production et à la circulation des richesses et devient courant au XIXème ; mais dès la fin du XVIIème le mot prend également le sens restreint de « technique industrielle, machinisme » et finit par désigner l’ensemble des activités économiques ayant pour objets l’exploitation des richesses minérales, des sources d’énergie, , ainsi que la transformation des matières premières en produits fabriqués, manufacturés.»

Indissociable du capitalisme triomphant, il va s’étendre progressivement à tous les secteurs d’activités qui permettent la division du travail salarié et la parcellisation des tâches et, aujourd’hui, insidieusement, s’étend à la totalité de l’activité humaine. Il a généré les grandes firmes multinationales (FMN) ou transnationales (FTN) dont le pouvoir financier est tel 56 qu’il est à même, à présent, de phagocyter voire tout simplement de se substituer à celui des Etats.  
Ceux qui en douteraient pourront essayer de trouver des exceptions en consultant la liste dans la base de données STAN57 de L’OCDE58 qui répertorie l’ensemble des activités humaines sur cette planète et dont voici le premier niveau de classement (et je vous incite vivement à cliquer sur chaque numéro de code pour voir le détail de chaque rubrique- Le O est particulièrement édifiant ; on y trouve les Activités récréatives, culturelles et sportives au même niveau que l’Assainissement et enlèvement des ordures et il faut encore descendre d’un degré supplémentaire pour trouver enfin l’industrie culturelle).

  1. (Classification internationale type, par industrie, de toutes les branches d’activité économique, Rev.3)
    A - Agriculture, chasse et sylviculture
    B - Pêche
    C - Activités extractives
    D - Activités de fabrication
    E - Production et distribution d'électricité, de gaz et d'eau
    F - Construction
    G - Commerce de gros et de détail; réparation de véhicules automobiles, de motocycles et de biens personnels et domestiques
    H - Hôtels et restaurants
    I - Transports, entreposage et communications
    J - Intermédiation financière
    K - Immobilier, locations et activités de services aux entreprises
    L - Administration publique et défense; sécurité sociale obligatoire
    M - Éducation
    N - Santé et action sociale
    O - Autres activités de services collectifs, sociaux et personnels
    P - Ménages privés employant du personnel domestique
    Q - Organisations et organismes extra-territoriaux

Les mots « industrie » et son dérivé « industrialisation » sont en quelque sorte revenus à leur origine sémantique d’ « activité secrète » car la planification à l’œuvre n’est jamais présentée de manière transparente. Ils servent à en dissimuler d’autres, moins consensuels, comme « profit », « exploitation », « rentabilité », « privatisation », etc. Et sous couvert d’efficience, d’efficacité etde rationalisation, permettent d’assujettir l’activité humaine, dans sa totalité, à un modèle économique globalisé !
Et je prétends ici, que sans le corpus théologique chrétien sous jacent, cela ne pourrait être possible. Quel être humain débarrassé des fondements religieux de la « morale », de l’emprise de la famille patriarcale qui impliquent et génèrent sa soumission volontaire aux institutions, de la culpabilité qui en découle comme carcan de l’existence, de la croyance en un au-delà paradisiaque pour endurer les souffrances terrestres, etc., etc., accepterait, sans se révolter, de subir l’absurdité d’une vie perdue à la gagner ? Dès que l’on prend un peu de recul, le « travail », dans son sens industriel et comme « source de revenus », apparait dans toute sa déconcertante mais pourtant implacable « aliénation » (à prendre dans ses deux sens démence et dépossession !). Il faut avoir été soumis à un endoctrinement « diablement » efficace pour ne pas s’éveiller de ce cauchemar et s’interroger sur l’insanité d’une vie consacrée à assurer sa subsistance par une activité asservie! Et sans cette « morale », comme assise subconsciente, il est invraisemblable que ce système mortifère n’ait jamais pu s'imposer.

  1. D’ailleurs ne peut-on pas observer et analyser la rébellion de la jeunesse occidentale des années 60 comme une simple réaction viscérale et jubilatoire à cette incarcération de l’essence vitale ; comme si, dans une parenthèse temporelle inattendue, le voile qui dissimulait l’inanité du monde s’était brusquement déchiré, dessillant les consciences et ouvrant vers d’autres possibles. Plus de quarante ans après, l’ « establishment », toujours inquiet, cherche à parachever son œuvre par le regard condescendant, haineux, ironique et méprisant qu’il colporte sur cette période historique si proche de le balayer.
    De fait quelques politiciens, un peu plus vils que les autres, n’ont pas hésité à en faire des arguments électoraux comme ce « futur-ex président- (futur ?)» en campagne présidentielle en 2007 à Clermont – Ferrand ! 59
    Et il vaut mieux l’avoir vécu pour se rappeler qu’en France le pouvoir politique fut vacant pendant plus de 15 jours et que De Gaulle lui-même du « disparaitre » stratégiquement pendant quelques heures pour tenter de reprendre la main. La falsification historique dont on nous abreuve depuis se garde bien de rendre compte de l‘effervescence salutaire qui submergea tout le pays (grève générale sans précédent60) et s'efforce de la limiter dans la mémoire collective à la « contestation » de quelques milliers d’étudiants nantis et à une poignée d’intellectuels révolutionnaires exaltés et irresponsables (devenus d’ailleurs depuis et pour la plupart, des hérauts du libéralisme triomphant !). La grève fédérant plus de 7 millions de personnes pendant plus de deux semaines témoigne de l’ampleur du bouleversement à l’œuvre mais ne suffit pas à évoquer le chambardement qui s’opérait également dans les esprits et dans les corps. Peu de récits, et la faiblesse et l’insuffisance des travaux théoriques qui suivirent, pour la plupart d’ailleurs réactionnaires, n’offrent aux générations suivantes qu’un regard largement vicié et souillé. Même Bourdieu ne semble pas avoir compris ce qui se jouait réellement dans cette apparente « spontanéité bordélique », l’interprétant comme une « révolution ratée,… qui fait peur comme une vraie révolution mais qui ne change rien, […] la révolution ratée c’est très dangereux parce qu’on le paye comme une vraie révolution » (Pierre Bourdieu gauche-droite). Très surprenant de sa part ! Comme s’il y avait déjà eu des révolutions réussies…Et puis incapable de voir comme sociologue (mais c’est certainement dû au syndrome universitaire nombriliste parisien) que c’était toute la population qui, pour une large part s’ébrouait et déchirait le voile. Peut être peut-on dire, à postériori (toujours bien plus facile !) que ce moment a manqué cruellement de penseurs (ce qui n’est pas, forcément, synonymes d’intellectuels) aptes à « prendre le train en marche ». Mais vu la nouveauté du phénomène, était ce possible ?
    A mon sens, le seul « document » qui renseigne fidèlement sur ce qui s’est passé alors (en plus des slogans qui mériterait une analyse philosophique approfondie)61 est sans doute une bande dessinée publiée à partir de 1970 sous forme de série dans Politique hebdo, puis dans Charlie Mensuel : « L'An 01 » Elle a été créée par Gébé puis enrichie par les propositions des lecteurs.62 Nulle nostalgie ou passéisme dans ce rappel (dénigrement tellement facile pour discréditer tous ceux qui osent s’y référer !), mais un appel à promouvoir un objectif travail d’historien (est-ce réaliste ?) propre à rétablir la vérité (humaine, relationnelle, philosophique !) de cet extraordinaire « pas de côté ».
    «L’An 01 » n’est pas, au sens commun, une bande dessinée. Elle propose et accompagne un changement radical de paradigme et esquisse de manière réaliste (non pas « utopique » comme se sont empressés de la qualifier ses contempteurs) un autre monde possible ; en fait le seul qui puisse garantir notre survie en tant qu’espèce, s’il en est encore temps, mais qui nécessite, en tout premier lieu, de stopper brutalement la doxa qui nous tyrannise : « On arrête tout, on réfléchit ! ». Ces prémices ont eu lieu en cet inimaginable mois de mai 1968 et rien, ni personne ne peut décemment en contester la réalité historique. Et, aujourd’hui, tout ce qui peut être nommé « progrès » (au sens d’évolution vers les « lumières »), directement et indirectement en découle : Le rééquilibrage du rapport de pouvoir homme/femme, le début de la prise de conscience de notre animale nature (« l’écologie »), une certaine permissivité pour ceux qui transgressent l’hétérosexualité, l’ébranlement de la structure familiale patriarcale, de l’autorité institutionnelle élitiste, etc. ; « avancées » qui ne sont qu’évidences pour les générations en dessous de trente ans et qui n’auraient jamais existé sans ce coup de boutoir dans les institutions… Ce dont bien trop peu sont à présent conscients !

Cette digression vers un monde si proche et pourtant déjà si lointain ne peut que provoquer tourments de l’esprit…, en suscitant une double et concomitante certitude: Celle, évidente, que ce qui s’est produit, une fois, de manière imprévisible est susceptible de se reproduire à tout moment et l’autre, chaque jour renforcée, qui constate l’ubiquité des processus d’oppression et d’asservissement et leur vraisemblable irréversibilité. Ce qui revient, il faut bien le reconnaitre, à opposer une espérance à des faits…Car la terrifiante régression actuellement en cours, au reste surtout perceptible pour ceux qui ont vécu cet improbable moment, semble désormais irrécusable. Le rationalisme théologique triomphe et la « pensée » s’éteint !
En abdiquant leur prétention et leur exigence à comprendre le réel au profit d’une efficacité productiviste les physiciens ont scellé l’entrée de « la caverne » et, se sont livrés, corps et âmes et en toute inconscience, à la théologie. Ainsi adoubés, à leur insu, par la « morale religieuse dominante » nous ont-ils entrainés à leur suite dans le « cul de sac » de leur impensée !
Peut-on le dire mieux que Georges Miedzianagora ?

  1. « La perte du sens du réel est un fait de civilisation : L’incompétence à l’égard du réel est aujourd’hui universelle dans la cité des sciences et des philosophies et une solidarité étroite conforte la position des physiciens par celles des philosophes et vice-versa »

Ce qui implique que :

  1. « Nous sommes aujourd’hui, gens de haute culture, comme les peuples à « pensée sauvage » de Claude Lévi-Strauss, pleins de crainte et de respect devant nos initiés de la nature des choses. Nous reconnaissons la compétence et, partant, l’autorité de la société des physiciens ; nous ne sommes pas à même de contrôler intellectuellement la validité de leurs messages ! »

Et ce renoncement ne peut manquer d’être corrélé à l’avènement concomitant de l’ère industrielle, et d’en être perçu comme un fulgurant catalyseur. En découvrant l’immense champ d’application d’une physique efficiente enfin débarrassée de toute considération ontologique, en même temps qu’appâtés et séduits par les « capitaines d’industrie » à l’affût de nouvelles technologies et de nouveau produits, les chercheurs sont devenus en quelques décennies les indispensables collaborateurs de l’économie capitaliste mondiale. Caution scientifique et rationnelle d’un modèle économique et social injuste, aliénant et par essence corrompu, mais leur offrant un « terrain de jeu » sans limites et les moyens financiers pour s’y ébattre en toute apparente liberté. Et, nous l’avons vu, l’idéalisme théologique, un temps menacé, s’en est trouvé pleinement revigoré….Pourtant, en ce début de XXème siècle, alors qu’il semblait avoir déjà partie gagnée, le capitalisme adossé à la morale et à la science s’est trouvé en butte à l’amplification d’une résistance sociale jusqu’alors matée et méprisée. Les penseurs insoumis et révolutionnaires de l’époque décryptent l’aliénation du peuple par une autocratie auto promulguée et dénoncent l’arbitraire, l’injustice et le despotisme qui, d’ailleurs, la caractérisent encore aujourd’hui. Et surtout ils théorisent les alternatives politiques qui vont servir de supports idéologiques aux multiples soulèvements et rébellions collectives en passe de se produire. Un siècle plus tard, l’échec est affligeant et il faudrait des dizaines de pages supplémentaires pour en analyser les raisons. Mais, à mon sens, la seule question pertinente peut se formuler ainsi : La théorie (marxiste, anarchiste, peu importe..) portait-elle en soi cette défaite, comme l’ont très vite asséné les pourfendeurs de toute atteinte à l’ordre établi, ou bien comportait-elle simplement des faiblesses d’analyse et des lacunes dans leurs appréhension du monde et surtout n’étaient-elles pas, à leur sources, déjà corrompues par les déterminismes culturels impensés de leurs auteurs ?
Laissant les tentatives de réponses pour plus tard il est nécessaire ici d’analyser les conséquences de cette débâcle pour clarifier les temps présents. C’est le capitalisme qui a triomphé et non la démocratie, comme on veut nous en convaincre, car sa véritable expression est indéniablement consubstantielle au projet communiste et non, à l’inverse et d’évidence, à un système construit sur la domination et l’exploitation des faibles par les forts ! Mais la propagande de cet extraordinaire mensonge s’est imposée et nous voilà toujours victimes de cette croyance !
Il en résulte, en ce début de 21éme siècle, une intrication et une collusion de tous les pouvoirs qui par delà une séparation de façade, tendent ensemble à servir et promouvoir le même totalitarisme et qui semblent à même de « colmater » dans les années à venir l’ensemble de la toile dont il recouvre d’ores et déjà le monde. « L’élasticité » de cette doxa et sa capacité d’absorption sont telles qu’aucun « processus révolutionnaire » contemporain, connu ou même envisageable n’apparait apte à endiguer son expansion.

  1. Que ce soient ceux que l’on nomme « soulèvements populaires », directement dirigés contre l’oligarchie à la tête d’un état (par exemple, actuellement « en cours », les « révolutions arabes » ou l’Ukraine), qui ne s’avèrent être, en réalité, que de simples réajustements structurels des classes politiques dirigeantes obsolètes et trop excessivement corrompues ; elles s’accompagnent, en général, d’une « démocratisation modulée » en fonction des forces politiques et religieuses et militaires en présence (Ex : Egypte et Tunisie) et de l’issue du « jeu » stratégique, concurrentiel et déterminant des tierces parties (finances/industries/états). D’ailleurs, lorsque les enjeux géostratégiques s’avèrent trop complexes et cruciaux, et que la simple instrumentalisation des premiers protagonistes (pour la plupart sincères et idéalistes mais invariablement dans un « désir d’occident ») ne permet pas de déboucher sur une solution institutionnelle de compromis (mais quelle qu’en soit sa forme toujours au service des intérêts du libéralisme économique) les armes  surgissent de toutes parts et de manière cynique et abjecte, l’ « échec diplomatique » précipite tout bonnement les populations en enfer (aujourd’hui la Syrie et peut être l’Ukraine !).
  2. De même, n’y a-t-il rien à attendre des partis politiques (officiels ou clandestins) qui prônent un changement radical de modèle économique et social mais dont l’audience et l’influence ne cessent de décroitre depuis des décennies, dont les structures décisionnelles demeurent ouvertement contradictoires aux principes démocratiques par ailleurs prônés et dont l’enlisement idéologique et l’irréalisme des propositions sont si manifestes qu’ils en deviennent pathétiques ; c’est par contre, à l’opposé et bien lugubrement, que la démagogie réactionnaire des populismes fascisantscontamine les esprits faibles et se répand sans réelles résistances au sein des classes moyennes paupérisées et abêties par l’acculturation médiatique.
  3. Une fois écarté la nébuleuse transnationale des ONG (Organisations Non Gouvernementales dont l’action, quelle qu’en soit l’incontestable utilité momentanée, se réduit globalement à alléger l’impact dévastateur du développement industriel et de ses corollaires politiques (despotiques et coercitifs) et, finalement, de le rendre admissible, il reste tout ce que l’on regroupe sous le terme générique et polysémique de « mouvements sociaux », manifestations, regroupements subversifs informels plus ou moins spontanés (« Indignados »)63 en solidarité avec toutes sortes de réseaux (liés essentiellement à Internet), dont l’influence est indéniable et qui représentent une authentique résistance au déferlement en cours; mais dont on ne peut pourtant que constater l’incapacité à réellement l’endiguer et surtout à élaborer et promouvoir un autre modèle susceptible de l’absorber et d’ouvrir sur une autre perspective…
  4. Quant à la prolifération des alternatives locales (d’ailleurs très souvent, issues de, ou concomitantes aux « forces » précédentes) productrices de modèles économiques et sociaux à « taille humaine » (production d’énergie, agriculture biologique, habitat collectif, etc.) souvent issues de la frange de population dite « écologique » et limitées géographiquement essentiellement à l’Europe occidentale et aux Etats Unis, elles ne constituent, au final, qu’une option insignifiante face au gigantisme de l’économie mondialisée. Quelles que soient la pertinence et la sagacité de ces initiatives (individuelles et collectives), elles sont, dans leur développement, très rapidement confrontées, justement, à un problème d’échelle ; et se fracassent à l’épreuve du plus grand nombre ! Ou si, comme c’est le cas par exemple pour l’agriculture biologique, elles suscitent un intérêt auprès d’un secteur de population conséquent, elles sont alors proprement phagocytées par l’ingénierie productiviste, réinjectées dans la machinerie consumériste sous emballage labélisé mais vidées de tout essentiel contenu. Car, à contrario des fascismes rouge ou noir, le capitalisme démocratique (ou l’inverse) ne réprime pas les marginalités. Et même dans la mesure où elles ne sont pas politiquement contestataires ou contraires à la bienséance et, surtout, ne portent pas atteinte à la sécurité de l’Etat, il peut même, à l’occasion et dans certaines conditions, les encourager ! Et ce, pour deux raisons manifestes :
    1. -D’abord parce qu’il lui est ainsi possible de « contrôler » sans frais une grande partie de la population la plus éduquée et la plus rebelle au modèle dominant en lui octroyant un espace physique et politique que cyniquement on pourrait qualifier de « terrain de jeu » !
    2. -Ensuite parce que ces « expérimentations sociales » peuvent toujours lui servir dans sa propre évolution et dans l’ajustement de son développement face aux contraintes matérielles qu’il, inévitablement, ne peut manquer de rencontrer
  5. -Enfin la dernière espérance de transformation radicale que l’on nous vend toujours comme au cœur même de l’ « idéal » démocratique et ses inhérents projets éducatif et informatif, a été, depuis belle lurette, foncièrement dévoyé ; pour qu’ils soient efficients il eut fallu désaccoupler le premier de l’endoctrinement et le second de la propagande, ce qui, à contrario du discours officiel, n’a jamais été ne serait ce qu’envisagé . Et aujourd’hui, rien ne masque plus, que les deux sont totalement assujettis aux intérêts du modèle libéral et qu’il ne reste plus que la façade, en ruine, de l’idée ! Le rôle de l’école et de l’université, faisant fi de toute prétention à une instruction émancipatrice, se borne à produire des individus dociles et aptes à s’insérer dans le « marché du travail » et celui des mass-médias de faire croire à une liberté d’information tout en diffusant et validant la pensée dominante. Ainsi, en relatant quotidiennement l’atrocité des conflits militarisés et une (petite) partie des scandales en cours, sans pour autant en révéler les cause véritables, les journalistes ne font que les banaliser. Ils laissent dans l’ombre et hors d’atteinte les consortiums financiers et industriels étatiques dont les insatiables appétits de « ressources naturelles », la compétition effrénée sur les « marchés» et les luttes d’influence géostratégiques sont pourtant à même d’expliciter l’ensemble des faits rapportés.
    Et de toute évidence, ces conséquences mortifères « à la une » étalées, non seulement pour notre engeance, mais pour la vie elle-même, ne soulèvent plus, au sein des populations anesthésiées, que de vagues indignations pétitionnaires ou de locales et circonscrites manifestations de colères, aussi vite promues que balayées par « l’actualité ». Toute cette « agitation » médiatique n’altère en rien les fondamentaux du système industriel et financier qui régissent la planète ; bien au contraire elle le pérennise

Me voici donc, et comme je le craignais, confronté à la difficulté où le cheminement de ma pensée me mène. Puisque « penser n’est pas croire » comment observer notre civilisation humaine en toute lucidité sans en constater l’infini turpitude et pronostiquer sa probable extinction ? Espérer et/ou appeler de ses vœux un « Aggiornamento » susceptible de modifier notre trajectoire revient à ignorer que ce sont les fondements même de la morale chrétienne, qui portent en germe la corruption et la dépravation de notre relation au monde et croire que ce qui nous infecte et nous dénature peut soudainement nous ramener vers la lumière. S’indigner (voire se scandaliser) devant ses épouvantables effets est bien loin d’être suffisant, même simplement pour en comprendre les causes. Nauséabonde ironie, ne voit-on pas à présent « s’élever » un nouveau pape « charismatique » qui, en toute « innocence christique » ose délivrer un appel à soulager la misère (matérielle et morale) du monde par un retour aux valeurs de l’évangile ; et les médias, par foules interposées, d’en faire un nouveau « messie » apte à promouvoir la « révolution catholique »! De la même manière que les dominants justifient l’accumulation des richesses en prétendant qu’elle est essentielle à la croissance donc au bien commun, du haut de son impensable pouvoir de potentat théologique il prêche une solidarité et une « riche pauvreté » (sic !!!), préceptes que sa simple existence contredit et dont le luxe ostentatoire du Vatican et surtout l’argent (sale) de sa banque exposent l’hypocrite obscénité du propos.64 Il est simplement aujourd’hui la preuve vivante que ce qui nous aliène est en plein essor et que la perversité qui sous-tend le discours moral est toujours d’une implacable efficacité.
Alors, après avoir tenté de décrire et de dévoiler l’ubiquité des processus d’oppression des corps et surtout des consciences et, ce faisant, avoir exclu de l’avenir toute naïve espérance, comment, au moment de conclure, renouer avec le devoir de subversion, la saine colère (et non la sainte) devant l’injustice, l’inégalité, l’insupportable domination de quelques uns (ignoble état de fait), sur tous les autres ?
Puisque je ne suis pas misanthrope, que je considère la plupart des humains comme des autres moi-même, que l’idée d’unmal ou d’un bien consubstantielle à la nature humaine (soit à la nature tout court) me semble une parfaite idiotie issue d’esprits détraqués et que je m’interdis toute prétention prophétique, rien ne m’autorise finalement à affirmer l’impossibilité d’une inversion de paradigme ! D’ailleurs, tout ce qui précède n’a de sens que dans l’hypothèse inverse, sinon à quoi bon!? Si j’ai pu me frayer un chemin au cœur de l’affabulation œcuménique et du mensonge généralisé ce n’est que soutenu par des pensées préexistantes et/ou parallèles et prouve, que d’autres que moi l’ont déjà fait, le font et peuvent toujours le faire. Nulle prédiction donc, juste une incitation à la révolte, à l’insubordination, à la réappropriation de soi.
Et en tout premier lieu un appel à débusquer, au plus profond de nous même, la « soumission volontaire » qui, la plupart du temps à notre insu, s'avère le premier obstacle à notre désir naturel de liberté. Le « Discours de la servitude volontaire » ou le « Contr'un » rédigé en 1549 par Étienne de La Boétie à l'âge de 18 ans offre encore aujourd’hui une des plus pertinentes explications de l’assujettissement des peuples à toute forme incarnée de tyrannie que pourtant, seule, leur passivité autorise. Mais pour lui, l’origine de cette « chute » dans l’asservissement aux dominants ne relève que d’un « accident de l’histoire », une malchance inaugurale (« Le Malencontre »), qu’en fait il n’explique pas. Or il me semble qu’il est permis de penser que vingt siècles d’oppression, de catéchisation et d’endoctrinement par la morale chrétienne, sous tendus par l’idéalisme philosophique sont une explication bien plus objective et pleinement suffisante.
La religion (qui pour les hagiographes chrétiens, ne l’oublions pas, vient étymologiquement du latin religare, «relier » et de ligare, « lier » et signifie « attachement », « dépendance »), aura été dès ses débuts, une fantastique machine à soumettre qui, jusqu’à nos jours, ce serait difficile de le contester, s’est pleinement perpétuée. Il est facile de comprendre qu’une doctrine qui a installé dès leur naissance, les femmes (d’abord elles !) et les hommes dans un « péché originel», que « Dieu » n’a pardonné que « grâce » au martyr expiatoire et sacrificiel de son « fils » crucifié et qu’elle a très vite agrémenté de toute une série détaillée de « péchés capitaux », ne convie pas, à priori et si l’on y croit, à envisager sa propre existence de manière jubilatoire et émancipée. Bien évidemment il s’en suit une culpabilité quasi « naturelle », inhérente de fait à toute conversion au christianisme, qui soumet les croyants à une terrifiante pression psychologique et les rend particulièrement vulnérables et dépendants…Elle les enferme dans le renoncement, en définitive, à la vie, puisque cette abnégation leur est présentée comme « le marche pied » vers celle, éternelle, du « paradis »…Que faut-il de plus pour expliquer la « docilité » du « troupeau égaré », son obéissance aveugle au berger auréolé et sa vénération du joug qui l’avilit? Et qui contestera que la morale qui régit l’ensemble des peuples d’occident et du moyen orient ne soit pas d’origine chrétienne (islamique, catholique et protestante ou bien juive) ? Quant aux autres (Chine, extrême orient) leurs codes culturels, leurs « sens de la hiérarchie » et leur « humilité naturelle » suffisent à démontrer leur même « soumission volontaire » à la morale dominante. Et même si, de toute évidence, ces pays ne sont pas ceux où l’industrialisation capitaliste a pu prendre son essor, on constate pourtant, qu’à présent « ensemencés », ils constituent un formidable terreau à son expansion mondialisé.
C’est donc bien l’inéluctable toute première chaine à pulvériser ; mais chacun d’entre nous se doit de le faire par lui-même car, et c’est bien là l’ultime perversité de ce système de domination :

  1. « La première raison pour laquelle les hommes servent volontairement, c'est qu'ils naissent serfs et qu'ils sont élevés dans la servitude » (« Contr'un » p.11). Il est donc indispensable de découvrir en soi ce que l’habitude de l’esclavage a enfoui dans la mémoire, et ce que l’éducation nous a inoculé comme vérités incontestables et pourtant invérifiées. Ce qui engage évidemment dans un superbe cercle vicieux ! Comment extirper de nous même ce qui nous asservi mais dont nous ne sommes pas conscient et qui même, aujourd’hui, tend à nous convaincre de notre liberté d’action, voire de pensée… ?

Pour ceux qui composent cette population sous influence ce n’est qu’à l’occasion, de ce que l’on nomme vulgairement « un accident de la vie », en fait d’un choc psychique déstabilisant, qu’un processus de remise en question est susceptible de s’enclencher, de créer une brèche suffisante dans les quotidiennes certitudes pour que de proche en proche le voile se déchire. Cela peut survenir bien sûr individuellement ou collectivement, et dans ce dernier cas prendre parfois suffisamment d’ampleur pour s'étendre à l’ensemble d’un pays (mai 1968 en France).
C’est seulement à ces occasions que les écrits de quelques solitaires (dans mon genre…) peuvent peut-être s’avérer audibles et utiles. Sinon ils ne peuvent être qu’ignorés et méprisés par le plus grand nombre, tant il est très improbable qu’une pensée puisse en « accrocher » une autre sans s’y retrouver déjà, au moins partiellement et au préalable, en adéquation. C’est là également un phénomène doxique, qui fait que chacun d’entre nous est d’abord conditionné à se diriger vers ce qu’il connait et le conforte dans ses croyances et à rejeter tout ce qui peut perturber l’équilibre fragile de son microcosme quotidien. Ce qui limite considérablement la probabilité qu’un texte, quel qu’en soit le caractère subversif, en est la moindre capacité…
Il fut pourtant une époque (mais de nos jours révolue) où les livres, seuls « médias » à portée universelle, furent aptes à bousculer l’ordre établi. En 1845, par exemple, parut un étrange et iconoclaste objet littéraire qui provoqua de vives réactions, intitulé « L’unique et sa propriété » de Johann Caspar Schmidt plus connu sous le nom de Max Stirner, dont la connaissance reste toujours indispensable pour celui qui tente ce voyage au cœur de ses propres déterminismes. D’autant que, même s’il n’y a jamais fait directement référence, il est difficile de ne pas retrouver son influence dans la pensée de Nietzsche ; de fait, comme pour ce dernier, sa thèse débouche ou/et prend sa source au même égocentrisme radical. On y trouve, les même fulgurances et hauteurs de vues dévastatrices, une implacable logique de dévoilement, la preuve, alors encore vivante, de la puissance de la pensée ! Entendons-le par exemple sur l’éducation :

  1. « Qui a pu ne pas remarquer ou tout au moins éprouver que toute notre éducation consiste à greffer dans notre cervelle certains sentiments déterminés, au lieu d'y laisser germer au petit bonheur ceux qui y auraient trouvé un sol convenable ? Lorsque nous entendons le nom de Dieu, nous devons éprouver de la crainte; que l'on prononce devant nous le nom de Sa Majesté le Prince, nous devons nous sentir pénétrés de respect, de vénération et de soumission ; si l'on nous parle de moralité, nous devons entendre quelque chose d'inviolable ; si l'on nous parle du mal ou des méchants, nous ne pouvons nous dispenser de frémir, et ainsi de suite. Ces sentiments sont le but de l'éducateur, ils sont obligatoires ; si l'enfant se délectait, par exemple, au récit des hauts faits des méchants, ce serait au fouet à le punir et à le « ramener dans la bonne voie ».

Sur l'état:

  1. « Un État se passe de mon entremise et de mon consentement ; je nais en lui, j'y grandis, j'ai envers lui des devoirs et je lui dois « foi et hommage ». Il me prend sous son aile tutélaire, et je vis de sa « grâce ». Ainsi l'existence indépendante de l'État fonde ma dépendance ; sa vie comme organisme exige que je ne croisse pas en liberté mais que je sois taillé pour lui ; afin de pouvoir s'épanouir suivant sa nature, il m'applique les ciseaux de la « culture », il me donne une éducation et une instruction mesurées sur lui et non sur moi, et m'apprend, par exemple, à respecter les lois, à me garder d'attenter à la propriété de l'État (c'est-à-dire à la propriété privée), à vénérer une Altesse divine ou terrestre, etc.; en un mot il m'enseigne à être — irréprochable, en sacrifiant mon individualité sur l'autel de la « sainteté » (saint ou sacré est tout ce qu'on peut imaginer : propriété, vie d'autrui, etc.). Telle est l'espèce de culture que l'État est capable de me donner : il me dresse à être un « bon instrument », un « membre utile de la Société ».

Et sur la famille :

  1. « Il n'est pas difficile, par exemple, de se soustraire aux ordres des parents, de fermer l'oreille aux conseils des oncles et des tantes et aux prières des frères et des sœurs, mais l'obéissance ainsi congédiée se réfugie dans la conscience ; moins on se plie aux exigences des siens, parce que rationnellement et au nom de sa propre raison on les juge déraisonnables, plus scrupuleusement on s'attache, en revanche, à la piété filiale, à l'amour de la Famille : on ne se pardonnerait plus d'offenser l'idée qu'on s'est faite de l'amour familial et des devoirs qu'il impose. Affranchis de notre dépendance envers la famille existante, nous tombons sous la dépendance plus assujettissante de l'idée de la famille : l'esprit de famille s'empare de nous et nous domine. La famille composée de Hans, de Grete, etc., dont l'autorité est devenue impuissante, ne fait que se transposer en nous, s'intérioriser, si l'on veut ; elle reste toujours la « Famille », mais on lui applique le vieux précepte : « Il vaut mieux obéir à Dieu qu'aux hommes », précepte qui, dans le cas présent, se traduit ainsi : Je ne puis, en vérité, me plier à vos absurdes exigences, mais vous êtes ma « famille » et comme tels vous restez malgré tout l'objet de mon amour et de ma sollicitude, car la « famille » est une notion sacrée que l'individu ne peut offenser. — Et cette famille, ainsi rendue intérieure et immatérielle, devenue pensée et représentation, passe au rang de chose « sacro-sainte »; son despotisme en est centuplé, car c'est ma conscience qu'elle va, désormais, remplir de ses clameurs. »

Hétérosexuels en familles recomposées ou homosexuels et transgenres en mal de revendication maritale faites un effort, reconnaissez vous ! Le repli apeuré sur l’Idée de famille ne peut que favoriser les pires régressions réactionnaires parce qu’il annonce et norme celle mythifiée du travail et, en suivant, celle de la patrie. Et il nous faut revenir plus d’un siècle en arrière pour écouter un mort nous le dire !
La soumission est d’abord affaire d’habitude et de transmission et il faut, pour bien la cerner, réaliser l’importance du type d’environnement social où elle peut s’épanouir. D’évidence elle ne pourrait pas perdurer dans un contexte libertaire. Elle produit autant qu’elle nécessite les institutions qui la promeuvent et organisent l’orthodoxie qui la pérennise. Et le conformisme va faire le reste. Car rien n’est plus difficile et douloureux que de ne pas être socialement admis.
Il suffit d’observer le passage de l’enfance à l’adolescence pour s’en convaincre aisément.
L’écartèlement psychique65 que provoque cet âge « entre-deux » peut s’expliquer par le conflit intime entre deux forces pulsionnelles contradictoires : Une, naturelle, qui exalte le jeune (futur) adulte à affirmer sa singularité (son « Unique et sa propriété » dirait Steiner) et l’autre qui le contraint à se conformer à la morale du groupe (troupeau) dit « adulte ». Ce qui peut être vu comme l’ultime tentative de résistance de jeunes esprits pré-formatés sur lesquels ne s’est pas encore abattue la chape de plomb de la doxa comportementale. Particulièrement flagrant depuis le milieu du XXème siècle ce phénomène n’est pourtant pas récent. Ce n’est que l’avènement d’une société plus permissive, plus investie et plus tolérante avec sa progéniture, qui a autorisé son exacerbation. Mais, à quelques exceptions près, c’est toujours le besoin d’adéquation au plus grand nombre qui finit par l’emporter. Car tenir tête, seul, à la norme exige une volonté et un courage hors du commun ! Et si, dans un premier temps, la stratégie des adolescents, qui leur permet d’être différents à plusieurs, s’avère une solution de contournement fort efficace elle demeure, au final, bien peu dérangeante pour les institutions. Car, objectivement, elle tient plus du rituel d’intégration que de la manifestation d’une véritable rébellion. On peut même considérer que cette « manœuvre » sert d’ « avant-première » aux processus de soumission de plus en plus sophistiqués qu’une société « dite » démocratique se doit d’inventer continuellement pour faire croire à la liberté au sein même de la pire aliénation qu’il soit. En effet se soumettre aux codes d’un groupe, même dissident, consiste d’abord en un acte de reddition volontaire et un abandon de souveraineté sur soi-même en échange du cocon douillet que procure le sentiment d’appartenance et d’identification. C’est aujourd’hui, par exemple, le principe qui fabrique à la chaine le « communautarisme » mais c’est surtout le liant indispensable à la perpétuation d’un système social en apparence affranchi. Et la pernicieuse intelligence du capitalisme est d’avoir réussi à faire de l’individualisme l’ultime conformisme. Nous sommes, aujourd’hui, et ce à l’échelle de la planète, en passe de devenir tous identiques avec pourtant, pour chacun d’entre nous, le sentiment d’être tous différents.66 La perfection de ces engrenages nous accable et nous anéantit.

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Plus j’avance dans ce texte, qui me guide plus que je ne le conduis, plus je me sens partagé et emporté par deux mouvements strictement contradictoires. L’un qui m’a amené, exalté, à considérer la structure corpusculaire de la lumière comme la forme originelle et matérielle de toute réalité, et ouvre ainsi d’extraordinaires et nouvelles perspectives pour notre « être au monde » et le second qui, luttant contre la lassitude, le dégoût et la certitude de l’inutilité, m’engage à désigner et déconstruire les différentes strates de la mystification globalisante en passe d’étreindre et d’asphyxier l’entière humanité.
Mais en prenant un peu de distance il n’est pas si difficile de se rendre compte que cette disjonction est inévitable même si elle contrarie la volonté orgueilleuse de trouver (et proposer) une issue. Ecueil philosophique majeur, que j’ai déjà fustigé plus haut, et qui entraine (la plupart du temps d’ailleurs sans aucune retenue) un « être qui pense » à se considérer soi même au dessus du commun des mortels et prétendre, de là, au rôle de guide éclairé. Ainsi, bien loin de l’élever, ce manque de lucidité sur soi, d’autocritique, le dégrade au rang de simple théologien tant l’idée du « berger » est consubstantielle à toute morale religieuse. Nouvelle preuve de l’imprégnation occulte des structures mentales qui nous servent à penser… !
Le rôle social de celui qui prétend « philosopher », autant qu’il puisse en avoir un, doit strictement se borner au simple exposé de sa pensée, de ses réflexions. Sa propre personne ne présente que peu d’intérêt, certainement pas plus que tout autre de ses congénères, et ne mérite en rien d’en être distingué. Ces préceptes et autres certitudes universelles censées conduire à un monde nouveau sont à bannir et seules importent les idées, par les mots et les phrases exprimées, et méritent (parfois) de perdurer. Encore ne faut-il pas en sacraliser le support et faire du livre qui les abrite une référence biblique. Le texte, rien que le texte, nu et offert à la lecture d’autrui, que tout un chacun peut s’approprier, confronter à son propre savoir, aimer ou détester pour ainsi en faire vivre ou mourir la pensée qui y est proposée. Mais nos mémoires sont bien plus remplies des noms des écrivains, et de leur gloire posthume que des phrases et des idées qui habitent leurs écrits. Et le mythe du grand homme supplée souvent l’insignifiance ou la médiocrité conformiste du propos.
Ce qui nous amène directement à notre « modernité » où, les « philosophes », du moins ceux qui s’en arrogent la qualité, se voient contraints (enfin le plus souvent le font-ils de leur plein gré…) de s'exhiber « médiatiquement » afin de promouvoir la vente de leurs écrits, peu conscients, dans leur quasi-totalité, du fatal discrédit qu’ils leur font ainsi subir. Le charisme des auteurs et leurs capacités de séduction oratoire et gestuelle, dans un contexte humiliant (il faut le souligner !) de stress, de concurrence et de soumission aux règles et au maître du jeu, se sont largement substitués à la validité intrinsèque de leur pensée. De fait, avant de pouvoir, dans ces conditions, exprimer la moindre idée authentique il faudrait, au préalable, faire table rase de cette mise en scène, ce qu’à ma connaissance, seul Pierre Bourdieu, il y a déjà bien longtemps, a tenté de faire, et a surtout brillamment explicité. 67
D’autre part le « livre-marchandise » n’a bien sûr plus aucune vocation à divulguer le savoir-critique… S’il existe encore, en ce domaine, un travail éditorial digne de ce nom ce n’est que circonscrit à la frange de public susceptible de s’y intéresser et n’en dépasse que très rarement les limites (édition à tirage limité toujours proportionnel à la « cible marketing » concernée). 
Seule la relation directe avec un lecteur éventuel, qu’autorise encore pour quelques temps la diffusion sur internet, répond à cette exigence de mise à disposition inconditionnée. Et, bien qu’elle s’apparente à la métaphore de « la bouteille à la mer », cette manière de faire exister une pensée a le grand avantage de la délivrer de toute astreinte extérieure directe et permet à celui qui écrit de ne se confronter qu’à ses propres déterminismes. Tout particulièrement ceux qui le contraignent à entreprendre ce voyage mystérieux au centre de lui même pour en ramener laborieusement des mots, plus ou moins aptes à traduire ce qu’il ressent et comprend de sa propre existence et de celle du monde qui l’entoure. Ce qui nécessite ou implique l’audace du sceptique et l’aplomb du modeste.
Ainsi confronté à terminer ce texte je ne peux qu’exprimer son impossibilité. Ce qui précède n’est que ma tentative inexercée et incomplète de rendre compte de ce que « penser veut dire » (formule à méditer !) conjointe à la volonté hétérodoxe et révoltée d’en extirper toute forme de croyance et cette démarche ne peut se clore ; au mieux elle ne peut qu’entrouvrir une porte.Si comme le soutient Miedzianagora avec Parménide « tout ce qui est » est lumière » la pensée, qui, elle aussi, est, ne peut donc qu’être également lumière. Par delà le vertige que ne peut manquer de susciter cette affirmation, l’exploration de ses conséquences sur notre rapport au réel reste à faire et elle n’est pas du ressort d’un seul individu. Bien que ce changement de paradigme puisse apparaitre aujourd’hui relevant de la pure utopie, d’un « lieu qui n’existe pas », il n’est pas, si l’on y réfléchit, plus improbable que celui qui nous régit et nous aliène depuis deux millénaires et dont l’absurdité des fondements n’a, pourtant, nul besoin d’être prouvée ! Seule l’étendue de cette période semble en exclure l’effondrement ; ce que, pourtant, son étroitesse à l’échelle du temps cosmique rend immédiatement insignifiante. Et puis est-il intellectuellement admissible que l’infinie beauté à la source du monde ne soit apte qu’à produire la dévastation d’une planète et de ses habitants ? Alors ici, au lieu de finir, je ne peux qu’inviter à prolonger, à s’insurger sans réserve contre « l’allant de soi », à observer la réalité pour ce qu’elle est, débarrassée de ses atours mensongers qui en polluent notre perception et de la doxa68 délétère qui subjuguent nos intelligences, pour enfin libres et sans croire, penser ….. !

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le 21 mai 2014

Singulier.eu

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1 Toutes les références étymologiques proviennent du Dictionnaire historique de la langue Française sous la direction Alain Ray Ed: Le Robert

2 J’ai déjà abordé cette question dans un texte antérieur (cf. « Démocratie et religion ») et ne m’attarderait donc pas à en démontrer à nouveau longuement l’évidente inanité.

3 La science (latin scientia, « connaissance ») est « ce que l'on sait pour l'avoir appris, ce que l'on tient pour vrai au sens large, l'ensemble de connaissances, d'études d'une valeur universelle, caractérisées par un objet (domaine) et une méthode déterminés, et fondés sur des relations objectives vérifiables et que l’on peut répartir ainsi :
- Les sciences dites exactes, comprenant les mathématiques et les « sciences mathématisées » ; 
- les sciences dites physico-chimiques et expérimentales (sciences de la nature et de la matière, biologie, médecine) ;
- les sciences dites humaines, qui concernent l'Homme, son histoire, son comportement, la langue, le social, le psychologique, le politique.

4«…. ! Imaginez un noble physicien, qui a observé longtemps les corps gazeux, les a chauffés, refroidis, comprimés, raréfiés. Il en vient à concevoir que les gaz sont faits de milliers de projectiles très petits qui sont lancés vivement dans toutes les directions et viennent bombarder les parois du récipient. Là-dessus le voilà qui définit, qui calcule ; le voilà qui démonte et remonte son gaz parfait, comme un horloger ferait pour une montre. Eh bien, je ne crois pas du tout que cet homme ressemble un chasseur qui guette une proie. Je le vois souriant, et jouant avec sa théorie ; je le vois travaillant sans fièvre et recevant les objections comme des amies ; tout prêt à changer ses définitions si l'expérience ne les vérifie pas, et cela très simplement, sans gestes de mélodrame. Si vous lui demandez : Croyez-vous que les gaz soient ainsi ? Il répondra : « Je ne crois pas qu'ils soient ainsi ; je pense qu'ils sont ainsi. ». Propos d’un Normand (1906) Edités par Jean-Marie Allaire, Robert Bourgne et Pierre Zachary

5 Un réacteur nucléaire est un ensemble de dispositifs comprenant une enceinte enfermant un « cœur » dans lequel une réaction en chaîne peut être, hors accident grave, initiée, modérée et contrôlée par l'humain via divers dispositifs de modération de la réaction de fission et d'évacuation d'énergie (chaleur). (Wikipédia)

6 Essentiellement ceux de haute activité (HAVL) et de moyenne activité et à vie longue (MAVL) : ce sont surtout les déchets issus du cœur du réacteur, hautement radioactifs pendant des centaines de milliers, voire millions d’années.
Radioactivité et santé
Connus depuis le début du XXe siècle, les effets cancérigènes de la radioactivité ont été précisés tant par les études réalisées à partir de l’observation de personnes irradiées à Hiroshima et Nagasaki en 1945 ou autour de Tchernobyl (l’apparition de cancers de la thyroïde de l’enfant est liée au rejet des iodes radioactifs), que par le suivi médical des travailleurs de la filière (mineurs, personnels des centrales, personnels des centres de traitement). Plusieurs types de cancers ont été observés (leucémies, cancers broncho-pulmonaires primitifs par inhalation de radon et sarcomes osseux). D’autres travaux ont permis de repérer une augmentation statistiquement significative des cancers secondaires imputables aux rayonnements ionisants chez les patients traités par radiothérapie. De plus, s’il est certain que les fortes doses de radioactivité sont nocives pour l’être humain, des études récentes en radioprotection ont conduit à s’intéresser à l’effet des faibles doses. En particulier il faut s’attarder sur la contamination chronique et faible. Les effets de cette contamination semblent être plus importants que prévus et surtout se traduire par des effets sur le système nerveux central, le système cardio-vasculaire et provoquer, aussi, des dérèglements glandulaires (diabète, retards mentaux chez les enfants,…).

7 Centrales Nucléaires : Démantèlement Impossible ?

8 Ce qui fut combattu c’est l’exploitation de l’homme par l’homme (révolutions socialistes, marxistes) mais le modèle productiviste n’a jamais été véritablement remis en question.

9 Le supin est une catégorie grammaticale intermédiaire entre le nom et le verbe, définie soit comme une « forme nominale » ou « d'origine nominale » du verbe, soit comme l'une des formes « infinitives » du verbe, au même titre que l'infinitif, le participe ou le transgressif (ou : « participe adverbial »).

10 La métonymie (substantif féminin) est une figure de style appartenant à la classe des tropes qui consiste à remplacer, dans le cours d’une phrase, un substantif par un autre, ou par un élément substantivé, qui entretient avec lui un rapport de contiguïté et peut être considéré comme équivalent sur l’axe paradigmatique du discours. Ainsi, la métonymie est une figure opérant un changement de désignation.

11 Il s’agit de la mathématisation généralisée (numérisation) du réel ! Et sur un modèle basique puisque binaire (0,1). Et tous nos sens sont concernés : La vue, le son, le toucher sont d’ores et déjà les premiers impliqués mais les recherches progressent également sur le goût et l’odorat

12 Ici une contribution brillante et étayée de Jacques Testart: Transhumanisme : pour quoi faire ?
Biologiste de formation, docteur en sciences, directeur de recherche honoraire à l'Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale); ex président de la CFDD (Commission française du développement durable 1999-2003), Jacques Testart s'est consacré aux problèmes de procréation naturelle et artificielle chez l’animal et l'homme.

13 A titre d’exemple emblématique :
-Jacques Benveniste et la mémoire de l’eau qui a payé cet « écart » de sa carrière et certainement même de sa vie : (http://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9moire_de_l%27eau)
- Et plus récemment (et toujours vivant !) Henrik Svensmark et sa théorie totalement « politiquement incorrecte » qui met en corrélation l'activité magnétique du soleil, les rayons cosmiques et les formations de la couche nuageuse, régulatrice des températures terrestres, indignement discréditée et à qui il a fallu presque 2 ans pour la faire publier. En ligne sur Daylimotion ici : http://www.dailymotion.com/video/x139d0a_le-secret-des-nuages_tech

14 La Préhistoire commence avec l'apparition de l’Homme, or celle-ci est le fruit d’une lente évolution sur plusieurs centaines de milliers d’années, depuis un Hominidé indéterminé. Ce début varie selon les chercheurs en fonction des critères utilisés pour définir l’Homme, qui peuvent être anthropologiques, culturels, voire philosophiques…
Selon, par exemple que l’on considère que l’Homme est représenté par le seul genre Homo ou également par le genre Australopithecus, la Préhistoire débute donc respectivement il y a environ 3 Ma ou 5 Ma.

15 Les « Lumières » sont un mouvement culturel, philosophique et intellectuel qui émerge dans la moitié du XVIIe siècle sous les philosophes comme Spinoza, Locke, Bayle et Newton, avant de se développer dans toute l'Europe, notamment en France, au XVIIIe siècle. Par extension, on a donné à cette période le nom de siècle des Lumières.

16 L’existentialisme est un courant philosophique et littéraire qui postule que l'être humain forme l'essence de sa vie par ses propres actions, en opposition à la thèse que ces dernières lui sont prédéterminées par de quelconques doctrines théologiques, philosophiques ou morales. L'existentialisme considère donc chaque personne comme un être unique qui est maître, non seulement de ses actes et de son destin, mais également, pour le meilleur comme pour le pire, des valeurs qu'il décide d'adopter.

17 D’abord inventé par l’auteur Frank White en 1987, The Overview Effect (l’effet de surplomb/d’aperçu) est le terme employé pour décrire le décalage cognitif dans la conscience provoquée par l’impressionnante expérience de regarder la terre depuis son orbite. La vidéo n’existe, à ma connaissance qu’en « américain » et est, bien évidemment, entachée de mythologie pro NASA.

18 Ce mot, du fait de l’adjonction comique des deux qui le composent mais également de la défaite intellectuelle qu’elle implique, m’est toujours apparu suspect et inapproprié pour rendre compte du cheminement intellectuel nécessaire à l’évolution d’u point de vue. Il est vrai que persuadé et séduit ne valent guère mieux. Et puis en l’occurrence le voilà bien adéquat.

19 « SOCRATE (~469-~399) ET ÉCOLES SOCRATIQUES », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 26 janvier 2014. https://www-universalis--edu-com.

20 Jacques BRUNSCHWIG, Spécialiste, surtout connu comme historien de la philosophie antique, il a traduit notamment Les Topiques d'Aristote (Les Belles Lettres). S'il n'a pas publié de nombreux ouvrages, il a toutefois écrit de nombreux articles et réalisé des éditions critiques dont celle des écrits de Leibniz. Fils d'Isabelle Vidal-Naquet, il était le cousin germain de l'historien Pierre Vidal-Naquet, avec qui il fit ses débuts dans la lecture des auteurs de l'Antiquité.

21 Il n'y a cependant pas eu d'accord chez les historiens sur le fait de savoir qui de Platon, d'Aristote voire d'Aristophane rendait le mieux compte de la pensée du Socrate historique, même si Platon avait la préférence du plus grand nombre. Mais même chez les partisans de Platon, la question de savoir à quels dialogues se fier n'est pas résolue : l'Apologie de Socrate seule, les dialogues de jeunesse (tous ou seulement certains), les dialogues apocryphes, voire la totalité des dialogues. Puis, à la fin du XIXe siècle, le caractère fictionnel des « dialogues socratiques » se vérifie. Ils sont en effet un genre littéraire, ainsi que l'atteste Aristote. La mise en scène et le contenu de ces dialogues font une large place à l'invention et ils ne visent pas à être un témoignage exact de la pensée de Socrate.

22 Quelques noms parmi les plus connus : Leucippe, Démocrite, Aristippe de Cyrène, Diogène, Epicure bien sûr et Lucrèce réunis par Michel Onfray dans ce qu’il nomme : L’Archipel Hédoniste, seul ouvrage contemporain d’envergure (à ma connaissance !) à réhabiliter ce moment épistémologiqueessentiel par ailleurs méprisé et combattu par la plupart des caciques en place. Ce qui se comprend facilement tant cette « Contre Histoire de la philosophie » est une belle bourrasque d’air pur et frais qui en décoiffe plus d’un !

23 Cf. La critique de l’écriture dans le Phèdre de Platon

24 A consulter sur ce sujet le texte essentiel de Roland Barthes, « L'ancienne rhétorique : aide mémoire » http://www.persee.fr/

25 Je renvois ici encore une fois aux « Sagesses antiques » de Michel Onfray, Volume 1 de sa « Contre Histoire de la philosophie », livre sans lequel ce texte n’existerait pas !

26 Il faudra attendre plus de 2000 ans (L’Europe des Lumières au XVIIIe siècle) pour voir ressurgir un moment comparable mais bien plus court et qui, lui, paradoxalement vint se fracasser sur la révolution bourgeoise de 1789.

27 Né en janvier 1548 à Nola (Italie) et mort (exécuté) le 17 février 1600 à Rome. Sur la base des travaux de Nicolas Copernic et Nicolas de Cues, il développe la théorie de l'héliocentrisme et montre, de manière philosophique, la pertinence d'un univers infini, qui n'a pas de centre, peuplé d'une quantité innombrable d'astres et de mondes identiques au nôtre.

28 D’abord écrit métaphisique (v.1282) puis corrigé en métaphysique (1639) est emprunté au latin scholastique métaphysica ((1070-1142) formation savante à partir de la locution grecque méta ta phusika « après les choses de la nature » ce qui s’explique ainsi : La collection des écrits d'Aristote (-384, -322) élaborée par Andronicos de Rhodes vers 60 av. J.-C. séparait les livres phusikè achroasis (Leçons de Physique), sur la nature, et ceux qui venaient après, meta ta phusika, la Métaphysique. Le mot méta-physique avait donc un sens simplement éditorial : les livres d'Aristote qui arrivent après ceux qu'il a consacrés à la physique (meta ta Phusika). Mais les platoniciens ont voulu y voir la discipline qui porte sur les réalités au-delà de la physique

29 Ernst Mach (1838 / 1916) est un physicien et philosophe autrichien.
La plupart de ses recherches dans le domaine de la physique furent consacrées aux interférences, à la diffraction, la polarisation et la réfraction de la lumière dans différents milieux sous des influences externes. Connu pour avoir en 1877 décrit correctement les effets des ondes de choc observés lors du déplacement supersonique d'un projectile. Désormais, on appelle nombre de Mach le rapport vp/vs entre la vitesse du projectile et la vitesse du son.

30 Comme déjà dit plus haut : Il explique l’expulsion de l’électron par sa collision avec une seule « quantité d’action »qui serait d’une énergie équivalente à celle que la somme des vagues était censée produire en une seconde. Comme si, cette succession de vagues se confondait en un instant dans cette « quantité d’action » ou « quantum d’action »

31 Rappelons-nous ! Plus les vagues sont courtes, plus évidemment leur nombre est grand en un temps t donné, et donc plus l’énergie est grande en ce même temps.

32 Parmi les 2 propositions p et non-p (ou toute autre paire de propositions), en l'absence de système de logique formelle, on pourrait en théorie avoir l'un des 3 cas suivants:

  1. p est vraie ou non-p est vrai, exclusivementp et non-p sont tous 2 vrais
  2. ni p ni non-p n'est vrai

Le principe de non-contradiction qui fonde la logique formelle rejette le cas 2 pour une paire de propositions qui sont la négation logique l'une de l'autre : on ne peut penser p et non-p vrais à la fois. Le principe du tiers-exclu rejette le cas 3 : on ne peut penser que p ou non-p, il n'y a pas de troisième cas hypothétique.


33 Ces idées, malgré ce que l’histoire frelatée tend à nous enseigner, n’apparaissent pas « spontanément » à cette époque ; elles n’avaient bien sûr pas disparu et continuaient à exister et se propager plus ou moins secrètement. Elles ne sont que l’expression de la faiblesse, toute relative, du pouvoir religieux de l’époque à endiguer leurs résurgences…

34 Une remarque en passant !!! La caverne de Platon est une très belle et explicite allégorie au détail près qu’elle décrit les hommes captifs et abusés par leur sens et où la lumière symbolise le monde des idées et qu’il faut donc l’inverser pour qu’elle rende compte de la vérité. L’humanité est aliénée à un idéalisme (de fait pour une grande part celui là même de Platon !) qui lui fait croire aux arrières mondes (c’est ceux là qui sont visibles sur le mur) alors que la seule lumière possible ne peut nous être accessible qu’à l’extérieur et à travers nos sens, d’évidence du temps de notre vie et certainement pas après notre mort !

35 Ingénieur, physicien spécialisé en thermodynamique, professeur émérite de la faculté des sciences à l'université de Bruxelles, né le 17 octobre 1904 et décédé le 23 juin 1999. Compagnon d’Ilya Prigogine dans des recherches, menées pendant plus de vingt ans qui vaudront à ce dernier le prix Nobel de chimie pour ses contributions à la thermodynamique hors équilibre, particulièrement la « théorie des structures dissipatives » ouvrage qu’il cosignera.

36Albert Einstein Comment je vois le monde, Flammarion Paris (1958) p.93 et p. 153

37 Fragments : Les voies de la vérité dans : « Les penseurs grecs avant Socrate » Traduction de Jean Voilquin, Garnier Flammarion Paris 1964 pp. 94,95.

38 Héraclite, cité par Clément d’Alexandrie, Stromates, V, 105 ; Pléiade, « Les présocratiques » p ; 153

39 Simplicius, « commentaire sur la physique d’Aristote La pléiade Les Présocratiques » p. 308

40 Mélissos de Samos, philosophe présocratique, homme politique et amiral ionien de Grèce antique, dernier représentant de l'école éléatique.

41 Un porphyre est un terme assez général pour désigner toute roche magmatique filonienne, qui présente une texture caractérisées par de grands cristaux de feldspath noyés dans une pâte aphanitique (Concerne principalement les roches magmatiques dont le grain n'est pas visible à l'œil nu)

42 Mouvement rationaliste d'émancipation de l'homme, l'Aufklärung se rattache par de nombreux aspects à l'humanisme de la Renaissance. Ses précurseurs du siècle précédent sont Descartes, Bacon, Newton, Hobbes, Locke, Spinoza, Leibniz.

43 Cette hypothèse ici formulée n’engage que moi. Elle n’est qu’une tentative (ludique !) de pousser le raisonnement de Miedzianagora et donc d’en déduire une « solution » cohérente…Il donne lui-même, concernant l’effet photo électrique, une interprétation plus élaborée que nous verrons un peu plus loin…

44 Par la suite i.ph. désignera infraphoton.

45 Dans les années 40, le physicien Ralph Alpher avait essayé d’apporter une preuve de son existence, en prédisant que l’ensemble de l’Univers devait être baigné d’un faible rayonnement électromagnétique ce que deux radioastronomes, Penzias et Wilson finirent par découvrir en cherchant tout autre chose ; ils n’arrivaient pas à s’affranchir d’un bruit persistant… !!!

46Exemple de cette mécanique.
Principes :
1) Des i.ph entrent en collision avec des électrons et déplacent ceux-ci.
2) Les électrons déplacés entrent en collision avec d’autres électrons.
3) La composante non élastique de ces collisions entre électrons consiste en une libération d’i.ph redressés ; un flux d’i.ph.
4) Ces flux d’i.ph par les poussées qu’ils exercent en rencontrant les masses subatomiques déplacent celles-ci.
S’il s’agit d’attraction, celle d’un aimant par exemple :
a) de l’aimant des i.ph partent vers le matériau sensible ;
b) ces i.ph entrent en collision avec des électrons de ce matériau ;
c) ces électrons entrent en collision avec d’autres électrons dudit matériau ;
d) la composante non élastique de ces dernières collisions consiste en un flux d’i.ph redressés qui vont dans la direction opposée à celles des i.ph venus de l’aimant ;
e) ces derniers flux d’i.ph impulsent une poussée aux masses subatomiques du matériau sensible dans la direction de l’aimant ;
Tout ceci implique certaines localisations particulières des électrons dans les molécules des matériaux :
Soit des aimants eux-mêmes ;
Soit des matériaux (qu’ils attirent ou au contraire n’attirent pas). »

47 Particules virtuelles et particules réelles
Les particules virtuelles possèdent des propriétés qui diffèrent des particules réelles.
Les particules virtuelles et réelles sont identiques. Toutes leurs propriétés intrinsèques sont les mêmes.
Les particules virtuelles apparaissent puis disparaissent rapidement, donc ne peuvent être observés.
Les particules virtuelles ne respectent pas la conservation de l'énergie. Pour une fluctuation dans le vide, par exemple, il y a au départ une absence de particule, puis apparition d'une particule avec une certaine énergie puis disparition. La conservation de l'énergie est donc violée « un bref instant », mais la durée d'existence de la particule est compatible avec les relations d'incertitudes. L'énergie d'une particule virtuelle peut être négative.

48 Le 14 mars 2013, le CERN publie un communiqué de presse dans lequel il indique que le nouveau boson découvert
« ressemble de plus en plus » à un boson de Higgs, même s'il n'est pas encore certain qu'il s'agisse du boson de Higgs du modèle standard

49'L’effet de la gravitation est supposé se propager à une vitesse infinie dans la théorie de Newton, alors que la vitesse de la lumière est la vitesse maximale pour toute interaction selon la relativité restreinte. Mais depuis la relativité générale, la gravitation n'est plus perçue comme une force d'attraction, mais plutôt comme une manifestation de la déformation de la géométrie de l'espace-temps sous l'influence des objets qui l'occupent ; les déformations de l'espace-temps prévues sous l'effet des corps massifs, quand ceux-ci ont une forte accélération, ne se propagent pas plus vite que la vitesse de la lumière, ce qui résout le paradoxe de l'instantanéité apparente de l'interaction newtonienne. Il en résulterait des ondes gravitationnelles, (cela ne vous rappelle rien ?) qui restent encore à observer (sic !).

50Le concept d’antitypie, depuis les stoïciens, est utilisé notamment par Leibniz et désigne « la résistance ou l’inertie » ; mais encore « ce par quoi la matière peut être dite dans l’espace puisqu’elle exprime le Situs des substances », mais c’est encore « l’impénétrabilité, « qui oppose un corps aux autres » expliquant la résistance. L’antitypie avec l’inertie et l’étendue définissent ensemble la matière première.

51…, et non « poussières d’étoiles » comme certains « savants » ont jugé utile de nous inculquer !

52 « Dieu dit: Que la lumière soit! Et la lumière fut. » (Ancien Testament Le Pentateuque - Genèse 1)

53 Friedrich Nietzsche Ecce Homo « Pourquoi je suis une fatalité ? »

54 « Ecce homo », rédigé à l’automne 1888, monument sublime et dérisoire d’autocélébration, ultime tentative paradoxale pour se relier au monde ne peut, de mon point de vue, qu’en attester…. Il sombrera, d’ailleurs, dans la folie, en janvier 1889, quelque mois seulement après l’avoir achevé

55 La charia dérive de la racine arabe « šarʿ », qui signifie à l’origine « la voie qui mène à l’eau », ce qui peut être interprété comme « la voie qui mène à la source de la vie ». Utilisé dans un sens religieux, ce terme signifie « la voie vers Dieu », car le but de la vie d’un musulman est Allah (Dieu).

56 Les grandes firmes multinationales (FMN) ou transnationales (FTN) jouent un rôle essentiel dans le processus de mondialisation. Originaires à plus de 80 % des pays riches du Nord (même si le nombre de FTN du Sud est en constante augmentation), elles dominent les échanges internationaux et s'appuient sur des centaines de milliers de filiales. En 2011, les 82 000 FTN que compte la planète ont réalisé plus du quart du PIB mondial. À elles seules, elles détiennent 1/3 de la production mondiale, 2/3 des IDE (investissements directs étrangers) et les 2/3 des échanges mondiaux.

57 La base de données pour l'analyse structurelle de l'industrie STAN (STructural ANalysis Database) couvre 49 branches du secteur manufacturier dans 22 pays de l'OCDE sur la période 1978-1997. C'est, à ce jour, une des bases de données internationales les plus complètes dans ce domaine. Elle comprend des estimations comparables aux comptes nationaux pour les mesures d'activité industrielle suivantes : production, valeur ajoutée (en prix courants et constants), formation brute de capital fixe, emploi, rémunération de la main-d’œuvre, exportations et importations.

58 Selon Raoul-Marc Jennar, essayiste anti-libéral, l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques en anglais OCDE) constitue un « véritable bureau d’études des pays industrialisés, qui propage la doctrine néolibérale, juge les politiques des États membres et propose des accords orientés dans le sens d’un dépérissement des pouvoirs publics et d’une autonomie des acteurs privés »


59 « Je propose aux Français de rompre réellement avec l’esprit, avec les comportements, avec les idées de Mai 68, avait-il promis. Je propose aux Français de renouer en politique avec la morale, avec l’autorité, avec le travail, avec la nation », soit travail, famille patrie !!!

60 Les 15 et 16, la grève gagne les usines Renault de Cléon et Sandouville (Seine-Maritime), Flins et Boulogne-Billancourt. Progressivement, jusqu'au 22 mai, et sans mot d'ordre syndical national, le mouvement s'étend. Le pays se retrouve paralysé par 7 millions de grévistes déclarés (sans compter les salariés en chômage technique, ou bloqués par le manque de transports). Dans les usines, les bureaux, les services publics, les transports, tous cessent le travail. Il s’agit d’une situation inédite : en 1936, les grévistes n'avaient été que 2 millions, et seul le secteur privé avait été touché.

61 Il est possible de les consulter sur un site qui leur est dédié : http://users.skynet.be/ddz/mai68/index.html

62 Sous-titrée « On arrête tout, on réfléchit, et c'est pas triste », elle narre un abandon utopique, consensuel et festif de l'économie de marché et du productivisme. La population décide d'un certain nombre de résolutions dont la première est « On arrête tout » et la deuxième « Après un temps d'arrêt total, ne seront ranimés - avec réticence - que les services et les productions dont le manque se révélera intolérable. Probablement : l'eau pour boire, l'électricité pour lire le soir, la T.S.F. pour dire " Ce n'est pas la fin du monde, c'est l'AN 01, et maintenant une page de Mécanique céleste " ». L'entrée en vigueur de ces résolutions correspond au premier jour d'une ère nouvelle, l'An 01.
. (source wikipédia)

63 Le mouvement des Indignés (Indignados en espagnol) ou Mouvement 15-M1 est un mouvement assembléiste et non violent né sur la Puerta del Sol, en Espagne, le 15 mai 2011, rassemblant des centaines de milliers de manifestants dans une centaine de villes2, se prolongeant par divers modes d’action (campements, marches) jusqu'à aujourd’hui. S’en est suivi une série de manifestations pacifiques, rassemblant jusqu'à plusieurs dizaines de milliers de personnes, organisées sur les réseaux sociaux et des sites web dont « ¡Democracia Real Ya! » (Une vraie démocratie, maintenant), auxquels se sont joints de 2004 à 500 organismes soutenants, parmi lesquels les collectifs ATTAC, Anonymous, NoLesVotes et Juventud Sin Futuro (« Jeunesse sans avenir »). Source wikipédia

64 « Lorsque le pouvoir, le luxe et l'argent deviennent des idoles, ils prennent le pas sur l'exigence d'une distribution équitable des richesses. C'est pourquoi il est nécessaire que les consciences se convertissent à la justice, à l'égalité, à la sobriété et au partage. » Message du pape François pour le Carême en 2014 .

65 …à caractère schizophrénique (le mot schizophrénie est formé de deux parties venant du grec «schizo» qui veut dire fractionnement et de «phrénie» qui désigne l’esprit) !

66 En terme marketing, on nomme ceci la « customisation » : Terme anglais francisé. Adaptation de l'offre de produits jusqu'à la personnalisation, de manière à répondre aux attentes spécifiques des consommateurs. Chacun d'entre eux étant considéré comme une combinaison unique de caractéristiques, la stratégie marketing n'intègre plus la segmentation du marché, si ce n'est pour considérer autant de segments que le marché compte de consommateurs. L'évolution de la gestion de production et le recours à l'informatique participent pour beaucoup à cette possibilité de « personnalisation de masse » (sic !)

67 « Sur la télévision et Le champ journalistique par Pierre Bourdieu » http://www.singulier.eu/triptyque.html Références/Vidéos

68 La doxa (du grec δόξα, doxa, « opinion », « conjecture ») est, dans la philosophie de Parménide, l'opinion confuse que l'on se fait sur quelqu'un ou sur un aspect de la réalité, par opposition au vrai chemin d'accès à la vérité : l'Être qui est.